Framasoft, «Amap du numérique», a vingt ans

Framasoft, «Amap du numérique», a vingt ans


Logo de Framasoft, par JosephK Framasoft (licence CC by-sa)

2021, année des vingtenaires: après Wikipédia, née en janvier 2001, c’est au tour de Framasoft d’atteindre ce bel âge de vingt ans. Le 9 novembre 2001, un professeur de mathématiques, Alexis Kauffmann, déposait le nom de domaine de son site framasoft.net.

« Sensibiliser à l’esprit du libre »

Il l’évoque dans ce tweet, où il cite son éditorial d’alors,

dont une partie s’intitulait «sensibiliser à l’esprit du libre» (je ne connaissais pas ce terme lorsque ZDNet m’a demandé de donner un nom à ce blog, en février 2009… mais c’est une belle proximité!). Framasoft tient ses deux premières syllabes de français-mathématiques.

Ainsi qu’il se présentait à sa naissance, Framasoft se proposait «de référencer quelques-unes de ces applications utiles, légères et gratuites (ou mieux libres!) qui foisonnent sur le net», en mettant l’accent sur les logiciels libres –, initialement surtout à l’intention du monde de l’enseignement.

Un webinaire est consacré demain, mardi 9 novembre, à cette histoire, qui «avait commencé quelques temps auparavant, dans un collège de Bobigny, entre une professeure de lettres, Caroline d’Atabekian, et un professeur de mathématiques, Alexis Kauffmann, qui seront tous deux présents pour ce premier webinaire BigBlueButton dont l’idée est née dans le salon Libre & Éducation de la messagerie de l’État Tchap».

La campagne Dégooglisons Internet, un succès… presque excessif

Framasoft a beaucoup grandi au long de ses deux premières décennies, le site (puis le réseau de sites) étant appuyé à partir de 2004 par une association homonyme. Wikipédia donne une recension des étapes – activités propres à l’association, militantisme, actions concertées avec d’autres organisations – de ces vingt ans. Et l’association retrace son histoire à travers les souvenirs de plusieurs de ses acteurs: Alexis Kauffmann, Caroline d’Atabekian, Pouhiou et Pierre-Yves Gosset, les codirecteurs de Framasoft.

Alexis Kauffmann, qui a été salarié de l’association de 2012 à 2014, a ensuite repris l’enseignement, et a rejoint en septembre dernier la Direction du numérique de l’Education nationale, comme « chef de projet logiciels et ressources éducatives libres et mixité dans les filières du numérique ».

Parmi les grands axes de Framasoft ces dernières années, il y a sa campagne Dégooglisons Internet, visant à mettre en avant des alternatives aux GAFAM. En 2014, l’association annonce cette volonté de développer «des alternatives logicielles à installer, étudier, améliorer et diffuser. Framasoft s’est inscrit dans cette évolution dès le lancement de Framapad en s’efforçant de faire au mieux: rendre le libre facilement accessible à nos grand-pères, petites sœurs, voisins et collègues. Aujourd’hui, Framapad est notre projet le plus utilisé, avec quatre instances sur nos services et un financement participatif réussi. Framadate et Framindmap sont en plein boom et notre lecteur RSS Framanews tourne à pleine capacité…»

Les dizaines de services que propose Framasoft vont paradoxalement être victimes de leur succès, et l’association indique en septembre 2019 qu’elle va progressivement en fermer plusieurs afin de rester ce qu’elle revendique, «une espèce d’Amap du numérique». Elle annonce un étalement suffisant des fermetures pour permettre la reprise par d’autres ou la migration des utilisateurs sans qu’ils soient pris par surprise.

Actuellement, indique son site, Framasoft c’est outre son annuaire initial de logiciels libres, Framalibre (1.600 logiciels), une cinquantaine de services tels que la Framakey (compilation d’une centaine de logiciels libres sous Windows, pour clé USB ou autre support), Framabook (une vingtaine de livres sous licence libre), Framapad (éditeur de texte collaboratif en ligne) et bien d’autres encore.

L’association compte dix permanents, ne reçoit aucune subvention et repose sur les dons. Sa présentation (et un topo sur le Libre, les GAFAM et la surveillance, etc.) par une de ses salariées, Angie Gaudion, en vidéo (transcription par l’April là, pour les plus pressés ;-)).

CHATONS, collectif d’hébergeurs Alternatifs

A noter dans cette vidéo, cette remarque d’Angie Gaudion sur ce que ne veut pas être Framasoft, «le Google du Libre»:

«On a environ 800.000 utilisateurs par mois sur l’ensemble de nos services – par rapport à 68 millions d’habitants ce n’est rien! Tout succès est relatif et je ne veux même pas savoir combien il y a de gens qui utilisent les outils de Google au mois, je pense que ce serait indécent de comparer ces deux éléments – en revanche, ce nombre d’utilisateurs fait que aujourd’hui, quand les gens cherchent des services alternatifs, ils pensent Framasoft. Donc on est devenu le Google du Libre et ça, pour nous, c’est un super gros problème parce qu’on ne veut pas être le centre ou la tête de quoi que ce soit, c’est justement complètement contraire à nos valeurs. Donc on essaye petit à petit de faire que les gens n’utilisent pas trop nos services. Pour ne pas être le Google du Libre, il faut effectivement qu’on ait d’autres acteurs qui proposent ces solutions et ça c’est une initiative que Framasoft a lancée fin 2016, qui s’appelle CHATONS, le Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires, donc un collectif qui regroupe 70 structures d’hébergeurs de services alternatifs.

Pendant le confinement le Collectif CHATONS a mis en place une page spécifique qui s’appelle entraide, sur entraide.chatons.org. Vous avez accès à des services en ligne sans inscription et, pareil, on se répartit la charge entre les différentes structures, on fait ce travail de répartition et ça, ça va a priori continuer.»

Pierre-Yves Gosset, codirecteur de Framasoft, a été interviewé par Alexandre Schon, de La France insoumise, (transcription April) en septembre 2020. Il expliquait entre autres:

«Notre avis vis-à-vis de la puissance publique c’est que depuis 20 ans on a régulièrement des promesses de ‘avec nous ça va changer!’. Très bien! J’ai envie de dire ‘dont acte’. Aujourd’hui, ce que nous attendons effectivement, c’est que potentiellement il y ait des engagements très clairs en faveur du logiciel libre et que, derrière, ces engagements soient suivis d’actes. Tant qu’il n’y aura pas ça, en tout cas au sein de Framasoft, nous ne discutons pas avec la puissance publique. Ça ne veut pas dire qu’on refuse de leur parler mais ça veut dire qu’on a arrêté cette démarche de plaidoyer auprès de l’acteur public, parce qu’on est une toute petite association et on n’a pas la capacité à aller taper systématiquement à la porte du député, à la porte du maire, à la porte de l’élu local. C’est pour nous une perte d’énergie extrêmement forte et ce qu’on fait aujourd’hui ce sont des actions directes, concrètes, en direction du public et, finalement, sans aucune aide de la puissance publique.»

Dans les dernières nouvelles, un travail par le pôle Design des services numériques service public sur le logiciel Framadate de Framasoft sera présenté ce 9 novembre à Open Source Experience (ces mardi et mercredi, au Palais des Congrès à Paris). Objectif de ce travail: compléter «les actions de la DINUM [Direction interministérielle du numérique] par une contribution concrète à un outil régulièrement utilisé dans les administrations. Ainsi, l’équipe apporte une expertise dans le domaine du design et de l’accessibilité, deux versants pour lesquels les acteurs du logiciel libre disposent souvent de peu de ressources. Cette initiative ne pourrait pas être possible sans le soutien financier du FIPHFP» (Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique).

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