« Cela fait quelques années que je n’avais pas vu une technologie encore naissante qui donne envie d’appeler ses amis pour leur dire : “Il faut que tu voies ça.” » Le respecté journaliste américain de technologie Casey Newton n’a pas caché son admiration, voire sa stupéfaction, dans sa newsletter du 10 juin, consacrée à Dall-E.
Ce projet de recherche fascine, car il est capable de créer une image à partir d’une simple description textuelle. C’est « l’artiste d’intelligence artificielle [IA] qui pourrait changer le monde », a titré Alex Kantrowitz, un autre auteur de newsletter « tech » qui, comme Casey Newton ou un journaliste du New York Times, a pu tester ce logiciel, dont la deuxième version a été lancée en avril (la première, datant de janvier 2021, était moins évoluée).
Le secteur numérique se passionne pour cette innovation créée par OpenAI, une petite société de San Francisco à la pointe dans le domaine de l’IA et soutenue notamment par Microsoft. Le buzz est d’autant plus grand que Google a, le 25 mai, annoncé un logiciel similaire, Imagen. De surcroît, Dall-E Mini, une version simplifiée et accessible à tous, lancée par un chercheur indépendant sans lien avec Dall-E, propose aux internautes de créer des images délirantes. Vertigineuses, ces avancées en intelligence artificielle soulèvent toutefois beaucoup de questions.
Ces images impressionnent par leur qualité. Les œuvres de Dall E – baptisé en hommage au peintre Dali et au robot du film de science-fiction Wall E – ou Imagen sont souvent surréalistes et parfois humoristiques. Elles reflètent les requêtes écrites inventées par les « beta testeurs » comme MM. Newton et Kantrovitz ou par Google : « un lapin gardien de prison », « un chien shiba en habit de pompiers », « un aigle chauve fait de cacao en poudre et de mangue »… Après dix à vingt secondes de calcul, Dall E ou Imagen font bien apparaître un lapin blanc dans un bel uniforme sombre, un canidé japonais dans un costume de soldat du feu, etc. Ils peuvent aussi proposer des images plus réalistes, comme « une façade de magasin de fleurs vert pastel et blanc, avec une porte ouverte et une grande fenêtre ».
« Propagande soviétique »
Dall E ou Imagen savent aussi imiter des « styles » : « peinture à la Rembrandt », photo, art numérique, voire « afrofuturisme » ou « plan de montage de meuble Ikea ». Plus rudimentaires, des clichés de « Dall E Mini » singent, eux, des « croquis d’audience judiciaire » ou de la « propagande soviétique », etc. Dall E peut aussi retoucher une portion d’image et par exemple remplacer la coiffure de la Joconde par une coupe punk…
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