Plusieurs syndicats ont appelé, mardi 15 octobre, les salariés d’Ubisoft à une grève de trois jours, la deuxième cette année, alors que le géant français du jeu vidéo traverse une passe difficile avec des ventes en berne et le report d’un jeu majeur, sur fond de rumeurs de rachat de l’entreprise.
Plusieurs piquets de grève sont prévus devant les différents studios de l’éditeur de jeux, notamment à Paris, Lyon, Montpellier et Annecy, après l’annonce par le groupe mi-septembre d’imposer au moins trois jours de présence au bureau par semaine. « Ça a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP), Clément Montigny, délégué du Syndicat des travailleurs du jeu vidéo (STJV) au studio montpelliérain.
Dans un courriel envoyé à ses salariés, la direction a justifié cette décision en affirmant que « la créativité est stimulée par les interactions interpersonnelles, les conversations informelles et la collaboration autour d’une même table ». « Des gens ont été embauchés sur la promesse de trois jours de télétravail, fait valoir Clément Montigny, et ça remet en cause toute l’organisation de leur vie. Potentiellement, ces gens-là doivent envisager de quitter l’entreprise, ce qui est inacceptable. »
Effort salarial
Les syndicats demandent également à la direction « un vrai effort salarial », rappelant qu’une première grève d’ampleur avait mobilisé plus de 700 salariés en février sur les 4 000 que compte l’entreprise en France. « On n’a pas eu de réponse de la direction », déplore Pierre-Etienne Marx, délégué STVJ chez Ubisoft Paris. « On va augmenter [la pression] jusqu’à ce qu’il y ait de vraies concessions », avertit-il, espérant atteindre cette fois le millier de grévistes.
De son côté, Ubisoft dit examiner « comment affiner [son modèle] pour mieux équilibrer les avantages du travail à distance et au bureau », après une première rencontre avec les syndicats mardi dernier.
Cette grève tombe mal pour le fleuron français des jeux vidéo, qui enchaîne les déconvenues depuis plusieurs mois. « Ubisoft souffre d’un enchaînement de sorties [de jeux] qui n’atteignent pas le succès escompté », estime Oscar Lemaire, du site spécialisé Ludostrie, citant notamment Skull and Bones et le nouvel épisode de Prince of Persia.
Fin septembre, son PDG, Yves Guillemot, a aussi admis que les premières ventes de Star Wars Outlaws, sorti fin août, étaient « plus faibles que prévu », forçant Ubisoft à revoir à la baisse ses objectifs financiers et à repousser de trois mois la sortie du prochain volet de sa série phare, Assassin’s Creed, pour laisser le temps à ses équipes de le peaufiner.
Une mauvaise passe sanctionnée sur les marchés financiers : l’action Ubisoft s’est effondrée de plus de 40 % depuis le début de l’année, atteignant en septembre son plus bas niveau en dix ans. Début octobre, l’agence Bloomberg faisait également état d’un potentiel rachat d’actions par le géant chinois de la tech Tencent, qui possède déjà près de 10 % de l’entreprise, et la famille Guillemot, actionnaire principal du groupe, pour sortir le groupe de la Bourse.