La Russie a présenté en grande pompe son nouveau robot IA, AIdol. Mais la machine, censée incarner la souveraineté technologique du pays, a titubé, s’est effondrée et a convulsé sur scène. Un désastre qui en dit long sur le retard de Moscou dans la course à la robotique.
La scène était pensée pour marquer les esprits. Lors d’un grand show technologique à Moscou, au Palais des Congrès Yarovit, le premier robot humanoïde russe doté d’IA, nommé AIdol, a fait son entrée. Il a débarqué sur le thème mythique de Rocky comme pour mieux faire passer le message : la Russie, tel un outsider déterminé, venait défier les géants américains et chinois sur le ring de l’innovation.
Mais voilà, le combat n’a même pas commencé. Quelques secondes après son entrée, alors qu’il tentait un salut, l’humanoïde a titubé, perdu l’équilibre, et s’est lourdement effondré. Pire encore, des témoins rapportent qu’il est brièvement entré en « convulsion », laissant des composants épars sur le sol. Dans un mouvement de panique, le personnel a tiré un rideau noir à la hâte pour cacher la machine pendant qu’on la traînait hors de scène.
Ce n’est pas un simple « coup de com’ raté ». C’est le symbole physique du fossé béant qui sépare les ambitions de la Russie, sa quête de « souveraineté technologique », de ses capacités industrielles réelles.
AIdol : des ambitions démesurées, une exécution… limitée
Développé par la startup locale « Idol » et son PDG, Vladimir Vitukhin, le robot était censé impressionner. Face au désastre, la direction s’est contentée de blâmer des « problèmes de réglages » ou des « erreurs de calibrage ». En y regardant d’un peu plus près, on comprend pourtant que le problème est bien plus profond.
L’équipe d’Idol se vante qu’AIdol contient 77 % de composants fabriqués en Russie, avec un objectif de 93 % à terme. C’est là que le bât blesse. Ce nationalisme industriel, loin d’être une force, est probablement la cause même de l’échec. La robotique de pointe, comme chez Boston Dynamics, dépend d’une chaîne d’approvisionnement mondiale hyperspécialisée pour ses capteurs, ses puces graphiques et, surtout, ses actionneurs (les « muscles » du robot). En s’isolant, la Russie se condamne à utiliser des composants « nationaux » moins performants, incapables de gérer la physique complexe de l’équilibre.
L’autre « exploit » revendiqué par l’IA d’Aldol serait de « sourire, penser et être surpris ». La fiche technique révèle le pot aux roses : cette « IA » est en fait un visage doté de 19 servomoteurs, d’une peau en silicone et de 7 microphones. Plutôt que d’autonomie, on doit parler d’ici d’animatronique comme pour un robot de parc d’attraction.
La vraie course à l’IA dans la robotique, celle menée par Tesla ou Boston Dynamics, se joue sur « l’IA incarnée » (Embodied AI) : des réseaux neuronaux complexes qui gèrent la marche dynamique et l’adaptation à l’imprévu. L’équipe d’Idol s’est concentrée sur un « visage » expressif pour un robot qui ne peut même pas « marcher ».
Pourquoi AIdol est tombé : la « danse » impossible de la robotique
Faire tenir un humanoïde debout, c’est déjà une prouesse. Le faire marcher est une danse extrêmement fragile » qui exige une synchronisation parfaite et en temps réel des capteurs (qui voient le sol), du logiciel (qui calcule) et des moteurs (qui agissent).
La « convulsion » d’AIdol est le symptôme le plus grave. Ce n’est pas une simple chute. C’est une « boucle de rétroaction catastrophique » : le robot a senti qu’il tombait, son logiciel immature a tenté de surcompenser, envoyant des ordres erratiques à ses moteurs, ce qui a aggravé la chute jusqu’à l’effondrement.
C’est aussi un échec de méthode. Des entreprises comme Boston Dynamics publient fièrement les chutes de leurs robots en laboratoire. C’est un processus de R&D normal. La Russie, elle, a caché ses tests pour tenter un « grand dévoilement » de propagande, transformant un échec de routine en humiliation mondiale.
Et l’Europe dans tout ça ? Un géant endormi
Si le fiasco russe prête à sourire, il masque une réalité plus inconfortable : l’Europe est elle-même « significativement en retard » dans la course aux humanoïdes généralistes. Historiquement une puissance en robotique industrielle, le Vieux Continent semble avoir manqué le virage, laissant les États-Unis et la Chine dominer le secteur. Une absence qui inquiète et aujourd’hui vu comme potentiellement catastrophique pour la souveraineté industrielle.
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— Tesla Optimus (@Tesla_Optimus) October 7, 2025
La principale faiblesse européenne n’est pas le manque de talent, mais un marché fragmenté et une difficulté à transformer l’excellence en recherche en champions commerciaux de la taille de Tesla ou Unitree. Pourtant, l’Europe n’est pas hors-jeu. Elle avance avec une approche différente, souvent plus spécialisée et soutenue par des fonds publics et privés conséquents.
Des hubs de recherche de classe mondiale
Le véritable atout de l’Europe reste sa recherche fondamentale. Des plateformes comme TALOS de PAL Robotics en Espagne ou le célèbre robot iCub en Italie sont des références mondiales dans les laboratoires pour l’étude de la locomotion et de la cognition.
Le défi de l’Europe n’est donc pas technique, mais stratégique : réussir à unifier et industrialiser ses innovations pour ne pas devenir un simple client des technologies américaines et chinoises. L’échec d’AIdol montre les limites de l’autarcie ; le retard relatif de l’Europe montre les limites de la fragmentation.
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Source :
Newsweek