Atteindre 20 % du marché mondial des semi-conducteurs d’ici 2030 ? L’objectif de l’UE est « déconnecté de la réalité »

Semi-conducteur


L’objectif de l’UE de couvrir un cinquième de la production mondiale de puces d’ici 2030 ne sera pas atteint, selon un rapport officiel présenté à la Commission européenne, lundi 28 avril.

L’Europe qui maîtriserait 20 % de la production mondiale de semi-conducteurs d’ici 2030, pour réduire sa dépendance à l’Asie du Sud-Est et aux États-Unis ? C’est raté. Un rapport sur la stratégie de la Commission européenne en matière de puces électroniques, publié lundi 28 avril, montre que cet objectif, que s’était fixée l’Union européenne (UE) en 2022, ne sera pas atteint. Pire, il est « déconnecté de la réalité », a souligné Annemie Turtelboom, qui présentait le rapport de la Cour des comptes européenne devant la presse.

Ce dernier « relève du vœu pieux : pour l’atteindre, il nous faudrait multiplier quasiment par quatre notre capacité de production dans les cinq prochaines années. Autant le dire, nous sommes à la traîne. L’Europe doit pouvoir rivaliser, mais pour ce faire, la Commission européenne doit d’abord revoir sa stratégie à long terme pour mieux coller à la réalité du marché », a-t-elle déclaré, citée dans le communiqué de la Cour des comptes européenne, le gendarme des finances de l’UE. En 2022, le Vieux continent veut éviter de nouvelles pénuries de semi-conducteurs qui ont jalonné la crise du Covid-19. Bruxelles définit un objectif ambitieux : rattraper son retard dans la fabrication de puces électroniques, des composants essentiels à nos smartphones, nos voitures et nos ordinateurs, en majorité dans les mains de fabricants d’Asie du Sud-Est et des États-Unis.

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Des sommes mobilisées par l’UE insuffisantes ?

Elle lançait il y a dix-huit mois son « Chips Act », un plan de subventions destiné à réduire sa dépendance vis-à-vis des fabricants asiatiques et américains.

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En parallèle, Bruxelles prévoyait qu’en 2030, l’Europe produirait un cinquième de la fabrication mondiale de puces électroniques. Mais les mesures décidées sont loin d’avoir porté leurs fruits. D’abord parce que les semi-conducteurs nécessitent des matières premières sur lesquelles l’Europe n’a pas la main. La Chine contrôle 95 % du gallium raffiné mondial.

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Autre écueil : les sommes mobilisées (près de 86 milliards d’euros) ne suffisent pas face aux montants démesurés dépensés par des géants comme Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), Samsung et Intel. Selon la Cour des comptes européenne, ces derniers avaient prévu d’investir entre 2020 et 2023 425 milliards de dollars. Résultat, l’Europe ne devrait atteindre que 11,7 % de la production mondiale en 2030, soit seulement 7 % de plus qu’en 2020.

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Des mégaprojets retardés ou annulés

Ce chiffre, qui est loin d’atteindre les 20 %, s’explique aussi parce que certains mégaprojets qui étaient prévus sur le Vieux continent ont été annulés ou retardés. Intel avait par exemple prévu d’investir 30 milliards d’euros dans une méga-usine à Magdebourg, en Allemagne. Mais le projet a été reporté en septembre dernier. « Il y a un nombre limité d’acteurs qui reçoivent beaucoup de fonds, ce qui signifie que si un projet tombe, cela a un impact énorme sur les objectifs de 20 % », a expliqué Annemie Turtelboom, ancienne ministre belge.

D’autre part, la Commission européenne ne contrôle que 5 % des fonds annoncés dans le Chips Act. « Nous participons à une course mondiale, mais depuis l’arrière du terrain, et il n’est pas certain que nous ayons les moyens de réussir dans cette course [ou les] compétences pour soutenir l’industrie, et le financement dont nous disposons est fragmenté et dispersé », a rappelé Annemie Turtelboom, pendant la présentation du rapport. Résultat, Bruxelles n’a en fait qu’un contrôle très limité de l’affectation des fonds. Elle manque aussi de vision d’ensemble, puisque les pays européens ne sont pas obligés de communiquer à la Commission leurs projets de constructions d’usine en la matière.

Il faut « revoir de toute urgence la stratégie pour le secteur »

Les auteurs du rapport préconisent de « revoir de toute urgence la stratégie pour le secteur », en mettant à jour le Chips Act, en réévaluant l’objectif initial des 20 %, et en incluant les tendances à venir de l’industrie. Ils recommandent à Bruxelles de se concentrer sur les puces électroniques destinées à l’intelligence artificielle ou sur les unités dotées de circuits gravés plus petits. Un premier réexamen du Chips Act est pour l’instant seulement prévu en septembre 2026. Ajoutez à ce bilan plus que morose « les tensions géopolitiques, (qui) compliquent encore la situation ». Donald Trump menace en effet tout le secteur de droits de douane salés, ce qui entraînerait un risque d’« effondrement des chaînes d’approvisionnement ».

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