Face aux dérives de certains parents, qui exposent excessivement leurs enfants sur les réseaux sociaux, le Sénat a adopté mercredi 10 mai en première lecture, avec des modifications, une proposition de loi visant à mieux protéger le droit à l’image de ces derniers.
Le gouvernement ayant engagé la procédure accélérée sur ce texte, députés et sénateurs vont maintenant tenter de s’accorder sur une version commune en commission mixte paritaire. « Face à une exposition accrue des enfants sur Internet, il y a des risques provenant du foyer familial, il est indispensable de repenser la notion de droit à l’image des enfants et de responsabiliser davantage leurs parents », a insisté le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti.
Au lendemain du vote par les sénateurs d’une régulation des pratiques des influenceurs, l’adoption de ce texte s’inscrit dans un ensemble d’initiatives dispersées pour protéger les mineurs dans l’univers numérique. La rapporteuse du texte au Sénat, Valérie Boyer (LR), a regretté que ce sujet ne soit pas « pris à bras-le-corps par le gouvernement » avec un plan global.
Portée par le député macroniste Bruno Studer (Renaissance), la proposition de loi se veut avant tout pédagogique. Elle introduit la notion de « vie privée » de l’enfant dans la définition de l’autorité parentale du code civil, pour rappeler aux parents le devoir de la respecter.
Accord des deux parents
A l’initiative de la rapporteuse, les sénateurs ont supprimé l’article précisant que le droit à l’image du mineur est exercé en commun par les deux parents en tenant compte de l’avis de l’enfant, estimant qu’il est « une répétition du droit existant ».
Contre l’avis du gouvernement, ils ont réécrit la disposition relative à un désaccord entre les parents. Le texte voté par les députés prévoyait que le juge pouvait interdire à l’un d’eux « de publier ou diffuser tout contenu sans l’autorisation de l’autre ». Les sénateurs ont préféré inscrire dans la loi que la diffusion publique de contenus relatifs à la vie privée d’un enfant nécessite l’accord des deux parents.
Dans des cas graves d’atteinte à la dignité, le texte initial ouvrait la voie « à une délégation forcée de l’autorité parentale », donnant la possibilité à un juge de confier l’exercice du droit à l’image de l’enfant à un tiers. Les sénateurs ont supprimé cette disposition, ce qu’a regretté le ministre de la justice.
Ils ont aussi ajouté une mesure permettant à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) de saisir la justice pour demander le blocage d’un site Internet en cas d’atteinte aux droits des mineurs. Selon une étude de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique, 53 % des parents français ont déjà partagé sur les réseaux sociaux du contenu sur leur enfant.