Le spectacle est infini. La boucle éternellement recommencée. Le décor ? Un pot de terre cuite et de la terre végétale. Côté lumière, des effets simples : sans doute une lampe de culture à LED (on découvrira bientôt qu’il y a du placement de produit dans cette affaire). Chaque jour, il suffit d’un peu d’eau et d’une image. Hors champ, sans jeu de mot, on peut supposer quelque engrais pour booster l’affaire. Le tournage a lieu uniquement en studio. Pensez donc ! Notre héros est un tubercule des contrées chaudes et la production se déroule en Finlande.
Avec plus de deux millions d’abonnés, Boxlapse s’est spécialisé dans le time-lapse horticole. Autrement dit, le filmage de plantes qui poussent et la diffusion du résultat sous forme de montage en accéléré. Chaque dimanche, proclame le bandeau de la chaîne YouTube, une nouvelle plante se dévoilera sous nos yeux, « à moins que je n’arrive pas à faire pousser quelque chose assez vite », s’excuse le jardinier-réalisateur.
Concernant notre tubercule, la mise en scène varie quelque peu puisqu’on doit en passer par une préquelle : la germination de la patate douce, lévitant grâce à des cure-dents dans un verre d’eau. Bientôt la première excroissance se fait jour. Retranchée de la patate-mère au cours d’une scène déchirante, elle séjourne à son tour dans un peu d’eau pour développer un début de système racinaire, et, ensuite, direction les feux de la rampe au beau milieu du pot de fleur. Bien que de caractère taciturne et renfrogné, la jeune pousse de patate douce nous livre une interprétation haute en couleur, quasi violacée, même. Elle déploie son jeu, certes attendu, mais tout de même impressionnant. Jusqu’à la conclusion, qui masque un véritable retournement de situation. Au bout de deux cent trente-sept jours, deux nouveaux tubercules sont présents au fond du pot. Ce qui promet une saison 2 potentiellement riche en rebondissements.
Que les internautes qui n’ont pas la main verte se rassurent, le studio finlandais Boxlapse ne réussit pas toujours ses effets. Certaines productions exotiques ont connu des flops retentissants. Notamment le poivron jaune, le tamarillo (un cousin de la tomate), le piment longhorn ou encore le litchi.
Main verte discrète
Mais peu importe, il semble que même fortement accéléré ou attaqué par une maladie fongique, le spectacle de la nature conserve des vertus apaisantes. C’est un concert de louanges qui se déverse sur la chaîne. Certains remercient qu’on leur enseigne ainsi des rudiments de jardinage. D’autres suggèrent des plantes à mettre en scène. Untel glorifie le Créateur, le grand, là-haut, pas celui de la chaîne YouTube, « auteur de toute vie », quand un autre salue « une véritable école de la patience », bien que l’art d’attendre soit précisément gommé dans le time-lapse.
Il vous reste 35% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.