en Virginie, les centres de données avalent toujours plus de litres d’eau

Un centre de données de Microsoft


La consommation d’eau de dizaines de centres de données américains, situés en Virginie, a bondi de près de deux tiers depuis 2019. De quoi inquiéter les associations de défense de l’environnement qui avertissent que ces infrastructures informatiques vont se multiplier ces prochaines années.

La Virginie souffre de sécheresse et pourtant, cet État américain abrite aujourd’hui le plus grand nombre de centres de données au monde, des structures très gourmandes en eau. Un non-sens pour des associations de défense de l’environnement, qui avertissent que la situation devrait empirer dans les prochaines années en raison de l’essor de l’intelligence artificielle.

Entre 2019 et 2023, la consommation d’eau de ces infrastructures informatiques dans la « data centre alley » a augmenté de près de deux tiers – il s’agit d’une zone du nord de la Virginie où sont concentrés des centres de données. C’est ce que révèle le Financial Times dimanche 18 août, documents administratifs à l’appui – des informations obtenues via des demandes d’accès à l’information, l’équivalent de nos CADA (demandes de communication de documents administratifs).

En 2023, la consommation d’eau des centres de données américains équivalente à celle de Londres pendant 4 mois

L’année dernière, ces entrepôts géants ont utilisé près de 7 milliards de litres d’eau, contre 4,27 en 2019, selon nos confrères qui s’appuient sur les données fournies par les comtés de Fairfax, Loudoun, Prince William et Fauquier, tous situés dans ou près de la « data centre alley ». Ces chiffres, qui reflètent partiellement la situation dans cette zone, ne serait qu’une partie émergée de l’iceberg. Selon les estimations du groupe de recherche Dgtl Infra, citées par nos confrères, les data centers américains auraient avalé au total plus de 283 milliards de litres d’eau en 2023, ce qui correspondrait à ce que consomme Londres en près de quatre mois.

Cette hausse de la consommation d’eau a été confirmée par certains géants du numérique. Dans son dernier rapport environnemental, Google a par exemple indiqué que sa consommation d’eau avait augmenté de 14 % en 2023.  La raison principale ? « Ses besoins de refroidissement de l’eau dans (ses) centres de données ».

Des tonnes d’eau douce derrière ChatGPT

L’eau est en effet utilisée pour refroidir les centres de données et les serveurs informatiques, les équipements que l’on trouve derrière ChatGPT et les autres IA génératives. La construction d’un grand modèle de langage nécessite de très nombreux calculs qui génèrent de la chaleur. Dans ces immenses entrepôts, la température peut vite monter – or si elle monte trop, les centres vont surchauffer, et les ordinateurs vont s’éteindre. Pour éviter ce scénario, il faut les refroidir, avec de l’eau qui va maintenir la température à un niveau raisonnable.

L’année dernière, Shaolei Ren, chercheur à l’Université de Californie, s’était attelé, avec son équipe, à calculer l’impact environnemental de ChatGPT, rapportait Associated Press. Selon ces chercheurs, l’agent conversationnel d’OpenAI engloutit la moitié d’un litre d’eau à chaque fois qu’on lui pose entre 5 et 50 questions (ou prompts). Un demi-litre, cela peut sembler peu, mais il faut penser aux millions d’utilisateurs de ChatGPT, expliquaient en substance les chercheurs.

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Et il faut de l’eau douce, et non de l’eau salée qui pourrait entraîner « la corrosion, l’obstruction des conduites d’eau et la prolifération de bactéries », soulignait une étude publiée en avril 2023. De quoi constituer un véritable problème à l’heure du réchauffement climatique où la disponibilité de l’eau douce, provenant de la fonte des neiges, s’est déjà réduite, et est appelée à encore plus diminuer.

De nombreux centres de données situés dans des zones à stress hydrique, selon des ONG

Et la question se pose d’autant que certaines installations informatiques sont situées dans des zones où l’eau devient rare, comme la Virginie. Cet État a connu plusieurs périodes de sécheresse record ces dernières années. Et cette situation serait loin d’être exceptionnelle. Microsoft a par exemple déclaré que près de la moitié de l’eau (42 %) que le groupe consommait, au niveau mondial, provenait de « zones soumises à un stress hydrique » en 2023. Google a de son côté indiqué au Financial Times que 15 % de ses prélèvements d’eau douce dans le monde provenaient de zones où l’eau devenait rare.

Il s’agit d’un véritable problème pour Piedmont Environmental Council, une organisation à but non lucratif basée en Virginie. Cette dernière s’attend à une « croissance explosive » des centres de données dans les prochaines années, due à la course à l’intelligence artificielle. Cette tendance « soulève des questions quant à la durabilité de cette situation », s’est alarmée Julie Bolthouse, directrice de l’aménagement du territoire de cette association, interrogée par le Financial Times. Pour les ONG, les centres de données ne devraient pas être situés dans des zones de sécheresse.

Les autorités locales fixent pourtant des limites de consommation d’eau journalières, mensuelles et annuelles. De leur côté, les géants du numérique et de l’IA expliquent s’efforcer de réduire leur consommation, en utilisant par exemple de l’eau récupérée et recyclée. Microsoft a déclaré qu’il œuvrait à réduire la quantité d’eau utilisée pour le refroidissement et qu’à partir du mois d’août, « les nouveaux centres de données que nous concevons pour la Virginie utiliseront des technologies de refroidissement sans eau ». Amazon s’est aussi engagé à restituer plus d’eau qu’il n’en utilisera pour ses activités directes.

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Source :

Financial Times



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