Pour la deuxième fois en un an, la France condamne officiellement une campagne d’influence russe visant le territoire national. Jeudi 9 novembre, le Quai d’Orsay a publiquement condamné l’implication du réseau de désinformation Doppelganger, ou Recent Reliable News, dans l’amplification et la diffusion des photos d’étoiles de David bleues taguées sur des murs de Paris et de sa proche banlieue.
Dans son communiqué, la diplomatie française explique que de nombreux comptes sur les réseaux sociaux attribués « avec un haut degré de confiance » au réseau Doppelganger ont amplifié les photos de ces tags, mais surtout qu’ils ont été les premiers à les propager en ligne. L’enquête a été menée par Viginum, l’organisme français de lutte contre les opérations d’influence.
Comme l’avait constaté Le Monde, au moins deux photos des tags prises de nuit rue de Rocroy (10e arrondissement) avaient été massivement diffusées sur Facebook et Twitter par les comptes de Doppelganger. Si ces comptes automatisés sont grossiers, les photos diffusées n’étaient trouvables nulle part ailleurs, laissant penser qu’elles avaient été prises ou réceptionnées par une personne en lien avec le réseau de désinformation.
Une enquête en cours
Le Quai d’Orsay précise que sa condamnation porte spécifiquement sur la diffusion et l’amplification de ces tags, alors que l’origine même des 250 pochoirs d’étoiles de David retrouvés en banlieue parisienne ces dix derniers jours doit elle être déterminée par une enquête judiciaire. Quatre personnes de nationalité moldaves (dont un couple ayant été interpellé) sont suspectées d’être à l’origine d’une partie d’entre eux.
Le commanditaire présumé de l’opération, l’homme d’affaires moldave prorusse Anatolii Prizenko, a confirmé à Libération avoir payé des personnes pour peindre des étoiles de David sur les murs parisiens et assuré que son but était de « soutenir » les Français juifs – une affirmation douteuse, alors que M. Prizenko a publié plusieurs messages antisémites sur les réseaux sociaux. Contacté par Le Monde, il n’a pas répondu aux questions sur ses éventuels liens avec des services de renseignement.
A Moscou, la diplomatie russe a, de son côté, réfuté tout lien avec ces opérations. « Non, il n’y a pas eu d’influence extérieure, ce n’est pas une diversion ou une provocation », a affirmé jeudi la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, lors d’une conférence de presse.
C’est la deuxième condamnation officielle du Quai d’Orsay visant Doppelganger, une longue et vaste opération d’influence russe en ligne qui s’appuie aussi bien sur des faux sites d’information que sur des copies de médias français, allemands ou mêmes ukrainiens. Ce réseau diffuse notamment ses contenus à l’aide d’un réseau de faux comptes Facebook et Twitter, généralement de très mauvaise facture et à la portée limitée, mais aussi en achetant des publicités sur le réseau social de Meta à l’aide de fausses pages.