Partout, l’expansion vertigineuse de TikTok, l’opacité de son algorithme et ses pratiques intrusives suscitent des polémiques qui débouchent sur des restrictions d’utilisation, voire des interdictions. Les reproches adressés à TikTok peuvent varier d’un Etat à l’autre, mais la controverse se cristallise essentiellement autour des menaces que l’application fait peser sur la sécurité nationale. Celles-ci peuvent être résumées en quatre points.
Premièrement, TikTok est accusé de recueillir les données privées – numéro de téléphone, localisation, informations financières ou encore adresse IP de ses utilisateurs. La direction de l’entreprise affirme que ces données ont pour seul but de faciliter le ciblage publicitaire et qu’elles ne sont en aucun cas envoyées à la maison mère chinoise ByteDance. Mais la fuite des enregistrements de plus de quatre-vingts réunions internes a montré que des employés de ByteDance basés en Chine avaient eu accès à ces données. Ces révélations infirment les déclarations faites sous serment par les dirigeants de TikTok.
Pour apaiser les craintes du gouvernement américain, la société chinoise a entrepris de faire en sorte que les données des utilisateurs basés aux Etats-Unis soient stockées uniquement dans le pays, c’est le projet Texas. Ces efforts sont toutefois peu convaincants dans la mesure où le stockage des données aux Etats-Unis ne peut garantir totalement que des employés de ByteDance en Chine n’y auront pas accès.
Mais cette menace doit être relativisée car la Chine a des moyens bien plus efficaces d’accéder à des informations à très haute valeur ajoutée. C’est ce qu’illustre le vol, en 2014, de 21,5 millions de fichiers de l’Office of Personnel Management des Etats-Unis contenant notamment les dossiers de cadres de la sécurité nationale…
Deuxièmement, ByteDance serait sous le contrôle du pouvoir chinois, ce que le PDG de TikTok a démenti lors de son audition devant la Chambre des représentants. Mais le système chinois n’assure pas de séparation nette entre l’Etat-parti et la société. Autrement dit, aucune entreprise n’est véritablement indépendante du pouvoir. Ce constat est confirmé par l’établissement depuis 2014 d’un cadre législatif imposant aux acteurs de la société chinoise de coopérer avec les services de renseignement.
Il est donc tout simplement impensable qu’une entreprise comme ByteDance puisse refuser de transmettre les informations en sa possession. Le fondateur de ByteDance, Zhang Yiming, en a du reste déjà fait l’amère expérience en 2018 : il avait alors été contraint de fermer deux de ses applications, jugées contraires aux valeurs du régime, et de faire son autocritique en rédigeant des excuses publiques.
Il vous reste 50.34% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.