Sous le regard brûlant d’un homme au dos orné d’ailes noires, un couple aux oreilles pointues valse au son des violoncelles. Alanguie sur un lit, une jeune fille détourne la tête d’un adonis au torse nu agenouillé devant elle. Munie d’un arc, une silhouette se faufile dans une forêt peuplée de créatures magiques… De ces séquences réalisées à l’aide de l’intelligence artificielle se dégage une forme d’érotisme particulier, une sorte de Cinquante Nuances de Grey au pays du Seigneur des anneaux.
Sur TikTok, ces courtes animations vidéo foisonnent sous le hasthag #acotar. Pour les inconditionnels, Acotar est l’acronyme de A Court of Thorns and Roses, série en cinq tomes publiée en 2015 par l’Américaine Sarah J. Maas. Traduite sous le titre Un palais d’épines et de roses (La Martinière jeunesse), la saga raconte l’histoire de Feyre, jeune chasseuse séquestrée à Prythian, royaume des fées, où elle tombera amoureuse d’un grand seigneur.
Fracassant succès de la littérature YA (pour Young Adult, « jeune adulte »), Acotar appartient à la « romantic fantasy » ou « romantasy » : un sous-genre de la fantasy, écrit principalement par des femmes pour des femmes, mêlant fantastique, amour et quête initiatique. Depuis la fin des années 2010, ce style a envahi les librairies, mais surtout les réseaux. Sur TikTok, on échange conseils pour fabriquer des ailes chatoyantes et filtres permettant de parer son visage de traits anguleux. Sur le forum r/acotar de Reddit ou le groupe Facebook privé all things Acotar, les lectrices partagent du fan art, analysent les arcs de leur personnage favori et spéculent sur la date de sortie des prochains livres. Parfois, l’une d’elles s’interroge : est-il pertinent de qualifier Acotar de « fairy porn » ?
Fairy porn ou fairy smut (« porno de fée ») est l’affectueux surnom donné par les fans de romantasy aux romans les plus « épicés ». Sur TikTok, les adeptes revendiquent l’étiquette et affichent leur amour du genre. Et il y en a pour tous les goûts, entre les romances slow burn (« combustion lente ») − expression consacrée pour qualifier les récits où les sentiments et l’attirance entre les personnages se construisent peu à peu − et celles régulièrement ponctuées de scènes graphiques caliente, à l’instar du Sang et la cendre (De Saxus, 2021), de Jennifer L. Armentrout, ou Fourth Wing (Hugo Roman, 440 pages, 21,50 euros), de Rebecca Yarros.
« C’est un monde où je peux tout avoir »
Il vous reste 65.64% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.