Le grand blues des opérateurs télécoms, débordés par les Gafam

Le grand blues des opérateurs télécoms, débordés par les Gafam


« En fait, 46 % des PDG du secteur des télécommunications pensent que leur entreprise ne passera pas la décennie suivante. » Le 27 février 2023, seule sur la scène de la conférence d’ouverture du congrès mondial de la téléphonie mobile, le salon qui réunit chaque année à Barcelone (Espagne) l’industrie mondiale des télécoms, Christel Heydemann, la directrice générale d’Orange, glace l’assistance. Dans les rangs de l’amphithéâtre, chacun jette un œil inquiet à son voisin : qui des deux pourrait ne plus avoir l’occasion de fréquenter le salon catalan dans dix ans ?

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Télécoms : vers une nouvelle saison des mariages entre opérateurs en Europe ?

Extrait de l’étude annuelle du cabinet de conseil PwC sur le moral des patrons publiée en janvier à l’occasion du forum de Davos (Suisse), ce nombre-choc alarme sur l’état de santé du secteur des télécoms, confronté, selon Mme Heydemann, à des « vents contraires (…) peut-être jamais aussi importants ». La concurrence ? « Féroce », juge-t-elle. La réglementation ? « Parfois obsolète. » Les investissements ? « Massifs. Près de 600 milliards d’euros en Europe au cours de la dernière décennie ! », mais « difficiles à rentabiliser ». Le trafic de données ? « En croissance exponentielle et principalement concentré entre une poignée d’acteurs numériques. » Le tout avec des « consommateurs qui s’attendent à payer moins et à obtenir plus ».

« Je me demande vraiment si c’est ce que nous avions en tête il y a dix ans pour l’avenir de notre industrie européenne », a conclu à Barcelone la directrice générale d’Orange. En poste depuis avril 2022, après huit années chez Schneider Electric, Mme Heydemann sait bien qu’un industriel peut disparaître, aussi gros soit-il : au début des années 2010, elle a vécu de l’intérieur la chute d’Alcatel-Lucent, ancien leader mondial des télécoms, aujourd’hui dilué chez le finlandais Nokia.

Le spleen des « telcos »

Les opérateurs traînent leur spleen depuis longtemps. Cela fait des années que les « telcos » européens s’inquiètent de la faible croissance de leur chiffre d’affaires : 2 % en moyenne par an pour le secteur entre 2015 et 2020, selon le Digiworld Institute (anciennement Idate), think tank qui rassemble des opérateurs et des groupes du numérique.

D’où leur percée sur de nouveaux marchés, comme l’Afrique pour Orange, l’Amérique du Sud pour Telefonica et les Etats-Unis pour Deutsche Telekom, afin de remplacer les réserves d’abonnés qu’ils ont épuisées en Europe. D’où aussi leurs coûteuses tentatives de diversification dans d’autres métiers, comme les médias, souvent soldées par des échecs, parfois cuisants. La récente vente d’OCS par Orange à Canal+ marque d’ailleurs la fin de l’illusoire convergence entre tuyaux et contenus, élaborée au début des années 2000 par Jean-Marie Messier chez Vivendi Universal.

Il vous reste 75.97% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.