Cette génération de consoles — PS5, Xbox Series S/X, Switch 1/2 — se distingue par une bizarrerie de l’histoire. Leurs prix élevés au lancement ne cessent d’augmenter au fil des ans ! Habituellement, c’est l’inverse : les prix baissent avec le temps. En 2020, une PS4 Pro se négociait autour de 300 € prix public, soit 100 € de moins que la PS4 standard, pourtant bien moins équipée, de 2013.
5 ans après le lancement des nouvelles Xbox et PlayStation, on observe tout le contraire : les consoles sont 100 €… plus cher. En cause : tout un tas de facteurs exogènes, de la bousculade de la pandémie aux tarifs de Trump. Mais il n’y a pas que le matériel : les constructeurs font grimper la note sur les jeux et les services. Par conséquent, il est de plus en plus difficile de jouer sur console, alors que cela représentait jusqu’à il y a peu le moyen le plus simple et le plus économique de goûter aux plaisirs vidéo-ludiques. Que s’est-il passé ?
Nintendo : l’addition salée pour les fans
90 € la cartouche de Mario Kart World, une politique d’extensions payantes pour le moins polémique, des accessoires obligatoires pour pouvoir jouer à de vieux jeux… La fièvre tarifaire a saisi Nintendo ! L’appétit féroce du constructeur japonais pour les sous des joueurs n’est pas récent, mais le lancement de la Switch 2 a manifestement exacerbé cette politique au risque d’entamer la patience (et le portefeuille) de ses fans les plus fidèles.
« Drop the price ! ». C’était le cri de colère des joueurs du monde entier après la présentation en avril dernier de la Switch 2 et des prix affichés par Nintendo. Ces trois mots ont envahi les commentaires des vidéos YouTube postées par le constructeur après l’événement. À 470 €, la nouvelle console est 170 € plus chère que la Switch de première génération. Et dans la foulée, on apprenait que le jeu Welcome Tour, qui fait office de visite guidée technique de l’appareil, était payant. Et c’était sans compter le prix délirant de la cartouche de Mario Kart World.
Nintendo peut remercier Donald Trump : en annonçant le même jour son programme de taxes douanières, le président américain a permis au constructeur de se sortir sans trop de casse de la polémique. On aurait pu croire que l’entreprise aurait tout de même compris la leçon et adopté un profil bas histoire de revenir dans les bonnes grâces des joueurs soucieux de leur budget.
Mais en fait, non. Le Nintendo Direct du 12 septembre n’a fait que confirmer la position de l’entreprise. Les fans seront ravis de pouvoir jouer à Mario Galaxy 1 et 2, qui font partie des meilleurs jeux de plateformes 3D de tous les temps, sur Switch. La douche froide vient des tarifs : 40 € le jeu, 70 € le pack. Pour des titres sortis respectivement en 2007 et 2010, ça pique un peu. Surtout qu’il était possible de les acheter une dizaine d’euros pièce dans la boutique Virtual Console de la Wii U… C’est entendu, il s’agit de versions améliorées, notamment au niveau graphique (ce qui est le minimum syndical). Mais il n’y a aucun contenu supplémentaire vraiment substantiel qui pourrait justifier de tels prix. Sachez tout de même que sur n’importe lequel des sites de petites annonces, l’achat d’une Wii U et des deux jeux revient nettement moins cher.
Et si ça n’était que ça, mais le constructeur a aligné les mauvaises nouvelles : un DLC à 20 € pour Donkey Kong Bananza (sorti le mois précédent) qui ressemble fort à des chutes du jeu d’origine, le prochain jeu Pokémon qui sortira avec une extension payante… Il n’y a pas de petits profits, décidément.

Nintendo a profité de l’attente autour de la successeure de la Switch pour serrer les boulons et remplir ses coffres à bon compte. En mars dernier, l’entreprise mettait fin au programme de « points or » qui permettait de faire des petites économies sur l’achat de jeux. Et les « Bons pour jeux », ces coupons proposés aux abonnés Nintendo Switch Online pour gratter quelques euros, ne sont pas compatibles avec la Switch 2 !
Plus généralement, Nintendo n’a pas une politique très favorable aux consommateurs : il est toujours impossible de se faire rembourser un achat sur l’eShop. Si seulement l’entreprise proposait des démos pour tous ses jeux, cela permettrait au moins de s’en faire une petite idée avant de passer éventuellement à la caisse.
Xbox : le Game Pass en perte de crédit
En tendant l’oreille, on pouvait distinctement entendre le cri de désespoir et d’exaspération de millions de joueurs quand Microsoft a dévoilé la nouvelle grille tarifaire du Game Pass il y a quelques jours. L’incompréhension est totale : l’éditeur a en effet décidé de relever le prix du palier Ultimate de 50 %, soit 26,99 € par mois.

Pour compenser, Xbox a jeté en pâture une sélection d’anciens jeux Ubisoft et le « Club de Fortnite » (une poignée d’avantages pour le battle royal d’Epic). C’est tout ou rien : les joueurs qui n’ont que faire de ces privilèges paieront tout de même 9 € de plus chaque mois pour la même chose ou presque. Soyons juste, la qualité du Xbox Cloud Gaming s’améliore et Microsoft s’engage sur plus de 75 nouveaux jeux disponibles dès le jour de leur sortie chaque année (encore faut-il avoir le temps de profiter de tous).
Il y a deux ans, le Game Pass Ultimate revenait à… 12,99 € par mois. Un contraste saisissant.

Les abonnés Game Pass paient peut-être la tentative malheureuse (et ratée) de Microsoft qui a voulu augmenter le prix de ses jeux pour la fin de l’année. Outer Worlds 2 devait ouvrir le bal avec un tarif de 80 $ au lieu de 70 $. Mais l’éditeur a rapidement fait marche arrière, probablement en raison d’un volume de précommandes très bas. Et pour le moment du moins, aucun autre jeu prévu d’ici Noël n’a été annoncé au nouveau prix.
Le prix des consoles fluctue lui aussi à la hausse, malgré le désintérêt manifeste des joueurs. Au lancement fin 2020, la Xbox Series X coûtait 499,99 €, la Series S était vendue 299,99 €. Il faut aujourd’hui débourser respectivement 100 € et 50 € de plus — et il est probable que Microsoft relève prochainement les tarifs en Europe, après la dernière augmentation outre Atlantique.
Le cas de Xbox est un peu plus compliqué que pour les deux autres concurrents sur le marché de la console de salon. La direction de Microsoft et ses actionnaires veulent rentabiliser les acquisitions gigantesques de ces dernières années — ZeniMax en 2021 pour 8 milliards de dollars, Activision Blizzard en 2023 pour 68 milliards (!) —, ce qui passe par l’abandon progressif des exclusivités Xbox et la mutation de la division jeux en éditeur tiers multiplateformes.
Microsoft a fait savoir à plusieurs reprises qu’une nouvelle console était en développement, un partenariat avec AMD à la clé. Mais le constructeur ira-t-il vraiment jusqu’au bout ? L’abandon quasiment en rase campagne de la gamme actuelle (qui ne se vend presque plus) n’est vraiment pas encourageant. Phil Spencer, le grand patron de la division gaming, a d’ailleurs admis que Xbox avait perdu la guerre des consoles.
Sony : payer plus pour jouer moins
À l’instar de Microsoft, Sony n’a pas eu d’autre choix que de relever le prix de la PS5 avec le temps. En 2020, l’édition numérique de la console (sans lecteur de disque) sortait à 399,99 €. Elle est désormais facturée 100 € de plus. Et on sent bien que le constructeur n’en a pas terminé avec les hausses. La dernière version du châssis de la PS5 a été conçue pour faire des économies dans tous les sens, en rabotant notamment sur le SSD.

Le stockage de cette mouture n’est plus que de 825 Go, au lieu d’1 To auparavant. Et sans changer de prix… Une méthode digne d’un vendeur de lessive ! Heureusement pour Sony, la PS5 reste un énorme succès, portée par des jeux aussi emblématiques que The Last of Us ou God of War, et même Microsoft donne un coup de main pour asseoir la supériorité de la plateforme.
Sony avait tout misé sur les jeux service, qui à l’image de Fortnite ou d’Apex Legends sont conçus pour faire les poches des joueurs en ajoutant régulièrement du contenu et des cosmétiques. Fin 2023, Le groupe divisait par deux (6 au lieu de 12) le nombre de jeux de ce genre devant sortir d’ici mars 2026. La catastrophe industrielle que fut Concord, sorti le 23 août 2024 et désactivé le 6 septembre de la même année (!), a manifestement refroidi les ardeurs des studios PlayStation.

Le hic, c’est que ces mêmes studios ont englouti des sommes folles et des milliers d’heures de travail dans des jeux service qui ne sortiront jamais. Le tuyau des nouveautés est complètement sec, ce qui explique en partie le peu d’exclusivités PlayStation de ces dernières années : 2 seulement en 2025, et encore, Death Stranding 2 a été développé par un studio indépendant. Microsoft est venu à la rescousse en multipliant les portages de ses propres exclusivités Xbox sur PlayStation ! Nourrissant ainsi un catalogue de nouveaux jeux AAA qui aurait été bien pauvre sinon — ce qui au passage contribue à complètement démonétiser les consoles Xbox.
En définitive, Sony ne fait pas exception à la règle. Entre une console vendue toujours plus cher malgré des composants rabotés et une stratégie jeu service qui a englouti des millions sans produire de véritables nouveautés, les joueurs PlayStation se retrouvent eux aussi face à une équation douloureuse : payer plus, pour moins.
Les consoles ne vont pas disparaître demain, leurs catalogues restent attractifs et leur simplicité d’usage continue de séduire. Mais à force de hausses de prix et de paris ratés, elles ont perdu ce qui faisait leur force face au PC : l’accessibilité. Ironie du sort : la veille des hausses de prix du Game Pass, Steam lançait ses traditionnels soldes d’automne. Pour 320 €, soit le prix du Game Pass Ultimate pendant un an, on peut facilement remplir son backlog pour au moins un an !
C’est aujourd’hui le bon vieux PC, longtemps jugé trop complexe et trop cher, qui apparaît comme la valeur refuge pour de nombreux joueurs. Un sacré pied de nez de l’histoire.
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