Vers une nouvelle avancée dans le dossier judiciaire contre le service de messagerie chiffrée Encrochat ? La justice lilloise, chargée de la conduite de cette affaire emblématique du changement de méthode des polices, s’apprête en effet à mettre la main sur l’un des suspects clés. Le tribunal fédéral suisse vient de rejeter le recours de ce dernier, qui s’opposait à son extradition.
Selon le média suisse Watson, ce n’est ni plus ni moins que l’ancien directeur technique d’Encrochat! Arrêté le 9 juillet 2024, le trentenaire canadien visé vivait avec sa famille dans le canton de Zoug, dans le centre de la confédération helvétique. Il avait notamment fait part de ses craintes quant à l’importante couverture médiatique de l’affaire, ou encore plaidé que la France avait utilisé une arme informatique pour accéder à son téléphone Encrochat en Suisse.
Les enquêtes Encrochat et Sky ECC prouvent qu’il n’y a pas besoin de ça.
1) absolument personne ne peut garantir l’utilisation légitime de back doors
2) les pirates trouveront les failles et s’amuseront aussi
3) d’autres solutions encore plus sécurisées apparaîtront
4) Signal se tirera de là— Loïc Tregoures (@tregs.bsky.social) 31 janvier 2025 à 19:22
Coup de maître
La solution de messagerie qui tournait sur des serveurs à Roubaix avait fait de la confidentialité des échanges son principal argument de vente. Un point qui n’avait pas échappé aux criminels de tout poil. Dans un bilan partagé en juin 2023, l’agence policière Europol avait fait état d’une centaine de projets d’assassinat repérés. Mais aussi de centaines de tonnes de stupéfiants interceptées et de 6558 suspects arrêtés.
Un coup de maître permis grâce à un piratage de haute volée des gendarmes français, dévoilé en juillet 2020. Aidés vraisemblablement par le service technique national de captation, une structure rattachée à la DGSI, ils avaient réussi à hacker la messagerie Encrochat. Faisant ainsi main basse sur plus de 115 millions de conversations entre 60 000 utilisateurs.
Ce genre d’opération a fait ensuite florès, avec d’autres procédures contre des messageries du même type, comme Sky-ECC. Il est en effet plus pertinent de s’attaquer à une infrastructure utilisée par des criminels plutôt qu’à chaque organisation criminelle séparément.
Un autre canadien arrêté
Au risque, dénoncent cependant les critiques de ce genre d’opération, de faire une pêche bien trop large, en prenant dans ses filets des personnes simplement soucieuses de leur sécurité.
Au contraire, comme le précisait une source proche des investigations au Parisien, les enquêteurs pensent plutôt que la messagerie a été « créée sur commande » à la demande de malfrats.
Un point qui sera, en cas de procès, au cœur des débats. Outre la personne qui doit être extradée de Suisse, la justice française tient déjà un autre acteur majeur de l’affaire. Il s’agit de Paul Kruksy, également canadien, présenté comme le patron de la solution de communication. Il a été extradé vers l’Hexagone il y a un peu plus d’un an depuis la République dominicaine.