Sur le papier, la nomination de Clara Chappaz au secrétariat d’Etat chargé de l’Intelligence Artificielle et du Numérique a tout pour plaire aux acteurs de la tech en France. Après le politique Jean-Noël Barrot et la discrète Marina Ferrari – « L’inconnue du numérique », titrait Le Monde -, c’est une femme du sérail qui prend en charge ce portefeuille au sein du gouvernement Barnier.
Pendant près de trois ans, la jeune femme de 35 ans a dirigé la Mission French Tech, chargée de soutenir l’écosystème des startups françaises.
Rattachée à la Direction générale des Entreprises (DGE), la fille du serial entrepreneur Pierre Chappaz (Kelkoo, Wikio, Teads) était en contact étroit avec les services de Bercy.
La « startup nation » rassurée
Avant d’occuper ce poste d’observation privilégié, Clara Chappaz a vécu de l’intérieur le monde des jeunes pousses. Elle a occupé différentes fonctions au sein d’entreprises d’e-commerce dédiées à la mode comme Zalora, la déclinaison asiatique de Zalendo, et la licorne française Vestiaire Collective.
Entre deux missions à l’étranger pour Apple, Pernod Ricard ou Boston Consulting Group (BCG), cette diplômée de l’Essec et de la Havard Business School aura cofondé à Boston, Lullaby, un place de marché de vêtements de seconde main pour enfants.
Un CV à même de rassurer la « startup nation». Un écosystème qui craignait que la dissolution vienne détricoter tout ce qui avait été entrepris en faveur de l’innovation depuis des années. « Une excellente nouvelle pour notre écosystème », a logiquement tweeté Roxanne Varza, directrice de Station F.
Quelles marges de manœuvre ?
Côté négatif, on notera que Clara Chappaz occupe le dernier rang protocolaire au sein du gouvernement Barnier. Alors que les acteurs du numérique réclament de longue date un ministère de plein exercice, ils subissent un nouveau déclassement après le passage de ministre délégué à secrétaire d’État lors de la nomination de Marina Ferrari. Seule représentante de la société civile de ce gouvernement et affiliée – a priori – à aucun parti, Clara Chappaz pourrait manquer de poids politique à l’heure des arbitrages.
Hiérarchiquement, Clara Chappaz n’est plus sous la tutelle du ministre de l’Économie comme ses prédécesseurs – à l’exception de Mounir Mahjoubi rattaché à Matignon -, mais du ministre de la Recherche Patrick Hetzel. En attendant les décrets d’attribution qui seront publiés dans les prochains jours, Contexte s’interroge sur ce rattachement : « Faut-il y voir le signe d’une plus grande attention portée aux startups avec une forte dimension de recherche (IA, quantique, biotech) ? »
Une dilution des sujets de la tech au sein du gouvernement serait possible. Les dossiers liés à la souveraineté technologique et l’e-commerce restent dans le giron de Bercy, sous le coupe de Marc Ferracci en charge de l’Industrie et de Laurence Garnier de la Consommation. Quid, en revanche, du marché des télécoms traditionnellement géré par le ministère de l’Économie ?
Pour la première fois, l’IA a son portefeuille
Un motif de satisfaction concerne l’intitulé du poste occupé par Clara Chappaz. Pour la première fois, il fait mention à l’intelligence artificielle. Un domaine ô combien stratégique. Depuis le rapport de Villani en 2017, la France a cherché à favoriser l’émergence de champions nationaux comme Mistral AI, LightOn, H ou Hugging Face pour exister face aux velléités suprémacistes des États-Unis et de la Chine.
Sur sa table, Clara Chappaz aura le dossier épineux des derniers arbitrages sur l’AI Act. Entré en vigueur cet été, le règlement européen sur l’IA nécessite encore un certain nombre d’éléments de cadrage pour sa mise en œuvre.
La parisienne de naissance aura aussi à organiser le sommet international sur l’IA qui se tiendra à Paris en février 2025 même si, « le pilotage de cet événement diplomatique sera a priori suivi de près par l’Elysée et M. Macron », estime Le Monde.