Le Parlement russe a adopté, mardi 30 juillet, deux projets de loi en lien avec les cryptomonnaies : le premier légalise le « minage » et le deuxième autorise, sous conditions, les paiements à des entreprises étrangères sous la forme de cryptoactifs. Le minage, c’est-à-dire la création de cryptoactifs, et les paiements en cryptomonnaies se situaient jusqu’à présent dans une zone grise du droit russe et étaient largement tolérés, malgré une interdiction de façade d’utiliser ces actifs pour le paiement de bien et services.
En janvier 2022, le FSB (service de sécurité intérieure) et la banque centrale russe avaient dit souhaiter une interdiction globale des cryptoactifs, citant respectivement des risques d’instabilité financière et d’utilisation par des « agents de l’étranger » – dont la presse d’opposition. Le mois suivant, pourtant, le gouvernement russe a annoncé à l’inverse son intention de largement légaliser, tout en l’encadrant, l’usage de ces outils. Sans que les raisons de ce revirement soient clairement exposées.
Les deux textes adoptés cette semaine établissent un cadre plutôt strict. Le premier crée un statut officiel pour les entreprises de minage, qui devront s’enregistrer auprès des autorités, déclarer chaque cryptoactif créé et qui seront supervisées par la banque centrale. Il leur est interdit de faire de la publicité ou de s’associer avec des entreprises du secteur de l’énergie, et elles devront, sur demande, fournir toutes les informations en leur possession au FSB comme à l’administration fiscale. Le second autorise, sous conditions, des entreprises à procéder à des paiements à l’étranger en cryptoactifs, après agrément de la Banque centrale.
Contournement des sanctions
Ce dernier point semble directement lié aux sanctions touchant de nombreuses entreprises russes, pour leur permettre de contourner les interdictions de paiement appliquées par les banques. L’efficacité de la mesure reste toutefois sujette à caution : les sanctions, notamment européennes, interdisent déjà aux sociétés d’accepter les paiements en cryptomonnaies s’ils sont liés à des entreprises du « complexe d’industrie et de défense russe ». Et le principal partenaire de la Russie pour le matériel de guerre, la Chine, interdit largement l’usage des cryptomonnaies.
Par ailleurs, si les transactions en cryptoactifs sont beaucoup plus difficiles à bloquer que les transactions bancaires, elles laissent aussi beaucoup plus de traces. Tous les paiements sont en effet enregistrés dans un registre public, la « blockchain », ce qui les rend difficiles à masquer ; les entreprises acceptant des paiements de la part d’entités russes sous sanction risqueraient d’être aisément identifiées.