Bruxelles a ouvert lundi une « enquête formelle » visant le réseau social X (ex-Twitter), accusé de manquements présumés aux règles européennes en matière de modération des contenus et de transparence. C’est une première dans le cadre de la nouvelle législation européenne sur les services numériques (DSA).
« En se dotant d’un nouveau cadre réglementaire, l’Europe est enfin en mesure d’agir pour protéger les valeurs démocratiques de notre continent. Cette enquête est une première, et constitue un véritable crash test de crédibilité pour le niveau dispositif » juge Constantin Pavléas, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies. « Figurant sur la liste établie en avril dernier, X est considéré comme une « très grande plateforme » au sens du DSA (seuil de 45 millions d’utilisateurs actifs sur l’espace européen). A ce titre, X est astreint à des obligations de transparence accrues et des obligations complémentaires de gestion des risques systémiques ».
X est dans le détail accusé de ne pas avoir suffisamment de modérateurs, d’avoir un signalement des contenus illicites peu efficace, ou encore de ne pas communiquer assez efficacement avec le régulateur.
« Protéger nos citoyens et nos démocraties »
« L’époque où les grandes plateformes en ligne se comportaient comme si elles étaient trop grandes pour se préoccuper des règles est révolue », a déclaré le commissaire européen au Numérique, Thierry Breton, soulignant que la nouvelle législation permettait désormais de « protéger nos citoyens et nos démocraties ».
X a affirmé lundi qu’il restait « engagé à respecter la réglementation » et a promis de coopérer. « Il est important que ce processus reste exempt de toute influence politique », a-t-il toutefois souligné dans un message posté sur la plateforme.
« Êtes-vous en train de prendre des mesures contre d’autres médias sociaux ? Parce que si vous avez ces problèmes avec cette plateforme, et aucune n’est parfaite, les autres sont bien pires », a répliqué Elon Musk sur son réseau social.
« L’enquête de l’UE sur X aboutira très probablement à une amende »
« Si l’UE imposait une sanction importante, elle montrerait sa volonté de s’attaquer aux entreprises monopolistiques de la Big Tech » assure Hugo Shapero, analyste chez GlobalData. « L’enquête de l’UE sur X aboutira très probablement à une amende. Les plateformes Internet susceptibles d’avoir un impact sur la sécurité des enfants, comme TikTok de ByteDance, et les plateformes qui ne disposent pas de protocoles solides contre la désinformation, comme X, seront confrontées à une pression juridique accrue, à des amendes, voire à une interdiction à l’échelle européenne en dernier recours ».
La Commission européenne avait déjà annoncé le 12 octobre l’ouverture d’une procédure préliminaire au sujet de « fausses informations », « contenus violents et à caractère terroriste » et « discours de haine », visant le réseau social d’Elon Musk. Cette première étape consistait en une demande d’informations pour vérifier le respect des obligations par la plateforme.
Les réponses apportées par l’entreprise américaine, ainsi que son « rapport de transparence » publié début novembre pour faire le point sur ses moyens de modération, n’ont semble t-il pas convaincu l’exécutif européen.
« Depuis la prise de contrôle par Musk, X a fait peu d’efforts pour se conformer à la réglementation de l’UE »
Le DSA prévoit des amendes pouvant atteindre 6% du chiffre d’affaires mondial du groupe mis en cause. En cas de violations graves et répétées, une plateforme peut même être interdite d’opérer dans l’UE.
« Depuis la prise de contrôle par Musk, X a fait peu d’efforts pour se conformer à la réglementation de l’UE, et il est peu probable que cela change de sitôt » juge cependant Hugo Shapero.