Parmi les concessions faites par Apple pour se conformer au règlement sur les marchés numériques (DMA), l’autorisation donnée aux navigateurs web d’utiliser leur propre moteur de rendu plutôt que WebKit a fait moins de vagues que les boutiques alternatives ou le sideloading. Et elle ne risque pas d’en faire beaucoup au vu des critères draconiens imposés par Apple.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que la mise en œuvre des mesures du DMA début mars n’a pas provoqué le big bang voulu par la Commission européenne, du moins pour ce qui concerne Apple. Très peu de développeurs ont saisi l’opportunité de profiter des nouvelles règles en vigueur pour le marché européen : on compte bien deux boutiques alternatives (AltStore et Setapp Mobile), mais on cherche encore les premières apps à installer depuis le web ou encore les applications qui utilisent un autre système de paiement que celui de l’App Store.
L’emprise de WebKit
En cause : les conditions imposées par le constructeur, notamment les fameux frais de technologie de base (CTF) fixés à 0,50 € par installation annuelle au-delà du premier million. Apple a mis un peu d’eau dans son vin depuis, mais cela reste une épée de Damoclès au-dessus de la tête des développeurs qui rencontreraient le succès.
Les contraintes d’Apple sont également la raison qui explique l’absence de navigateur web fonctionnant avec un autre moteur de rendu que WebKit. Cette disposition permettrait d’utiliser Chrome avec Blink, ou encore Firefox avec Gecko. À l’heure actuelle, ces navigateurs n’ont pas d’autre choix que de s’appuyer sur WebKit, le moteur de rendu imposé par Apple sous couvert de sécurité. De fait, les navigateurs alternatifs disponibles sur iOS ne sont rien d’autre que Safari avec une moustache…
Dans ce domaine, la diversité et la concurrence ont du bon : avoir plusieurs moteurs de rendu qui se tirent la bourre favorise l’innovation et évite la dépendance à une seule technologie. Le DMA a obligé Apple à accepter des moteurs rivaux pour les navigateurs alternatifs, mais le contrôleur d’accès a mis de telles barrières que les grands noms comme Chrome, Edge ou Firefox ne risquent pas de se lancer.
Le site The Register rapporte en effet qu’Apple oblige les développeurs à concevoir leurs navigateurs web sur le sol européen. Il est toujours possible d’utiliser des simulateurs ailleurs dans le monde, mais la situation est quand même bien compliqué, surtout pour ce genre d’applications qui nécessitent des tests très poussés pour s’assurer que tout va bien.
Alex Moore, directeur d’Open Web Advocacy, relève toute l’absurdité de la chose : « Pour illustrer un scénario plausible, imaginez que vous êtes un éditeur de navigateur et que vous avez un problème de sécurité, mais que votre principal expert sur ce type de vulnérabilité se trouve aux États-Unis. Doit-il prendre l’avion pour l’UE afin de pouvoir tester et corriger sur un appareil réel ? » En l’état actuel des choses, c’est pourtant ce qui risque de se passer.
Les développeurs de navigateurs web européens (dont Opera et Vivaldi) ne sont logiquement pas confrontés au problème, mais ce critère pose de sérieux problèmes aux éditeurs américains. Cette ouverture aux moteurs de rendu alternatifs est de toute manière bancale : elle oblige en effet les développeurs à supporter deux versions de leurs navigateurs — une avec leur moteur de rendu pour le marché européen, l’autre avec WebKit pour le reste du monde.
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Par : Opera
Source :
The Register