Nous nous sommes tous émerveillés, ces derniers mois, devant les capacités étonnantes de l’intelligence artificielle (IA) générative à faire naître sous nos yeux des textes et des images entiers en appuyant sur un bouton. En science, les outils d’IA vont modifier fondamentalement la manière dont les connaissances sont acquises et partagées. Cela nous met au défi à plusieurs niveaux.
La Deutsche Forschungsgemeinschaft, le plus grand organisme de financement de la recherche en Allemagne, a présenté, fin septembre, les premières lignes directrices pour l’utilisation des modèles génératifs de l’IA. La réponse provisoire est la suivante : en principe, les scientifiques peuvent utiliser des outils d’IA, c’est-à-dire se faire aider, par exemple, pour l’évaluation des données et la rédaction de publications spécialisées ou de demandes de financement. Toutefois, la nature exacte de l’utilisation et les outils concrets doivent être indiqués, sans pour autant faire de ChatGPT un coauteur. Ce sont des lignes directrices raisonnables, car elles créent de la transparence. Le contraire, une interdiction générale, n’aurait pas de sens, et son respect ne serait pas vérifiable.
Plus globalement, les outils d’IA augmenteront la productivité de la science. Le nombre de publications spécialisées ne cesse de progresser, ce qui réjouit les grandes maisons d’édition, qui fondent leur modèle économique – parfois fortement critiqué par les scientifiques – sur cette croissance. D’un autre côté, il y a depuis longtemps un manque d’évaluateurs pour les articles scientifiques. C’est pourquoi, dans les grandes maisons d’édition, on se demande si la procédure d’évaluation par les pairs ne pourrait pas être accélérée par l’IA.
Des bouleversements plus importants encore se profilent peut-être dans la communication scientifique externe. Tout d’abord, une multitude de nouvelles chaînes d’exploitation verra le jour : les applications fondées sur les grands modèles de langage (LLM) permettent de résumer les publications spécialisées en des messages compréhensibles par tous. Celles-ci peuvent aussi être traduites dans toutes les langues, puis adaptées à des publics cibles. D’autres outils permettront de convertir les textes obtenus en audio. Il sera possible aussi de créer des images animées d’accompagnement, ou même des vidéos. Il y a là un énorme potentiel, notamment pour une plus grande équité en matière d’éducation. Cela n’intéresse pas seulement des scientifiques qui souhaitent diffuser leur propre recherche par le plus grand nombre de canaux possible : les services de communication des instituts de recherche, des fondations et des médias spécialisés seront également de la partie.
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