Cela avait tout de la fausse bonne idée. Le gouvernement coréen a investi plus de 800 millions de dollars dans un programme visant à produire des manuels scolaires et des documents éducatifs avec l’aide de l’IA générative. L’idée partait d’une bonne intention : personnaliser l’apprentissage en fonction des élèves, alléger la charge des enseignants et prévenir les risques de décrochage. Mais tout ne s’est pas passé comme espéré.
Le programme a été lancé début 2024 tambour battant, avec des éditeurs lancés dans une course contre la montre pour créer ces fameux manuels. Les premiers d’entre eux sont inaugurés de l’année suivante, dans trois matières : maths, anglais et informatique. Très rapidement, des erreurs factuelles sont débusquées dans les manuels par des enseignants et des parents, occasionnant une charge de travail supplémentaire pour les professeurs comme pour les élèves. Sans oublier les problèmes de confidentialité des données et la hausse du temps d’écran des enfants.
Erreurs factuelles, bugs, surcharge, défiance
Le bilan tiré l’été dernier sonne le glas. Il devenait clair que le développement du programme a été précipité. Le nouveau gouvernement, issu de la crise politique qui a secoué le pays début 2025 avec en point d’orgue la destitution du président Yoon Suk Yeol, revient sur la politique des manuels IA. Ils sont déchus de leur statut officiel et reclassés comme simples supports complémentaires. Chaque établissement est désormais libre de les adopter ou pas, durant une phase d’essai volontaire d’un an.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : le taux d’adoption dans les écoles passe de 37 % au premier trimestre, à 19 % seulement au début du second. À l’heure actuelle, un peu moins de 2 100 écoles les utiliseraient encore, c’est moitié moins qu’au printemps.
En plus des problèmes inhérents à l’IA générative (approximations, hallucinations) et du contexte politique explosif — Yoon Suk Yeol voulait en faire un marqueur de son action —, ces manuels ont été validés beaucoup trop vite par rapport aux supports de cours traditionnels. Beaucoup d’enseignants affirment que la qualité était médiocre et que le suivi du progrès des élèves en classe était difficile. D’autres y ont vu au contraire des outils utiles pour les élèves en difficulté, les enfants issus de familles multiculturelles ou les élèves handicapés, grâce à des fonctions ludiques et personnalisées.
L’affaire était suivie de près par de nombreux pays, les gouvernements pariant sur l’IA pour révolutionner l’apprentissage. Les grands acteurs de l’IA sont aux aguets, qui promeuvent agressivement leur technologie partout dans le monde. L’exemple coréen va peut-être refroidir certaines ardeurs ! Ou à tout le moins confirmer qu’il vaut mieux prendre son temps.
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Source :
Rest of World