FRANCE 3 AUVERGNE-RHÔNE-ALPES – JEUDI 5 DÉCEMBRE À 22 H 50 – DOCUMENTAIRE
Compliqué pour un quadragénaire, qui a connu ses premiers émois en feuilletant les pages lingerie du catalogue de La Redoute – « le best-seller de la littérature érotique des années 1990 », dixit –, de parler sexualité à ses enfants. Effrayant même, lorsque l’on comprend que ses deux filles, de 13 et 11 ans, et son fils de 9 ans ont potentiellement accès aux films pornographiques, sur Internet.
En 2022, quelque 2,3 millions de mineurs ont ainsi consulté des sites pornographiques. Le réalisateur Samuel Ruffier (le papa inquiet) a donc décidé d’enquêter. Il en rapporte un film sincère, qui, en suivant le propre cheminement de son auteur, livre de multiples clés de compréhension, notamment aux parents. Sans juger mais en rapportant la parole des personnes concernées, à commencer par celle des adolescents.
Les séquences tournées lors des débats sur la sexualité, animés par Mélanie Ogier à la MJC de Dieulefit (Drôme), apportent un contrepoids aux craintes du père. L’éducatrice, de façon très naturelle et un peu ludique, demande aux adolescents avec lesquels elle échange à quel âge ils ont vu leur premier porno, et pourquoi ils l’ont fait. « Parce que c’est drôle », assure un garçon ; plusieurs évoquent la curiosité, une fille dit avoir été écœurée. Samuel Ruffier admettra, plus tard, avoir lui-même vu son premier porno, « très jeune, à 8 ou 9 ans ».
Du doudou au sextoy
Son scénario suit un déroulé classique, débutant par une ébauche historique (premières gravures érotiques) puis thématique : le sexe dans l’art, le sexe dans la science… La mise en scène semble très inspirée par le passage rapide du doudou au sextoy. Avant deux reportages originaux. L’un, bref, en compagnie de Brigitte Lahaie, ex-actrice porno devenue animatrice radio sur RMC ; l’autre, plus étoffé, à Barcelone, pour assister au tournage d’un « porno alternatif et éthique », d’Erika Lust, une réalisatrice appréciée tant des « performeurs » que des actrices, pour son respect du consentement.
Le consentement fait évidemment partie des sujets débattus autour de Mélanie Ogier : « On n’est pas obligé de s’aimer pour avoir une relation sexuelle, mais on doit être consentant », souligne-t-elle. Tous les jeunes participants approuvent, et tous affirment distinguer parfaitement fiction et réalité. Ils font preuve d’une étonnante maturité pour évoquer l’âge minimal auquel on peut, selon eux, visionner son premier porno. Ils sont également unanimes sur la nécessité d’en parler avec ses parents, quitte à ce que ce soit « bien gênant ». Avec courage, Samuel Ruffier va s’y coller, filmer et ouvrir la voie. Maintenant, chers parents, il n’y a plus qu’à.
« Du porno dans la tête », de Samuel Ruffier (Fr., 2024, 52 min). Sur France.tv