« C’est la première vidéo politique française entièrement réalisée avec l’IA. » Dans un message publié le 24 juin sur le réseau social X, Eric Zemmour vante cette initiative incitant à voter pour son parti, Reconquête !, au premier tour des élections législatives anticipées. La vidéo en question (un enchaînement d’images légèrement animées) montre le président de la République, Emmanuel Macron, sous une pluie de billets et une foule de migrants se dirigeant vers une église rurale, avant de présenter ce à quoi pourrait ressembler la France en cas de victoire de Reconquête ! : une famille pique-niquant dans un pré et de beaux paysages.
Ce n’est pas la première fois que les partis d’extrême droite, à l’instar du Rassemblement national (RN), produisent et diffusent des contenus générés par intelligence artificielle (IA) pour promouvoir leurs idées.
Le RN a notamment utilisé l’IA dans sa campagne « L’Europe sans eux », qui s’attaque à Emmanuel Macron et à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en produisant des visuels mettant en scène des immigrés débarquant sur une plage ou un homme menaçant présenté comme un islamiste.
Une spécificité propre aux mouvements d’extrême droite, selon les chercheurs de l’ONG AI Forensics, qui ont examiné les contenus publiés en ligne par trente-huit partis et coalitions en France, entre le 1er mai et le 28 juin, sur leurs sites Internet et les réseaux sociaux. Dans leur rapport, dévoilé jeudi 4 juillet et que Le Monde a pu consulter avant publication, ils disent avoir détecté 51 messages contenant des images générées par IA – « un usage encore limité ». La quasi-totalité proviennent de l’extrême droite, à l’exception d’un cas issu de l’Union des démocrates et indépendants (UDI) et d’un autre de l’Alliance rurale.
Ce constat ne se limite pas à la France. En Allemagne, par exemple, des représentants de l’AfD (droite populiste radicale) ont diffusé des images de groupes de migrants aux visages déformés par la haine ; en Italie, le vice-président du conseil, Matteo Salvini, a publié, entre autres, un visuel de femme barbue enceinte.
Les cadres des partis d’extrême droite ne sont pas les seuls à utiliser ces technologies : leurs sympathisants aussi. En France, la chanson raciste Je partira pas, interprétée par une voix synthétique, a ainsi connu un certain succès en ligne avant d’être supprimée par la plupart des plates-formes – Eric Zemmour s’en était fait l’écho sur ses propres réseaux. Sur TikTok, de faux profils mettant en scène des membres fictifs de la famille Le Pen sous forme de deepfakes et faisant la promotion du RN et de Reconquête ! s’étaient fait remarquer en avril. Plus généralement, de nombreuses images générées par IA circulent sur les réseaux sociaux.
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