Quinze journalistes et employés du média d’investigation en ligne El Faro, qui couvre principalement le Salvador, ont porté plainte mercredi 30 novembre aux Etats-Unis contre NSO Group, l’éditeur du logiciel espion Pegasus.
En janvier, une analyse du Citizen Lab de l’université de Toronto, spécialisé dans les logiciels espions, avait confirmé que les téléphones de 35 journalistes salvadoriens, dont 22 travaillant pour El Faro, avaient été infectés par Pegasus. Ce puissant logiciel espion, qui permet d’avoir accès à l’intégralité du contenu d’un téléphone, est édité par la société israélienne NSO Group, qui le vend exclusivement à des Etats.
La liste des clients de NSO Group n’est pas publique, mais les analyses du Citizen Lab, couplées à des séries de notifications envoyées par Apple aux utilisateurs d’iPhone ayant très probablement été ciblés par Pegasus, laisse supposer que le gouvernement de Nayib Bukele a acquis une licence pour ce logiciel espion. Sous la présidence de M. Bukele, le Salvador a connu une série d’attaques contre l’Etat de droit.
Plainte aux Etats-Unis
La plainte des employés d’El Faro a été déposée aux Etats-Unis, auprès d’un tribunal californien, par le biais de la Knight Foundation, une organisation de défense des droits humains. Les plaignants estiment que NSO Group a violé la loi américaine, puisque son logiciel a été utilisé pour accéder illégalement à des données stockées sur les serveurs d’Apple en Californie ; l’un des collaborateurs d’El Faro dont le téléphone a été infecté est, par ailleurs, un ressortissant américain.
« Nous demandons au tribunal de conclure que les attaques contre El Faro et ses journalistes sont contraires à la loi américaine, […] d’interdire tout nouveau déploiement de Pegasus contre les plaignants, et d’ordonner à NSO Group d’identifier le client qui a ordonné cette surveillance », détaille la Knight Foundation dans un communiqué.
NSO Group affirme ne pas pouvoir identifier les numéros que ses clients choisissent de cibler, mais la société assure enquêter sur toute accusation de violation des droits humains. En juillet 2021, Le Monde et plusieurs rédactions internationales, coordonnées par Forbidden Stories, avaient révélé les multiples dérives de Pegasus, utilisé dans le monde entier par plusieurs pays pour espionner des avocats, des militants politiques ou des droits humains ainsi que des chefs d’Etat. Depuis, l’entreprise israélienne est la cible de multiples enquêtes parlementaires et judiciaires et a été ajoutée sur la « liste noire » du département du commerce américain.