Si vous cherchez une alternative à la vie classique en entreprise, le travail indépendant, parfois appelé « solopreneuring » (entreprenariat solo), peut être la solution pour vous. Pour le dire brutalement, vous pouvez mettre à profit uniquement pour vous vos compétences en matière de développement de logiciels, de conception ou de gestion d’entreprise.
Toutefois, la création d’une entreprise nécessite un investissement financier, des idées de produits, des études de marché, un sens aigu du marketing, des compétences commerciales, des solutions technologiques et, probablement, une équipe de personnes qualifiées pour vous aider à réaliser votre projet. Bref, il faut de l’argent et des ressources.
Jusqu’à présent en tout cas. Tim Cortinovis, dans son récent livre, Single-Handed Unicorn : How to Solo Build a Billion-Dollar Company, affirme qu’il est possible de créer une énorme entreprise avec seulement des outils d’IA et quelques freelance. Les outils en ligne et les outils d’intelligence artificielle disponibles aujourd’hui permettent de créer et de développer rapidement une entreprise par soi-même, dit-il, ou du moins avec une équipe très réduite. Le seul ingrédient manquant est l’esprit d’innovation de l’entrepreneur et sa capacité à identifier et à servir un marché.
Ce qu’il faut pour développer une entreprise unipersonnelle, c’est un état d’esprit, des outils et un business model approprié, a expliqué M. Cortinovis dans un récent podcast. Avec l’émergence des agents d’intelligence artificielle, « vous pouvez tout gérer », dit-il, rejoignant les propos du PDG d’Anthropic tenus la semaine dernière. Voici son explication du processus :
« Vous avez un agent gestionnaire, qui est le cerveau des autres. Vous avez des sous-agents en aval. Et vous pouvez leur donner accès aux informations sur les clients, à leurs adresses, etc. Vous pouvez également leur donner accès aux factures et à un autre sous-agent. L’accès se fait par l’intermédiaire de votre client de messagerie, comme Gmail ou Outlook, ou d’une base de données. En vous connectant à WhatsApp, vous pouvez traiter automatiquement les demandes et les messages des clients. L’agent de gestion supervise tous les processus et est responsable de la réussite de cette personne. »
Un rêve dépendant de beaucoup de facteurs
Une méga-entreprise unipersonnelle est-elle réaliste ? Les pionniers du secteur qui ont développé leur propre entreprise ont des réactions mitigées à l’égard de cette notion.
Tout d’abord, cela peut dépend de la nature du secteur d’activité. Il est difficile d’imaginer, par exemple, une installation de raffinage de gaz naturel ou une banque gérée par une seule personne.
« La vraie question n’est pas de savoir si une seule personne peut faire croître son entreprise. Mais plutôt de savoir quels sont les secteurs qui le permettent », dit Cassie Kozyrkov, PDG de Kozyr et première scientifique décisionnelle en chef de Google. « Dans les secteurs à faible risque comme le commerce, le contenu ou la productivité, il est tout à fait possible pour des fondateurs solo de créer des entreprises de grande envergure. L’infrastructure et les outils sont en place. »
Dans les secteurs à haut risque tels que la santé, la finance ou le droit, « les principales limites ne sont pas techniques, elles sont opérationnelles. La sécurité, la conformité, la réglementation et l’auditabilité sont toutes essentielles pour déployer des solutions de manière responsable », a expliqué Mme. Kozyrkov.
Atteindre un grande échelle « ne dépend plus des effectifs, mais de l’effet de levier »
« Il existe déjà des entreprises de solopreneurs de taille impressionnante à la pointe de la technologie », dit Nic Adams, cofondateur et PDG d’Orcus. « Un solopreneur ou une micro-équipe peut construire et mettre à l’échelle une opération d’un milliard de dollars en s’armant de l’automatisation, de pipelines de données, d’agents d’auto-amélioration, pour n’en citer que quelques-uns. La clé est de combiner l’IA contradictoire en temps réel avec une infrastructure modulaire et cloud qui évolue horizontalement sans goulots d’étranglement humains. »
Atteindre un grande échelle « ne dépend plus des effectifs, mais de l’effet de levier », convient Arvind Rongala, PDG d’Edstellar. « Le solopreneur d’aujourd’hui n’a pas besoin de tout faire. Il doit simplement concevoir un système dans lequel la technologie, les talents et l’automatisation font le gros du travail. »
Il y a toutefois des limites à la construction d’une méga-entreprise par un solopreneur.
La prime à l’expertise tout de même
« Je ne pense pas que ce que propose Cortinovis soit réalisable », dit Komninos Chatzipapas, fondateur de HeraHaven AI. « Surtout dans le contexte d’une personne non qualifiée qui utilise l’IA pour développer une entreprise. Je pense que cette prédiction est une conséquence de l’effet Dunning-Kruger, dont beaucoup de gens font l’expérience avec l’IA. Il s’agit d’une compréhension limitée de l’IA qui les conduit à surestimer considérablement les capacités actuelles de l’IA. »
« Midjourney a aujourd’hui une valorisation d’un milliard de dollars avec 11 employés. Mais Midjourney développe un produit d’IA plutôt que d’utiliser l’IA pour développer un produit » dit M. Chatzipapas. « L’IA dispose d’un éventail de connaissances impressionnant, mais d’une profondeur limitée. Elle peut être un meilleur programmeur que la plupart des gens. Mais un bien pire programmeur que le développeur de logiciels moyen… »
Et cela, c’est l’inverse de ce qui est nécessaire pour construire une entreprise prospère, fait-il remarquer. « Les entreprises prospèrent grâce à une expertise approfondie du domaine, à une exécution sans faille et au fait d’être le meilleur dans un domaine spécifique. C’est le cas de la génération d’images pour Midjourney ou de la recherche pour Google. Et l’IA n’est pas encore capable de faire cela ».
Ne pas négliger « l’intuition humaine »
Selon M. Chatzipapas, la preuve de l’incapacité de l’IA à s’adapter à de nombreux domaines « est le nombre de personnes encore impliquées dans la rédaction de contenu, ce qui aurait dû être la raison d’être de l’IA. En tant qu’entreprise spécialisée dans l’IA, nous employons encore plusieurs rédacteurs pour générer du contenu pour notre site parce que l’IA ne peut toujours pas être aussi performante. »
L’IA peut générer, automatiser et prédire – « mais elle a encore du mal avec le jugement abstrait, la narration stratégique et la confiance des entreprises », a déclaré Rongala. « Ces domaines restent du ressort de l’intuition humaine. »
M. Adams ajoute que « quelques lacunes subsistent dans l’orchestration de l’IA et la prise de décision autonome sécurisée à grande échelle ». Les véritables agents autonomes qui gèrent de bout en bout des flux de travail complexes et multi-domaines sans intervention humaine n’en sont qu’à leurs balbutiements. En outre, il est nécessaire de disposer d’une détection des menaces IA à très faible latence pour défendre la plateforme, ce qui constitue en soi une course à l’armement de type « black hat ». »
Un environnement d’exploitation IA complet
Quels sont les meilleurs outils et technologies pour faire évoluer et soutenir une grande entreprise composée d’une seule personne ou d’une petite équipe ?
Adams recommande « des plateformes de calcul en cloud pour une mise à l’échelle élastique, l’orchestration de conteneurs tels que Kubernetes pour la modularité, des LLM réglés pour des tâches spécifiques à un domaine, des framework d’orchestration de l’IA tels que LangChain ou des pipelines personnalisés et des outils d’observabilité pour surveiller les comportements émergents ». En substance, un environnement d’exploitation d’IA complet avec des capacités d’auto-réparation et d’auto-optimisation. »
Les meilleurs outils sont ceux qui éliminent les goulets d’étranglement, a déclaré M. Rongala : « copilotes d’IA, CRM intelligents, plateformes de paiement mondiales et API modulaires ». Pourtant, a-t-il ajouté, « ce qui conduit vraiment au succès, c’est la clarté, savoir ce qu’il ne faut pas faire, et laisser le système faire le reste. »
Source : « ZDNet.com »