Le spécialiste de l’analyse des flux sur la blockchain Chainalysis pavoise. L’entreprise vient de saluer la décision judiciaire rendue dans la procédure contre Roman Sterlingov, accusé d’avoir géré Bitcoin fog. A la tête de ce mixeur, ce trentenaire russo-suédois a blanchi 1,2 million de bitcoin, soit alors environ 400 millions de dollars. Il s’agissait en majorité de flux liés à des ventes illégales de stupéfiants, de piratages informatiques et d’images pédopornographiques.
Au-delà de la décision sur la culpabilité du mis en cause, Chainalysis est d’abord intéressé par l’onction qu’elle vient de recevoir de la justice américaine pour son fameux logiciel Reactor. C’est l’une des Rolls de l’investigation crypto – la Cour des comptes notait récemment qu’une seule licence Chainalysis basique coûte environ 50 000 euros par an.
« Une date historique »
Pour l’entreprise dirigée par le danois Michael Gronager, le verdict judiciaire valide en effet l’utilisation de sa solution comme preuve. C’est “une date historique concernant la recevabilité des preuves via nos outils d’analyse blockchain”, a renchérit sur Linkedin Guillaume Lamboy, un ancien de la police nationale recruté par la firme.
Ce n’est évidemment pas la première fois que les outils de Chainalysis sont utilisés dans le cadre d’une affaire judiciaire – ils sont devenus incontournables dans les affaires de rançongiciel ou contre les marchés noirs. Mais comme l’expliquait Wired il y a deux ans, la défense de Roman Sterlingov avait choisi de plaider l’acquittement en pointant des techniques d’analyses de la blockchain erronées, pointant notamment son opacité.
Lors du procès, Roman Sterlingov avait expliqué avoir utilisé Bitcoin Fog pour protéger sa vie privée. Il se présentait donc comme un simple utilisateur du service, victime d’une mauvaise interprétation des flux crypto. Comme cité par Fortune, il a pu bénéficier du témoignage cinglant de Jonelle Still, la directrice des investigations et du renseignement de Cyphertrace, un concurrent de Chainalysis. Les résultats de Reactor « sont invérifiables et ne devraient pas être utilisés devant un tribunal », a-t-elle expliqué.
Un produit fiable
Une argumentation qui n’a toutefois pas convaincu le magistrat américain. Par ricochet, cette contestation juridique profite même finalement à Chainalysis. L’analyse générée par son logiciel Reactor “est le produit de principes et de méthodes fiables”, résume en effet le juge Randolph D. Moss. Ce dernier estime qu’il existe des preuves substantielles prouvant la haute fiabilité du logiciel, au contraire même conservateur, dans le regroupement d’adresses bitcoin, la méthode utilisée par Reactor pour suivre les flux.
“Bon nombre des résultats générés par Reactor ont été confirmés par l’analyse traditionnelle de la blockchain”, ajoute le magistrat dans une ordonnance d’une trentaine de pages. Même s’il y a pu avoir éventuellement “une poignée d’erreurs” dans le regroupement de centaines de milliers d’adresses permettant d’évaluer l’ampleur des activités illicites, celles-ci sont “probablement sans importance”, estime-t-il. Un argument de plus pour l’entreprise pour conquérir ou garder des marchés dans l’investigation crypto.