Avec le train de mesures prises contre la Chine pour freiner leurs progrès dans la conception et la production de puces, les Etats-Unis pensaient avoir bloqué l’accès de l’autre grande puissance mondiale sur des noeuds de gravure élevés.
L’idée était que, en bloquant jusqu’aux exportations d’équipements de lithographie, la Chine ne pouvait pas descendre en-dessous d’une gravure de 14 nm. L’annonce du smartphone Huawei Mate 60 Pro, avec sa puce Kirin 9000S capable d’apporter 5G et appels téléphoniques par satellite, est en train de modifier cette perception.
Si le fabricant chinois ne donne pas d’informations, les premières analyses suggèrent qu’il s’agit d’un processeur mobile gravé en 7 nm (ou en dérivé optimisé 5 nm) par le fondeur chinois SMIC.
Les restrictions US sont-elles efficaces ?
Ce dernier avait évoqué des projets de passage à la gravure en 7 nm en 2020 mais s’était fait discret depuis la mise en place des verrous sur le marché des puces par les USA.
Huawei Mate 60 Pro
S’il reste bien des zones d’ombre sur les conditions de production de ce composant, il risque d’agir comme un électrochoc pour signaler que la Chine est capable dans une certaine mesure de produire des puces en gravure fine.
Pour certains analystes comme chez Jeffreries, cela pourrait conduire les Etats-Unis à mener une investigation et durcir encore les restrictions imposées au secteur des semi-conducteurs chinois, contribuant à renforcer les tensions existantes.
Un succès en trompe-l’oeil ?
Le blocage des exportations d’équipements de lithographie DUV, moins sensibles que les machines EUV permettant de graver très finement, reposait déjà sur la supposition que la Chine les utilisait au-delà de leurs limites de fonctionnement (jusqu’au 14 nm) pour produire des puces gravées en 7 nm, même si c’est sans doute à des rendements faibles et avec des coûts importants.
Avec une capacité de production vraisemblablement limitée à quelques millions de puces produites avec moins de 50% de rendement, cela resterait très loin des centaines de millions de composants produits en 7 nm par les grands fondeurs avec des rendements supérieurs de 90%, rappelle Reuters.
Néanmoins, le spectre d’une capacité de la Chine à produire ce type de puce malgré l’embargo large imposé par les Etats-Unis, même au prix fort et en gaspillant les ressources, risque bien d’induire une réaction en Occident, à l’heure où la Chine va déployer un nouveau fonds d’investissement doté de 40 milliards de dollars pour accélérer le développement d’équipements de gravure.