C’est tout juste auréolé de son titre de voiture de l’année 2024 que le Renault Scénic électrique a abordé une étape clé de sa jeune carrière : les essais presse internationaux. Depuis quelques jours, le SUV au losange est mis à la disposition des journalistes du monde entier, au sud de l’Espagne, dans les environs de Malaga. C’est dans ce cadre, sublime, mais exigeant sur la route, que nous avons pu découvrir l’une des voitures électriques les plus attendues de l’année.
La cinquième génération de ce modèle né en 1996 marque donc un tournant majeur. L’ex-monospace roi qui a perdu de sa superbe au fil des ans, au point d’être momentanément abandonné, va renaître avec les codes d’un SUV mais surtout affublé d’une énorme batterie dans son plancher.
L’enjeu est colossal pour Renault. Fort du succès de sa Mégane électrique et en attendant l’incontournable R5 E-Tech, la firme au Losange a la possibilité de marquer cette année d’une pierre blanche en apparaissant comme le rival le plus crédible à Tesla sur le segment très prisé des SUV compacts. Le tout avec un véhicule made in France puisque le Scénic sort directement de la manufacture Ampère de Douai (Nord).
Une Renault aux allures de lionne
Le Scénic E-Tech est le premier projet de Renault mené de A à Z par son « nouveau » designer en chef, Gilles Vidal. Celui qui a opéré le virage stylistique de Peugeot au cours de la dernière décennie a été débauché par Renault pour insuffler un nouveau souffle à la marque française. Dire qu’il reprend quelques traits caractéristiques des voitures au Lion est un euphémisme et pourtant, grâce à des proportions originales et un joli travail sur ses formes, le SUV de Renault parvient à imposer son propre style.
Plus haut qu’une berline, mais bien plus bas qu’un SUV classique, le Scénic, comme la Mégane avant lui joue avec les codes traditionnels du crossover. De notre côté, nous avons particulièrement apprécié le travail réalisé au niveau de son bouclier et qui parvient à intégrer un nouveau logo surdimensionné.
Ce design soigné est ponctué de quelques fonctionnalités clés. Il en va ainsi du toit Solarbay, inauguré avec le Renault Rafale il y a quelques mois. Il s’agit d’un système qui remplace le toit panoramique classique par une technologie unique mise au point dans les laboratoires de Saint-Gobain. Concrètement, le toit du Scénic est composé d’un filtre PDLC (Polymer Dispersed Liquid Cristal) divisé en plusieurs segments. Le déplacement des molécules grâce à un champ électrique sur cette zone permet « d’allumer ou d’éteindre » chaque partie du toit. Concrètement, le conducteur est libre de décider quelle partie du toit sera opacifiée et laquelle laissera passer la lumière. Impressionnant techniquement, le procédé est évidemment une option (1 500 euros) sur ce modèle.
Un habitacle truffé de bonnes idées
Renault n’a pas fait de folie à l’intérieur de son Scénic, celui-ci reprenant une bonne partie de la planche de bord de Mégane E-Tech. On retrouve l’habituel OS OpenR Link qui n’est ni plus ni moins qu’une surcouche, certes travaillée, de Google Automotive articulée autour de deux écrans. Le premier au format paysage sert à l’instrumentation et s’avère tout à fait classique, le second en mode portrait comme sur les Tesla Model 3 se place au centre de la planche de bord. C’est lui qui servira de hub pour l’ensemble des réglages et l’accès aux médias. C’est aussi sur cet écran que la patte de Google est la plus visible puisqu’on retrouve très rapidement les habitudes qu’on peut avoir en tant que propriétaire d’un smartphone Android. À cet égard, le menu des paramètres est une parfaite illustration de la proximité entre les deux systèmes.
Nous ne nous attarderons pas plus avant sur le confort et la qualité de fabrication de l’habitacle du SUV de Renault, le constructeur étant parfaitement en accord avec les standards attendus à ce niveau. Le reste n’est que question de goût, mais on ne pourra pas reprocher à Renault d’avoir bâclé le travail. En revanche, en plus des habituels et nombreux rangements qui ont fait la réputation de l’ex-monospace en son temps, ce nouveau Scénic s’offre le luxe d’avoir une meilleure habitabilité que ses prédécesseurs. Comprenez par là qu’il a été pensé pour une famille avec deux adolescents et qu’il ne devrait pas décevoir sur ce point.
Revenons à présent sur le système OpenR et sur l’association entre Google et Renault qui illustre à quel point le Losange a bien pensé son véhicule et à quel point le travail avec son partenaire de Mountain View peut aboutir à des outils très utiles pour les propriétaires de voitures électriques.
En effet, deux fonctionnalités ont attiré notre attention lors de notre essai du Scénic E-Tech Electric. La première est à priori basique, il s’agit du widget autonomie qui peut être affiché sur l’écran d’instrumentation. Celui-ci peut indiquer la consommation moyenne, très simplement, ou peut être optimisé pour donner l’autonomie restante de la voiture. Jusque-là, rien d’extraordinaire, sauf que Renault a eu l’idée de proposer sur le même schéma non pas une mais deux valeurs d’autonomie. La première, la plus haute, indique le nombre de km restants si le parcours à venir est urbain, la seconde donne la même information, mais pour un itinéraire autoroutier. Comment le Scénic calcule-t-il cette information ? Il se base sur la consommation et le type de conduite au cours des derniers 70 km parcourus et applique cette formule à une consommation urbaine ou autoroutière selon deux scénarios étudiés. Le procédé est simplissime, mais le bénéfice pour l’utilisateur est considérable. Plus besoin de faire des calculs pour savoir à quelle vitesse sa batterie va « fondre » sur l’autoroute et si les kWh restants permettront de faire le reste du trajet. Gageons que cette excellente idée sera reprise par la concurrence.
L’autre fonctionnalité clé du Scénic, mais qui n’est pas exclusive à ce modèle, c’est son planificateur d’itinéraires. C’est sur ce point que l’intégration de Google Automotive fait la différence. Non seulement, l’outil de planification de trajet est efficace et pertinent, mais il est aussi personnalisable (il est possible d’y ajouter ses moyens de paiement pour filtrer les bornes de recharges compatibles) et réactif (un changement de trajet donne immédiatement lieu à une nouvelle proposition d’itinéraire). Google Automotive ayant directement accès aux données de la voiture, ses prévisions sont non seulement plus justes qu’une application telle que ABRP (A better routeplanner), mais elles sont aussi amenées à s’améliorer grâce aux mises à jour que le véhicule recevra dans le futur. C’est simple : avec son planificateur d’itinéraires, Renault fait aussi bien que Tesla, là où le californien est sans doute le meilleur.
Enfin, on apprécie également les efforts faits par Renault en termes de personnalisation des aides à la conduite, les fameux ADAS. Ceux-ci sont sont satisfaisants avec une autonomie de niveau 2 plutôt bien maîtrisée, mais ils sont surtout paramétrables. En effet, le SUV dispose d’un bouton de raccourci, le Safety Switch, qui permet de créer son système d’ADAS sur mesure et de le désactiver en un double clic.
Notre seul bémol concernant l’habitacle du nouveau Scénic électrique est à mettre sur le compte du rétroviseur caméra. Remplacer le miroir traditionnel par un écran relié à une caméra n’est pas nécessairement une mauvaise idée, encore faut-il qu’elle soit bien appliquée. Dans le cas du Scénic, comme dans celui de la Mégane électrique avant lui, la qualité de l’écran ainsi que sa faible luminosité ne couronnent pas ce choix de succès. Dès lors que l’ensoleillement est élevé, l’écran devient moins lisible. Fort heureusement, il s’agit d’une option, dispensable donc.
Sur la route, le Scénic est timide mais studieux
Scénic n’a jamais été synonyme de performances routières tonitruantes. Si le monospace de Renault à su durer dans le temps et imposer sa marque, c’est davantage grâce à sa praticité. L’arrivée de l’électrique et des qualités inhérentes à cette motorisation change-t-elle la donne sur cette nouvelle version ?
Sans nous séduire totalement, le Scénic E-Tech est parvenu à lever quelques doutes. Puissant, juste ce qu’il faut (160 kW, soit 220 ch), il en a assez sur la pédale pour s’extraire rapidement du trafic, doubler sereinement sur une route nationale ou encore procurer quelques sensations à l’accélération. Mais celles-ci n’ont pas grand-chose à voir avec le fameux « coup de pied aux fesses » que peuvent dispenser certaines électriques plus musclées. C’est un argument qui jouera certainement en sa défaveur au moment de la comparaison avec le Model Y ou la Peugeot e-3008.
Malgré cela, le Scénic parvient à rattraper le coup sur la conduite. Sa direction est précise, et son comportement assez surprenant dans les virages serrés. Bien entendu, il n’évite pas la prise de roulis, mais comment faire autrement lorsqu’on est taillé comme un petit SUV et qu’on traine quelques centaines de kilos de batteries dans son plancher ? Son poids, 1 730 ou 1890 kg selon la version parait finalement contenu lorsqu’on le compare à celui du Peugeot e-3008 (400 kg de plus tout de même), et ce n’est donc pas un hasard s’il nous parait plus agile sur la route que son concurrent frappé du lion, malgré un châssis qui ne fait pas de miracles.
Le freinage est aussi un élément distinctif sur le Scénic. Les ingénieurs de Renault ont travaillé à atténuer la sensation habituelle du frein électrique, dans l’optique sans doute de contenter davantage les inconditionnels du thermique. Dans cette volonté de séduction, l’intention est notable, mais pour notre part, nous avons également constaté que dans cette configuration, l’ABS a tendance à s’activer plus rapidement.
Autonomie : la cerise sur le gâteau
Avec une batterie de 87 kWh, l’autonomie est bien sûr au cœur de la proposition du Renault Scénic. C’est bien simple, à ce jour, aucun véhicule éligible au bonus écologique ne permet de dépasser 600 km d’autonomie. Le SUV de Renault, lui, affiche 625 km en une charge et toutes ses finitions (hors options) peuvent bénéficier du coup de pouce gouvernemental.
D’ailleurs, Renault, dans un élan de transparence n’hésite pas à donner quelques détails quant à la composition de son bloc batterie. Celui-ci serait constitué de 12 modules de 24 cellules chacun. L’avantage d’une telle architecture ? Les modules seraient plus facilement remplaçables dans l’un des 20 centres de maintenance spécialisés à travers l’Europe.
Le constructeur s’est également voulu complet sur deux autres aspects, la présence d’une pompe à chaleur de série, même sur la version la plus accessible, mais aussi l’intégration d’un système de pré-conditionnement de la batterie pour optimiser la charge rapide. Ce dernier devrait être obligatoire quel que soit le véhicule, mais il prend tout son sens sur le SUV de Renault dans la mesure où il fonctionne de pair avec l’excellent planificateur d’itinéraire. Autrement dit, la voiture est capable d’ajuster automatiquement la température de la batterie lorsque arrive le moment de la relier à une borne DC. En revanche, la présence de la pompe à chaleur est plus discutable. Son intérêt dépend surtout du climat, comprenez, elle sera plus utile au propriétaire de Scénic habitant à Chambéry qu’à son alter égo niçois.
Mais qu’en est-il vraiment sur la route ? La promesse des 600 km d’autonomie est-elle tenue ? Nos deux boucles d’essai de près de 300 km dans les environs de Malaga en Andalousie nous ont permis de constater une consommation moyenne oscillant entre 17 et 18 kWh/100 km. En extrapolant ces chiffres, nous arrivons à un total d’environ 370 km sur autoroute, ce qui ferait du Scénic E-Tech une routière électrique. En usage purement urbain, il nous semble même possible d’approcher les 600 km tant le SUV parvient à diminuer sa consommation dans cette configuration.
Si les températures étaient plutôt douces lors de notre périple, le trajet assez montagneux n’a pas toujours joué en faveur de notre SUV d’essai. En revanche, nous avons pu compter sur les palettes au volant pour jouer gaiement sur les quatre niveaux de freinage régénératif, bien dosés et progressifs. Mais un flou demeure : à ce jour, Renault ne propose pas de mode monopédale. Cette fonctionnalité devrait être déployée lors d’une mise à jour future, sans plus de précision. Dommage, ce mode est très adapté à la conduite en ville. Et c’est d’ailleurs là que le Scénic électrique s’avère le plus efficace. Non seulement son rayon de braquage de 10,9 m lui permet de se faufiler partout, mais en plus sa consommation baisse drastiquement et c’est sans doute là qu’il offrira les meilleures performances en autonomie. Quoi qu’il en soit, il ne s’agit que d’un aperçu de ce dont est capable le Scénic en matière d’autonomie. Assurément, ce premier essai du SUV électrique devra être suivi d’un second test, davantage centré sur sa consommation. Rendez-vous est pris.
Enfin, nous avons été rassurés de constater que sur Scénic, Renault n’est pas coupable de récidive. Contrairement à la Mégane E-Tech et à la future R5 électrique qui en étaient privés sur leur premier niveau de finition, le SUV au losange sera doté de recharge rapide dès l’entrée de gamme. Sur notre version d’essai, celle dotée de la batterie de 87 kWh, la puissance de recharge peut atteindre les 150 kW, ce qui situe le Scénic dans la moyenne basse de sa catégorie. Pour contrebalancer cette légère déception, Renault dit avoir particulièrement travaillé sur la courbe de recharge de sa dernière production. À vérifier là encore.
Pour la recharge plus classique, celle qui a lieu au domicile, sur le lieu de travail ou sur les bornes en ville, le Scénic fait dans le classique, avec du 7 kW. Toutefois, comme à son habitude, Renault propose la recharge AC en 22 kW, en option évidemment. Sur une batterie aussi conséquente, cette fonctionnalité pourrait être très appréciée des clients.
Le nouveau Scénic électrique face à la concurrence
Certes, lors de notre essai, nous n’avons pu rouler que dans la version la plus haut de gamme du prochain SUV au losange, mais c’est bien la version la plus accessible du Scénic E-Tech qui risque de faire parler d’elle. En effet, dans sa version de base, le dernier-né de Renault embarque un moteur de 125 kW (équivalent 170 ch et 280 Nm de couple) et une batterie, plus compacte, de 60 kWh. Celle-ci ne lui permet pas d’atteindre les généreux 600 km de la version la mieux dotée, mais elle autoriserait tout de même quelque 430 km en cycle WLTP. C’est cette version qui débute à 39 990 euros (35 990 euros avec le bonus écologique), et c’est elle également qui pourrait rencontrer le plus franc succès.
Toutefois, et c’est assez rare pour être souligné, grâce à un joli tour de passe-passe que nous vous avions révélé, Renault est parvenu à faire rentrer toutes ses versions dans le dispositif du bonus écologique. En conséquence, les cinq niveaux de finition du Scénic (hors options) bénéficieront de 4 000 euros de remise. C’est un argument de plus pour le SUV électrique de Renault qui dispose, comme nous l’avons vu, de nombreuses autres qualités. En ce sens, il nous semble dès à présent être l’un des seuls à pouvoir concurrencer le Tesla Model Y. Quant au duel tant attendu avec le Peugeot e-3008, il risque de tourner très largement en faveur du losange qui offre non seulement un meilleur rapport qualité/prix, mais aussi des performances sur route supérieures.
Verdict du test :
Seul véhicule sur le marché à bénéficier à la fois du bonus écologique (4 000 euros) et d’une autonomie supérieure à 600 km, le Renault Scénic E-Tech Electric pourrait être l’une des voitures de l’année. Le SUV de Renault n’est pas parfait bien-sûr et il devra convaincre par son design, mais il dispose de nombreux atouts et de quelques pépites, telles que son Widget autonomie ou son planificateur d’itinéraires. On lui reprochera simplement de ne pas avoir été plus ambitieux sur la vitesse de recharge et un peu timide côté puissance moteur. Pour le reste, c’est un quasi-sans-faute pour lancer une année qui, conjuguée à l’arrivée de la R5 électrique, pourrait être mémorable pour Renault.
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