Vendredi 8 novembre, 14 heures. Près d’une cinquantaine d’âmes se tiennent debout sur un trottoir de l’Est parisien, banderoles et cafés chauds à la main pour braver des bourrasques automnales. A quelques mètres, se trouve le studio de jeu vidéo Don’t Nod, dont certains ici sont salariés, et à qui l’on doit notamment la licence Life is Strange. Comme une partie importante de l’entreprise, ils sont entrés en grève pour protester contre un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). « Jusqu’à 69 » emplois sont menacés dans cette société qui en compte un peu moins de 340 (soit 20 % des effectifs), a annoncé leur direction, le 16 octobre.
Des drapeaux aux couleurs du Syndicat des travailleurs et travailleuses du jeu vidéo (STJV) dominent cette petite foule parisienne. La veille, le STJV a relayé une lettre ouverte signée par plus de 150 salariés de la branche parisienne de Don’t Nod (un autre studio existe à Montréal, au Canada). « Notre principale revendication, c’est l’annulation pure et dure de ce PSE, résume auprès du Monde Tristan (il ne souhaite pas que son nom de famille soit cité), membre du comité social et économique de l’entreprise. On trouve ça aberrant d’en arriver à dégager 69 personnes de leurs postes pour des erreurs commises par la direction. »
Les participants à cette mobilisation, pensée comme la continuité d’un premier débrayage organisé le 28 octobre et suivi par un tiers des employés, espèrent que celle-ci fera fléchir la direction du studio, alors que des rencontres entre les instances de représentation du personnel et les dirigeants de l’entreprise doivent s’intensifier dans les prochaines semaines. Contactés, ces mêmes dirigeants n’ont pas donné suite aux sollicitations du Monde, invoquant par e-mail « des contraintes de confidentialité qui entourent ce dialogue », et précisant « ne pas disposer d’informations précises sur le nombre de personnes participant à la grève ».
« On n’a jamais été écoutés »
Dans le communiqué qu’elle a adressé à la presse et à ses actionnaires – Don’t Nod est une société cotée en Bourse depuis 2018 –, la direction justifie ces futurs licenciements par « un contexte de résultats dégradés » dû aux « contre-performances économiques des derniers lancements » de ses jeux vidéo. Tristan, de son côté, estime que ce plan n’est pas fondé. « Normalement, un PSE est préparé, sourcé, avec des documents et des calculs qui justifient les chiffres utilisés pour justifier la suppression de certains postes. Là, ce qu’on nous a transmis est soit obsolète, soit insuffisant, soit reste beaucoup trop en surface. »
Il vous reste 46.25% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.