Smartphones, PC, consoles… Tout va coûter plus cher, et c’est la faute de l’IA

Smartphones, PC, consoles… Tout va coûter plus cher, et c'est la faute de l'IA


L’industrie de la mémoire vive et du stockage SSD est en feu, en même temps que les besoins des grands acteurs de l’IA vont grandissant. Pour les utilisateurs grand public, c’est un sérieux problème : cette demande ahurissante fait flamber les prix de la RAM, des SSD et plus globalement de tous les produits électroniques. Et les premières annonces de hausses des prix ont commencé à tomber.

Les mauvaises nouvelles s’empilent

HP a prévenu ses clients que les prix de ses PC allaient augmenter à partir de mai prochain. Le constructeur va vivre d’ici là sur des stocks achetés au meilleur prix. Mais ensuite, la hausse des coûts de la mémoire va rogner les marges de la division PC, obligeant l’entreprise à réagir — et à refiler la facture aux consommateurs.

HP va faire appel à des fournisseurs moins coûteux et « accélérer notre transformation IA pour réaliser davantage d’économies », a expliqué le CEO Enrique Lores pendant la présentation des résultats trimestriels. Une transformation qui va au passage détruire des milliers d’emplois. « Ce que nous avons observé par le passé dans ce genre de situation, du point de vue de la demande, c’est que ce sont généralement les segments d’entrée de gamme qui sont touchés », a indiqué le dirigeant. Les clients de HP au budget ric-rac seront donc les premiers impactés.

Lenovo, le plus grand constructeur de PC au monde, va s’appuyer sur ses stocks (l’inventaire est 50 % plus élevé que la normale) pour éviter de répercuter les hausses des prix de la mémoire sur ses clients durant le dernier trimestre de cette année. Le groupe, qui a indiqué disposer de suffisamment de puces mémoire pour tenir tout 2026, se dit en mesure de mieux absorber une situation de pénurie que ses rivaux. En espérant qu’elle ne perdure pas au-delà…

© Aakash Malik (Unsplash)

CyberPowerPC, un assembleur de PC sur mesure, va procéder à des « ajustements de prix » à partir du 7 décembre, expliquant que les tarifs de la SSD avaient augmenté de 100 %, et ceux de RAM de 500 % (!) sur certains kits. « Nous comprenons qu’avec les fêtes qui approchent, la situation n’est pas idéale, et nous tenons à rester totalement transparents avec notre communauté », s’excuse l’entreprise.

Du côté de Framework, pas encore de hausse généralisée des prix pour ses PC modulaires, mais un arrêt de la vente de kits de RAM dans la boutique. « Le marché de la mémoire traverse une mauvaise passe », déplore le constructeur. « Nous n’avons pas augmenté nos tarifs, mais nous avons dû retirer les barrettes vendues seules de notre marketplace pour couper l’herbe sous le pied aux scalpers et préserver le stock destiné aux clients qui les achètent avec nos ordinateurs portables DIY. »

Malheureusement, il ne faut pas se faire d’illusion : « nos coûts d’approvisionnement en mémoire augmentent fortement, il est donc probable que nous devions ajuster nos prix à la hausse prochainement», indique l’entreprise… Tim Sweeney, le patron d’Epic Games, s’inquiète lui aussi de l’impact de la hausse des prix de ces composants indispensables. « La hausse des prix de la RAM va devenir un vrai problème pour le gaming haut de gamme pendant plusieurs années », affirme-t-il.

On ne voudrait pas être dans la peau de Valve qui vient d’annoncer la Steam Machine, en évitant soigneusement de révéler le prix de l’appareil. La console de salon, dont une partie de la fiche technique repose évidemment sur de la RAM (16 Go + 8 Go de mémoire vidéo) et un SSD (de 512 Go à 2 To), devrait être commercialisée au premier trimestre 2026. La situation est actuellement si mouvante qu’un report n’est pas à exclure.

Le prix de l’IA

Comment expliquer cette surchauffe tarifaire ? Si la situation ressemble un peu au pic de la pandémie de Covid, elle est toutefois bien différente. À l’époque, les constructeurs se battaient comme des chiffonniers pour obtenir des stocks de mémoire et répondre à la demande de consommateurs cherchant désespérément à télétravailler et s’occuper à la maison.

« [Si] les prix montent très, très haut, et je pense que c’est inédit à ce rythme, c’est entièrement porté par la demande liée à l’IA », résume Winston Cheng, le directeur financier de Lenovo. L’IA générative, c’est en effet la principale responsable.

Les dizaines de milliards de dollars d’investissements annoncés ces derniers mois par Meta, Google, Amazon, Microsoft ou encore OpenAI sont en grande partie des dépenses d’infrastructures pour faire pousser les data centers. Il faut bien équiper les serveurs qui entraînent les modèles d’intelligence artificielle, sans oublier d’assurer la meilleure inférence possible, la phase où ces modèles déjà entraînés tournent à plein régime pour générer des réponses, analyser des images ou traiter des requêtes en temps réel.

Et l’IA est très gourmande en mémoire. Pas n’importe laquelle : de la mémoire de très bonne qualité, HBM (High Bandwidth Memory), devenue star incontournable de l’IA. La HBM consomme plus de trois fois la capacité en wafers de la DRAM standard. Autrement dit : produire de la HBM grignote mécaniquement la production de mémoire classique. Et les fabricants ont tout intérêt à donner la priorité à cette mémoire haut de gamme, bien plus rentable.

À cela s’ajoutent les besoins de mémoire pour les serveurs classiques, et l’arrivée d’une autre tendance lourde : l’IA embarquée directement dans les appareils, des PC aux smartphones. Apple a ainsi été forcée de muscler les configurations de RAM dans ses Mac et ses iPhone (8 Go minimum) pour qu’ils puissent faire tourner les modèles locaux d’Apple Intelligence.

Même si la RAM et le SSD reposent sur des technologies différentes, ces mémoires dépendent des mêmes fabricants et d’une capacité de production limitée. Résultat : quand la demande explose côté IA, tout le marché de la mémoire se retrouve sous pression.

Les grands acteurs de l’IA font des pieds et des mains pour s’accaparer les plus grands volumes. Dans ce domaine, OpenAI a frappé un grand coup début octobre. Samsung et SK Hynix, les deux plus importants fournisseurs, ont signé des accords avec le créateur de ChatGPT pour équiper les data centers du projet Stargate. Particularité notable : les deux fabricants ne fourniront pas des puces DRAM classiques prêtes à l’emploi, mais des wafers entiers, non découpés, signe de l’ampleur totalement hors norme des besoins.

Stargate Openai Oracle
© OpenAI

Stargate pourrait à lui seul absorber près de la moitié de la production mondiale de DRAM. Samsung et SK Hynix confirment que la demande d’OpenAI pourrait grimper à 900 000 wafers par mois, un volume qui représenterait environ 40 % de toute la capacité DRAM annuelle. Et ce n’est qu’un début : le projet englobe aussi de la mémoire traditionnelle DDR5, de la LPDDR pour l’IA embarquée, et bien sûr des piles HBM pour les GPU et accélérateurs dernier cri.

Pour mesurer l’échelle de ce chiffre : la capacité mondiale des usines 300 mm devrait atteindre 10 millions de wafers par mois cette année, dont environ 2,25 millions destinés à la DRAM. Stargate devrait donc siphonner une part colossale de cette production, au détriment du reste du marché, PC compris.

Autre facteur aggravant : les fabricants de mémoire eux-mêmes ne se bousculent pas pour augmenter leur cadence. Samsung, SK Hynix et Micron sortent tout juste de deux années catastrophiques, marquées par une demande en berne et des stocks invendus qui s’empilaient dans les entrepôts. Pas question, cette fois, de relancer les lignes à pleine puissance au risque de se retrouver avec un surplus si la frénésie autour de l’IA devait s’essouffler.

Les trois géants privilégient donc la production de HBM, bien plus rentable, et ils restent extrêmement prudents sur l’expansion des capacités DRAM classiques. Un choix rationnel d’un point de vue industriel… mais qui entretient la tension actuelle et limite toute perspective de baisse rapide des prix.

Mais au final, tout indique que cette tension ne sera pas un simple accident de parcours. Les analystes parlent d’un « supercycle » de la mémoire dopé par l’IA, potentiellement parti pour durer trois ou quatre ans. Tant que les géants du secteur investiront des dizaines de milliards dans des fermes de serveurs toujours plus gourmandes, et que les fabricants privilégieront la HBM au détriment de la DRAM classique, les prix resteront sous pression. Tout comme le portefeuille des consommateurs

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