« Les traits d’esprit de Silicon Valley, la tension dramatique du Morning Show et un peu de l’ambiance de Black Mirror. » Le feuilleton de la crise à OpenAI a tenu le monde en haleine, comme s’il avait mélangé les plus addictives des séries de Netflix ou AppleTV. C’est un expert en intelligence artificielle (IA), Gary Marcus, qui a ainsi décrit avec amusement l’affaire Sam Altman sur X. Le patron star de la start-up d’intelligence artificielle la plus en vue a été limogé, à la surprise générale, puis remplacé, avant d’annoncer son départ chez Microsoft, puis de faire un retour triomphal, après avoir été soutenu par 700 employés sur 770…
Au-delà du côté presque fictionnel de cette saga des affaires, le cas d’OpenAI et de Sam Altman est emblématique des débats philosophiques et politiques qui traversent le secteur de l’IA. L’entrepreneur veut incarner le retour d’un discours messianique dans le secteur, après des années où les dirigeants des géants comme Google, Meta (Facebook, Instagram) ou Apple ont dû policer leur attitude, en réponse aux critiques sur leur puissance et sur les effets de leur activité.
« Je déteste dire ça, parce que ça sonne arrogant, mais, avant OpenAI, quelle a été la dernière vraie grande percée scientifique qui soit sortie d’une entreprise de la Silicon Valley ? », demandait-il, faussement ingénu, dans un podcast, début juin, regrettant que les années récentes aient vu la création d’entreprises « très bien valorisées en Bourse » dans les services Web et mobile. « Le progrès technologique que nous ferons dans les cent prochaines années dépassera largement tout ce que nous avons fait depuis que nous avons maîtrisé le feu et inventé la roue », affirme-t-il dans un manifeste de 2021 titré « La Loi de Moore pour toute chose », en référence au principe de croissance exponentielle de la capacité de calcul des puces d’ordinateur. Le moteur de cette révolution – qui, selon M. Altman, permettra de « coloniser l’espace », de « faire marcher la fusion nucléaire », de « guérir toutes les maladies » ou de « construire de nouvelles réalités » – est bien sûr l’intelligence artificielle et l’avènement d’une supposée « superintelligence », qui dépasserait celle des humains.
La crise à OpenAI vient bousculer la trajectoire ascendante de Sam Altman. Confronté à certaines contradictions du projet, atypique, d’OpenAI, il a été écarté, car certains lui ont reproché d’avancer trop vite, avec une politique trop commerciale et imprudente, contraire à la mission d’origine de la structure. Le dirigeant a finalement gagné et été réintégré, grâce au soutien de Microsoft, mais, dans la nouvelle OpenAI, il se retrouve face à de nouveaux défis.
Il vous reste 90% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.