La CNIL n’apprécie pas les caméras algorithmiques de la ville de Nice et aimerait que leur utilisation cesse, mais le maire Christian Estrosi ne l’entend pas de cette oreille. Dans un courrier envoyé le 20 mai, la Commission Nationale Informatique et Libertés a demandé à la municipalité de mettre fin à l’exploitation de plusieurs caméras algorithmiques installées en 2020 devant les écoles de la ville.
Ces appareils embarquent un logiciel capable d’identifier les véhicules qui restent en stationnement devant l’entrée des écoles pendant de trop longues périodes. Le logiciel peut ainsi envoyer des alertes aux agents chargés de surveiller les flux vidéos des caméras de la ville, afin de leur permettre d’évaluer si la situation nécessite ou non l’intervention de la police municipale.
La CNIL met le holà
Malheureusement, ce programme ne rentre pas dans le cadre légal des déploiements autorisés pour la vidéosurveillance algorithmique estime la CNIL, qui demande à la ville de cesser l’exploitation de ce dispositif, rappelant « la nécessité de réduire l’analyse des personnes sur la voie publique au strict minimum » comme le rapporte 20 minutes.
Mais la position de la CNIL fait face à l’opposition du maire de la ville Christian Estrosi, qui a fait savoir son intention de défendre ses caméras. Il a ainsi fait part de son intention de saisir le conseil d’État et de lancer une pétition, tout en invitant le gouvernement à faire évoluer le cadre légal en vigueur.
« Il est inadmissible qu’une autorité qui s’appuie sur une loi poussiéreuse de 1978 décide délibérément de mettre en danger la sécurité des enfants de notre ville » déplore le maire de Nice, faisant référence à la loi informatique et libertés de 1978, qui a posé les bases du cadre légal en matière de données personnelles en France et permis la création de la CNIL pour contrôler son application. Christian Estrosi espère pouvoir réactiver ce dispositif de caméras augmentés à partir du mois de septembre et rappelle que celui-ci ne procédait ni à l’analyse des plaques d’immatriculation des voitures, ni à l’analyse des personnes à l’image.
Usual suspect
Le cadre réglementaire de la vidéosurveillance algorithmique est un sujet mouvant. Le parlement a autorisé à l’occasion des jeux olympiques une première expérimentation limitée à quelques cas d’usage précis, et autorise au compte goutte les déploiements de ces technologies. Cette période d’expérimentation a récemment été prolongée jusqu’en 2027.
En parallèle la CNIL précise les conditions de déploiement de ces dispositifs dans certains cas d’usage précis, comme par exemple pour les caisses automatiques des supermarchés, en veillant à assurer le respect du cadre légal préexistant en matière de données personnelles notamment.
Mais entre Nice et la CNIL, les relations n’ont jamais été au beau fixe : la ville du sud de la France est depuis plusieurs années l’une des municipalités les plus actives en matière de vidéosurveillance, avec 4500 caméras déployées sur l’agglomération. Et outre le déploiement de nouvelles caméras, la ville expérimente volontiers de nouvelles technologies en la matière : la ville avait ainsi été l’une des premières à tester en 2019 un dispositif de reconnaissance faciale sur la voie publique, un test autorisé par la Commission malgré ses réserves à l’égard du projet. La CNIL avait en revanche retoqué en 2018 une autre expérimentation de la ville permettant aux citoyens de signaler des incidents en les filmant avec leurs smartphones.