Une chose est a priori certaine : Bruno Le Maire ne rejoindra pas le prochain gouvernement du nouveau premier ministre François Bayrou. L’ex-ministre des Finances, pointé du doigt pour sa responsabilité dans le déficit budgétaire français, poursuit sa carrière professionnelle dans le secteur privé.
Enseignant depuis quelques mois à l’École polytechnique fédérale de Lausanne, Bruno Le Maire prendra dès le 1er janvier 2025 des fonctions supplémentaires en tant que consultant pour l’industrie des semiconducteurs.
Grimper à 20% de PDM des semiconducteurs
Le géant européen ASML, dirigé par Christophe Fouquet, a officialisé le recrutement de l’ex-politique de carrière en tant que conseiller du conseil d’administration. Fabricant de produits de lithographie pour les producteurs de composants, ASML emploie 42.000 salariés et réalise un chiffre d’affaires de près de 28 milliards de dollars.
L’entreprise technologique est surtout positionnée sur un marché devenu stratégique au niveau mondial et que les grandes puissances s’efforcent d’attirer sur leur territoire à coup de milliards de dollars de subventions.
L’Europe ne manque pas à l’appel. Le 25 juillet 2023, elle adoptait le règlement sur les semi-conducteurs dont les nouvelles règles visent à doubler la part de marché mondiale de l’Europe. L’ambition : passer de 10% à au moins 20% d’ici à 2030.
Feu vert de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique
ASML, installé aux Pays-Bas, entend bien jouer un rôle central dans ce programme. En recrutant Bruno Le Maire en tant que consultant, l’industriel s’offre les services d’un influenceur et l’accès à son carnet d’adresses.
L’ancien ministre français a obtenu au préalable l’aval de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Cette dernière a toutefois mis une condition : l’interdiction de démarcher ses anciens camarades du gouvernement et membres de son cabinet.
De telles restrictions n’ont pas empêché Cédric O de jouer un rôle influent en France dans la politique sur l’IA et de négocier la participation de dirigeants de Mistral AI au comité chargé de conseiller le gouvernement d’Élisabeth Borne. Tradition française.
Un marché au cœur d’une bataille mondiale
Abstraction faite des fonctions de VRP influents confiées à d’anciens politiques, les semiconducteurs se sont imposés ces deux dernières années comme le terrain d’une nouvelle bataille économique – et géopolitique.
Les États-Unis consacrent des moyens considérables pour relocaliser la production de ces composants essentiels sur leur territoire. TSMC et Intel, par exemple, ont déjà perçu des milliards d’aides pour y implanter des usines. Et la France ? Moins offensive que l’Allemagne, elle demeure très dépendante de producteurs étrangers.
En 2022 et 2023, la France a cependant investi 4,7 milliards d’euros par le biais d’un plan de soutien à la filière des composants électroniques. Ces composants sont critiques pour l’automobile et l’industrie françaises, qui représentent 71% des achats hexagonaux de semi-conducteurs.