Ces dispositifs sont utilisés dans certains bureaux de tabac pour aider les commerçants à limiter la vente d’alcool, de tabac et de jeux d’argent aux moins de 18 ans. La CNIL les juge disproportionnés, non nécessaires et non conformes au RGPD, le règlement européen qui protège nos données personnelles.
Les buralistes vont-ils devoir débrancher leurs caméras dopées à l’IA ? Ces dispositifs utilisés pour aider les commerçants à évaluer l’âge de leurs clients, en vue d’empêcher la vente de certains produits aux mineurs, ont été jugés non conformes au RGPD, le règlement européen qui protège nos données personnelles. Dans un avis de la CNIL du vendredi 11 juillet, ces « caméras augmentées », associées à des algorithmes d’intelligence artificielle (IA), déployées dans les bureaux de tabac, ont été jugées ni nécessaires, ni proportionnées.
Quatre mois plus tôt, le gardien de notre vie privée et de nos données personnelles avait annoncé vouloir examiner la conformité de ces dispositifs. Si les « caméras augmentées », associées à des algorithmes d’intelligence artificielle (IA) ne sont pas par principe illicites, leur déploiement est censé être conforme au RGPD – il doit donc être jugé « nécessaire et proportionné », rappelle l’autorité indépendante.
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Une analyse « des visages de toutes les personnes se situant dans leur champ de vision »
De quelles caméras parle-t-on ? Depuis peu, certains buralistes utilisent des caméras augmentées dont l’algorithme « scanne le visage de la personne pour estimer si celle-ci est mineure ou majeure », détaille la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés. Ces dispositifs « analysent les visages de toutes les personnes se situant dans leur champ de vision ». En pratique, la caméra après analyse va indiquer soit un voyant vert, si la personne est considérée comme majeure, soit un voyant rouge, si l’âge estimé est inférieur à 18 ans.
L’objectif est ici d’éviter que des produits d’alcool, de tabac ou de jeux d’argent ne soient vendus à des mineurs. Comme le rappelle la CNIL, il ne s’agit que d’outils d’aide à la décision pour le buraliste, et non de preuve de majorité pour les clients des bureaux de tabac.
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Des risques d’erreur, et un dispositif qui s’ajoute au contrôle requis par la loi
Dans son avis, l’autorité commence par se pencher sur la condition de nécessité : le gardien français estime que ces caméras « comportent un risque d’erreur, comme tout système d’intelligence artificielle », lorsqu’elles estiment l’âge d’un client. Or le dispositif n’a vocation qu’à être une aide pour les buralistes qui sont censés vérifier l’âge d’un client via une preuve de majorité.
Résultat : « l’analyse préalable du visage des personnes par une caméra pour estimer leur âge n’apparaît pas nécessaire : elle ne ferait que s’ajouter au contrôle requis par la loi. Et, au contraire, l’utilisation de ce dispositif pourrait inciter les buralistes à s’en remettre uniquement au résultat rendu par la machine, sans plus de vérification », écrit la CNIL.
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Des caméras qui analysent, en temps réel, les clients
Les dispositifs de caméras dopées à l’IA des buralistes ne remplissent pas non plus la condition de proportionnalité, notamment parce qu’ils enregistrent « toutes les personnes, mêmes celles qui sont manifestement majeures ». Or, « ces caméras ne font pas que filmer mais analysent, en temps réel, les personnes qui y sont exposées », constate la CNIL. Les clients ne peuvent donc pas « exercer leur droit d’opposition (le fait de refuser d’être filmé, NDLR), pourtant garanti par le RGPD ».
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Résultat : ces dispositifs ne sont pas conformes au RGPD : ils devraient donc être débranchés, même si la CNIL ne le dit pas clairement. Pour le gardien de notre vie privée, déployer de tels dispositifs qui « présentent par nature des risques pour les droits et libertés fondamentaux des personnes » contribue à banaliser « une forme de surveillance renforcée » dans des lieux de vie comme des bureaux de tabac.
En mai dernier, l’autorité indépendante avait tranché différemment la question des caméras « intelligentes » installées aux caisses automatiques. Ces dernières peuvent, sous réserve de respecter plusieurs conditions, être conformes au RGPD, et donc être déployées dans certaines enseignes.
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Source :
Position de la CNIL du vendredi 11 juillet 2025 sur les caméras augmentées chez les buralistes