Par peur d’une guerre nucléaire, Elon Musk s’est retrouvé au cœur d’une crise diplomatique entre les États-Unis, la Russie et l’Ukraine, révèle son biographe.
La Russie a coupé les systèmes de communication de l’Ukraine juste avant l’invasion de l’armée russe en février 2022. Le pays assiégé, incapable de coordonner la riposte, a alors obtenu d’Elon Musk des milliers de terminaux de réception Starlink, le service d’internet par satellite de SpaceX, dont le milliardaire est propriétaire. Cet accès est rapidement devenu crucial pour les opérations militaires ukrainiennes.
Le pouvoir exorbitant d’Elon Musk
Mais lorsque l’Ukraine a voulu lancer une offensive en Crimée l’an dernier, Elon Musk a secrètement demandé aux ingénieurs de Starlink de couper le réseau satellite près des côtes de ce territoire annexé par la Russie en 2014 — l’Ukraine exige depuis le retour de la péninsule dans les frontières du pays.
Couper Starlink a été une catastrophe pour l’armée ukrainienne qui n’a pas pu conduire normalement les opérations prévues, à savoir des drones sous-marins équipés d’explosifs visant la flotte russe, explique Walter Isaacson, auteur de la future biographie autorisée sur Elon Musk. Le patron de SpaceX craignait que la Russie réponde à cette attaque par le feu nucléaire… Des craintes alimentées par des discussions avec des dirigeants russes.
Voilà qui ne va pas arranger l’accusation de tropisme pro-russe qui colle à la peau d’Elon Musk. Mais ce dernier réplique dans la biographie : « Comment en suis-je arrivé à être impliqué dans cette guerre ? », se demande-t-il. « Starlink n’est pas censé être impliqué dans les conflits. C’est pour que les gens puissent regarder Netflix tranquillement, pour se connecter à l’école et faire des choses pacifiques, pas pour des frappes de drones ».
Elon Musk est-il naïf, ou fait-il semblant de découvrir les enjeux d’une guerre ? Difficile à dire. Toujours est-il qu’après cet épisode, il s’est retrouvé au centre des intérêts diplomatiques américain, russe et ukrainien. Il a discuté avec des conseillers de la Maison Blanche, de l’armée US, avec l’ambassadeur russe aux États-Unis, mais aussi avec le vice-premier ministre ukrainien, Mykhailo Fedorov, qui l’a supplié de réactiver l’accès internet par satellites en Crimée.
Qu’un pays dépende entièrement de la générosité d’un milliardaire aussi imprévisible qu’Elon Musk confère à l’homme d’affaires une position inédite et quelque peu vertigineuse. Un homme, élu par personne mais qui tire sa puissance de sa fortune, a en effet le pouvoir d’inverser à lui tout seul, sur un coup de tête, le cours d’une guerre…
Quand Elon Musk cède aux « absurdités » sur Twitter
Autre coup de tête : après cet épisode, Elon Musk a prévenu le Pentagone — le ministère américain de la Défense — que SpaceX ne pouvait plus financer seul la connexion Starlink et les récepteurs en Ukraine. En octobre dernier, il expliquait sur Twitter que cette opération avait déjà coûté 80 millions de dollars à l’entreprise.
Devant la controverse qui s’en est suivie sur Twitter, il a finalement décidé de poursuivre le financement de Starlink en Ukraine « gratuitement ». Sauf que le Pentagone était prêt à faire un geste, en l’occurrence un gros chèque de 145 millions de dollars, selon Gwynne Shotwell, la présidente de SpaceX ! « Elon a cédé aux absurdités sur Twitter et aux détracteurs au sein du Pentagone qui ont divulgué l’histoire », déplore-t-elle auprès d’Isaacson.
Au bout du compte, SpaceX a pu négocier avec les États-Unis et l’Union européenne pour régler la note de 100 000 nouveaux récepteurs satellite envoyés en Ukraine au début de l’année.
Source :
CNN