Telecom Italia est prêt à faire le grand saut. L’opérateur italien est sur le point de vendre son réseau de télécommunications fixes et ses activités internationales (Sparkle). Deux camps s’opposent pour cette reprise : d’un côté, le fonds américain KKR, intéressé depuis plus d’un an ; de l’autre, le tandem formé par Cassa Depositi e Prestiti (CDP), l’équivalent italien de la Caisse des dépôts et consignations, et l’investisseur australien Macquarie. Telecom Italia a donné aux deux prétendants jusqu’au 31 mars pour déposer des offres améliorées, jugeant insuffisants les 20 milliards d’euros initialement avancés. Devenu locataire de cette infrastructure fixe, l’opérateur pourrait alors se consacrer entièrement à la commercialisation d’abonnements ainsi qu’à l’exploitation de son réseau mobile et à ses activités annexes (cloud et cybersécurité).
Cette séparation d’ampleur entre la société de réseaux (Netco) et celle de services (Servco) marquerait le point d’orgue d’une stratégie poussée ces dernières années par les marchés financiers comme une réponse aux difficultés des opérateurs. Plusieurs groupes concurrents, à l’image d’Altice, ont déjà cédé à cette logique. Mais jamais un acteur historique de la taille de Telecom Italia n’a encore osé sauter le pas sur son marché domestique.
Retard dans le déploiement de la fibre
Avait-il un autre choix ? L’italien a besoin d’argent frais pour faire face à ses 20 milliards d’euros de dette nette au 31 décembre 2022. Ce poids l’empêche de financer la conversion de ses lignes ADSL vers la fibre optique et explique le retard de l’Italie dans le déploiement de cette nouvelle technologie. Selon l’index numérique de la Commission européenne pour 2022, la fibre couvre un peu plus de 40 % du pays, 20 points de moins qu’en France et 40 de moins qu’en Espagne. C’est pourquoi le gouvernement italien, qui dispose d’une action de préférence (golden share) au capital de Telecom Italia, ne veut pas perdre la main sur un actif aussi stratégique. Il pousse donc pour l’offre de rachat déposée par le tandem entre CDP et Macquarie. La Caisse détient déjà 9,81 % du capital de Telecom Italia.
Un autre actionnaire a intérêt à faire monter les enchères. Il s’agit du français Vivendi, détenteur de 17,04 % de l’opérateur. Arrivé au capital en 2015, le groupe de Vincent Bolloré n’a jamais réussi à rentabiliser son investissement. Rien qu’en 2022, il a dû déprécier de 1,3 milliard d’euros la valeur de sa participation, en plus des 728 millions perdus en 2021.