La pression était devenue intenable. Après des mois de contestation et un cours de Bourse en chute libre, Atos a officialisé, lundi 16 octobre au matin, la démission de son président, Bertrand Meunier, comme Le Monde l’avait révélé la veille au soir. Il occupait cette fonction depuis novembre 2019. M. Meunier est remplacé par Jean-Pierre Mustier, administrateur indépendant du groupe d’informatique depuis mai. Ce dernier est épaulé par un vice-président, Laurent Collet-Billon, arrivé lui aussi au printemps. Dans un communiqué, Atos dit avoir mené « un processus de sélection rigoureux » et examiné des « candidatures à la fois internes et externes » avant de faire ces choix. A l’annonce de ces changements à la tête de la société, l’action Atos s’envolait de 21 % à la Bourse de Paris.
La colère des actionnaires minoritaires contre M. Meunier couvait depuis plusieurs mois. En juin, lors de l’assemblée générale annuelle, la société de gestion Sycomore AM avait tenté de le débarquer, jugeant « désastreux » le bilan de ses trois années et demie à la présidence de la société. La résolution demandant sa révocation avait été rejetée à 67 %, mais cela signifiait qu’un tiers des actionnaires voulaient déjà son départ à l’époque.
La fronde a fini par exploser avec l’annonce, le 1er août, du projet de cession à Daniel Kretinsky des activités d’infogérance de la société, réunies dans la filiale Tech Foundations. Plusieurs actionnaires minoritaires jugeaient cette opération trop favorable à l’homme d’affaires tchèque. Depuis cette date, le cours de l’action Atos a chuté de 48 %, l’entreprise ne valant plus que 544 millions d’euros. Pour exprimer leur opposition, deux actionnaires, les fonds Alix AM et CIAM, ont porté plainte auprès du Parquet national financier.
Inquiétudes de politiques
L’Autorité des marchés financiers, alertée notamment par l’Udaac, une association d’actionnaires minoritaires, s’interrogeait aussi sur les modalités financières de l’opération négociée avec M. Kretinsky. Selon nos informations, le gendarme de la Bourse avait récemment adressé un courrier à la direction du groupe pour lui demander de clarifier certains points. C’est pourquoi des réponses détaillées ont été apportées par Atos lundi, dans un communiqué accompagnant l’annonce de la démission de M. Meunier.
Des politiques s’inquiétaient également de ce projet de cession et de l’entrée en parallèle de M. Kretinsky au capital d’Eviden, l’autre filiale d’Atos spécialisée dans la cybersécurité et les supercalculateurs, des ordinateurs de très haute capacité utilisés notamment dans la simulation d’essais nucléaires. L’homme d’affaires tchèque est prêt à acheter 7,5 % du capital d’Eviden, ce qui en ferait le premier actionnaire. Emmené par des sénateurs Les Républicains, ce groupe d’élus n’exclut pas de demander l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur ce projet de cession et d’entrée au capital.
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