Il y a quelques années le monde du numérique bruissait d’un terme anglo-saxon qui faisait saliver fournisseurs, société de services informatique et responsables de collectivités territoriales. Ce terme, c’était celui de smart city. La promesse de ces villes intelligentes étaient multiples, allant d’une meilleure sécurité urbaine à une meilleure efficacité de la dépense publique.
Séduite, la ville de Toronto a confié en 2019 les clés du camion à Google. De quoi refroidir le secteur un an plus tard. Pourquoi ? Parce que Google avait fait main basse sur les données de la ville. Depuis, les promoteurs de la smart city se font plus discrets.
Sauf Jacques Priol. Cet expert de la donnée publique conseille les collectivités territoriales sur leurs projets de territoires connectés. Des projets que l’on croise en France dans des villes comme Dijon ou Angers.
Nous l’avons rencontré.
ZDNET : La smart city que l’on a connu il y a 10 ans avec l’exemple de Toronto est-elle morte ? Est ce que l’on est passé à autre chose ?
Jacques Priol : Ce qui est passé de mode, c’est surtout le mot de smart city. Ce que l’on constate aujourd’hui c’est que l’on en parle moins mais que l’on en fait beaucoup plus. De l’éclaire connecté et intelligent, de la gestion des déchets et des espaces verts, ce sont des projets qui se diffusent de plus en plus. Ils sont de toutes tailles, et ça aussi c’est nouveau. Les outils de la smart city eux ne sont pas passés de mode.
ZDNET : L’enseignement d’il y a 10 ans c’est que l’on ne peut pas confier la gouvernance des données aux fournisseurs. Pourquoi est-il important que les collectivités locales aient les mains sur les données qui sont produites et utilisées dans les smart city ?
Jacques Priol : La gouvernance de la donnée c’est un point clé pour deux raisons.
La première c’est vis à vis des citoyens. Les habitants des villes doivent avoir l’assurance que la manière dont on gère les données qui servent à faire vivre le service public sont maîtrisées, protégées. Le service public doit en être le garant.
La seconde raison c’est pour la maîtrise directe des politiques publiques elles-même. On parle de gouvernance mais on parle aussi d’orchestration. Les pouvoirs publics doivent être en mesure de savoir comment les données sont produites, comment elles circulent, comment elles sont utilisées au service de l’intérêt général.
ZDNET : L’IA arrive dans la société et donc dans les villes et les collectivités territoriales. Quels sont les premiers usages que vous constatez de l’utilisation de l’IA dans les villes connectées par les pouvoirs publics ? Et ce qu’il s’agit d’IA tout court, ou aussi d’IA générative ?
Jacques Priol : Il y a effectivement plusieurs formes d’intelligences artificielle. Aujourd’hui il y a un engouement certain pour les outils avec de l’IA générative dans tous les métiers et tous les domaines de l’action publique. On en reviendra sans doute un petit peu dans les prochaines années.
Mais je vois émerger des usages très importants pour la gestion des politiques publiques très complexes, qui mobilisent de très nombreuses données. Notamment, et ça peut paraître paradoxal par rapport au débat sur la consommation énergétique des intelligences artificielles, sur les sujets de transition, sur les sujets de mobilité, sur des questions environnementales majeures comme la qualité de l’air et la gestion de l’eau, à la gestion de l’énergie.
Ce sont des sujets qui produisent énormément de données dans leur exploitation courante et qui aujourd’hui font que nous sommes confrontés à des difficultés importantes en matière de décision publique. L’IA sera sans doute un outil important dans les prochaines années.
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