Oubliez Drive to Survive et la Formule 1 à la sauce Netflix. Le plus gros duel à venir dans l’automobile n’opposera pas Lewis Hamilton à Max Verstappen, mais Renault à Volkswagen. Celui-ci n’aura pas lieu à plus de 300 km/h, mais sur tout ce que l’Europe compte de marchés automobiles. Et il ne verra pas s’affronter deux bolides ultra-luxueux, mais deux compactes électriques prétendument abordables. Le match qui verra s’affronter la future Renault 5 électrique à la Volkswagen ID.2 promet de faire des étincelles, et pour cause, les deux prétendantes visent un segment très demandé et particulièrement pauvre en offres, celui des voitures électriques à moins de 25 000 euros.
Certes, le coup d’envoi officiel n’est pas prévu avant deux ans, date à laquelle l’ID.2 rejoindra sur le marché une R5 qui aura déjà quelques kilomètres au compteur. Dès lors, est-ce raisonnable de vouloir opposer deux véhicules qui ne sont toujours pas commercialisés ? Nous ne prétendons pas ici tirer des conclusions définitives, ni même désigner un quelconque vainqueur. Impossible d’ailleurs de juger d’une voiture sans être monté à bord et avoir parcouru quelques dizaines de kilomètres. Pour autant, nous disposons aujourd’hui d’un grand nombre d’informations, des design finaux ou quasi terminés de chacun des modèles et de la quasi-totalité des informations concernant leur base technique. Dès lors, il est tout à fait possible d’opposer l’ID.2 à la Renault sur tous ces points afin d’en dégager les premiers enseignements ou tendances qui seront confirmés (ou pas) lors de leur commercialisation. Voici donc, point par point, le duel entre les deux véhicules électriques à moins de 25 000 euros les plus attendus.
Design : aux antipodes
Le premier point de comparaison, le plus visible également, c’est l’aspect des deux voitures. En la matière, difficile de dire que l’un et l’autre constructeur auraient pu faire des choix plus opposés. Et pourtant, les deux compactes ont puisé leur inspiration au même endroit, dans le musée de leur constructeur respectif. Si la R5 électrique assume complètement le lien de parenté avec son illustre aînée, c’est un peu moins le cas de l’ID.2 qui reprend pourtant bien des détails esthétiques de la première version de la Golf. Là où le Losange assume avoir embrassé une stratégie néo-rétro (qui sera d’ailleurs poursuivie par la 4L électrique), l’Allemand se montre plus tempéré avec un véhicule qui allie subtilement les évocations d’un glorieux passé et une volonté de construire une nouvelle identité.
Mais plus que les lignes extérieures, c’est l’impression visuelle laissée par les deux modèles qui diffère. La R5 éveille directement la fibre nostalgique d’une partie de ses contemplateurs. Pour ceux qui auraient la mémoire plus courte (ou un âge moins avancé), elle montre tout de même davantage de caractère, évoque un comportement plus sportif et surtout une voiture qui pourrait être amusante à conduire. À l’inverse, le design passe-partout de l’ID.2 (qui pourrait légèrement évoluer par rapport au concept actuel) est on ne peut plus sage et policé.
Verdict : sur l’aspect design, sans doute le point d’achoppement le plus évident entre les deux modèles, notre préférence va à la compacte de Renault. Plus affirmée, plus travaillée, mais aussi plus espiègle, elle a tout de la voiture coup de cœur.
Équipement intérieur et système embarqué : duel impossible
Opposer l’ID.2 à la R5 sur l’habitacle ne sera pas aussi évident que pour le design extérieur. La raison ? On ne connaît qu’un seul intérieur des deux, celui de Volkswagen. En effet, alors que la compacte au Losange a été dévoilée depuis plus d’un an déjà, son habitacle reste secret. Certaines indiscrétions font état de la présence d’un double écran ainsi que de nombreux clins d’œil à la R5 d’antan, mais pour l’instant, aucune image n’a été montrée.
À l’inverse, l’habitacle de l’ID.2 est déjà connu et, sans surprise, il est aussi lisse que sa robe extérieure. Pour autant, la présence d’un double écran composé d’un affichage de 10,9 pouces pour l’instrumentation et d’une dalle de 12,9 pouces pour la partie centrale est le signe que VW ne compte pas négliger la qualité intérieure de sa voiture.
Enfin, on ne saurait confronter les deux véhicules sans parler de leur environnement logiciel. Sur ce point, Renault fait preuve d’une avance considérable puisqu’il semble déjà acquis que la R5 tournera sous Android, comme l’actuelle Mégane électrique. L’adoption du système de Google a été particulièrement bien réalisé par les ingénieurs de Renault qui ont su à la fois s’appuyer sur une base applicative efficace tout en soignant leur surcouche logicielle.
À l’opposé, depuis l’arrivée de son dernier système sur la Golf de 8ᵉ génération, puis l’ID.3, Volkswagen souffre de soucis logiciels récurrents. Le constructeur a promis de corriger certaines erreurs, notamment le recours au tout tactile sans attendre l’ID.2. De fait, cette dernière devrait profiter de ce réexamen. D’ailleurs, sur l’image dévoilée par VW, il est possible d’observer l’arrivée d’un nouvel OS, très différent de ce que la marque propose actuellement.
Verdict : faute d’éléments disponibles, il est impossible de départager les deux concurrents sur ce point. Le retard de VW en matière d’OS semble considérable à l’heure actuelle, mais le constructeur allemand pourrait surprendre en faisant jouer son savoir-faire reconnu en matière d’intérieurs.
Moteur et performances : l’autre grand clivage
Cette différence est assurément moins visible, mais non moins importante. Les deux véhicules ont fait des choix radicalement différents en termes de développement. La Renault 5 électrique, ou Renault 5 E-Tech (le nom définitif n’est pas encore connu), s’appuiera sur la plate-forme CMF-B EV, autrement dit une base technique de voiture thermique adaptée à l’électrique. C’est elle qui est à l’origine de la Clio, mais aussi de la Zoé et de la Twingo ZE.
Volkswagen non plus n’a pas développé de plate-forme à son électrique d’entrée de gamme. Dans la même approche qui consiste à réaliser des économies d’échelle et à miser sur le partage de composants pour réduire les coûts de production, VW a ressorti sa bonne vieille MEB. Celle-ci a été adaptée, pour l’occasion, en MEB Entry, c’est-à-dire qu’elle a été quelque peu raccourcie et qu’elle a transféré la partie motrice à l’avant. En conséquence, l’ID.2, mais aussi l’ID.1 seront des voitures électriques à traction, là où la R5, comme la plupart des voitures zéro émission actuelles, reposent sur un moteur à propulsion. Mais la grande différence dans ce choix a priori similaire, c’est que MEB est une plateforme dédiée à l’électrique et présentant des avantages conséquents auxquels Renault va avoir du mal à répondre.
Le premier concerne l’habitabilité à bord. Dans une plate-forme dédiée à l’électrique, il n’est pas nécessaire d’allouer de la place à des composants indispensables à une version thermique. En conséquence, l’ID.2 profitera d’un coffre XXL compte tenu de son petit gabarit (440 L), ainsi que d’une trappe de 50 L située sous la banquette, pour le rangement des câbles de recharge. La R5, elle, sera nettement moins spacieuse à bord.
L’autre pendant du choix de la plate-forme CMF-B EV, pour Renault, c’est qu’elle limite son choix en matière de moteur. La compacte de Renault devra probablement reprendre le bloc 100 kW de l’actuelle Zoé R135 pour une puissance de 136 ch. Une autre version de la la R5 est envisagée, mais sa puissance ne devrait pas dépasser les 150 ch. À l’opposé, l’ID.2 paraît nettement plus musclée. Son moteur a beau être déporté à l’avant, il n’en demeure pas moins impressionnant pour une petite compacte. Ses 166 kW (ou 226 ch) devraient lui donner un avantage considérable sur sa rivale en matière de performances.
Verdict : le premier coup d’œil à la fiche technique est assurément en faveur de la compacte allemande. Le choix de la plate-forme MEB Entry pour l’ID.2 devrait donner un avantage considérable à VW tant du point de vue de l’habitabilité que des performances.
Autonomie : 50 km les séparent
Le choix de la plate-forme définissant les capacités maximales des batteries, Renault se retrouve une fois encore limité par l’utilisation de sa traditionnelle CMF-B EV, initialement prévue pour la Clio thermique, rappelons-le. Le constructeur français n’a pas encore communiqué sur les valeurs de ses accumulateurs, mais il a expliqué qu’il proposera deux niveaux de batteries et une autonomie maximale de 400 km, ce qu’il estime suffisant pour une citadine.
Sur la version raccourcie de la plate-forme MEB, Volkswagen dispose d’un peu plus de place et devrait s’approcher des 50 kWh avec sa batterie. En conséquence, le rayon d’action de l’ID.2 est estimé à 450 km, ce qui est malgré tout assez proche de ce que proposera la R5. En revanche, le constructeur de Wolfsbourg a déjà annoncé qu’il serait très compétitif sur la vitesse de recharge rapide. Il promet un « plein » de 10 à 80 % de la batterie en 20 mn environ, sans plus de précision.
Côté Renault, nous ne sommes pas encore à ce niveau de détail, mais le constructeur a déjà fait par le passé des choix très curieux en la matière (notamment sur la Mégane E-Tech), qu’il devra sans doute éviter à l’avenir. Néanmoins, le constructeur français s’est associé avec le CEA afin de développer le futur chargeur de ses voitures électriques. Celui-ci devrait être prêt pour la R5.
Verdict : sur l’autonomie, le choix initial d’une plate-forme dédiée à l’électrique donne un avantage intéressant à l’ID.2, mais pas rédhibitoire. Si la promesse des 400 km est tenue par Renault, et si la partie recharge suit, cette valeur devrait suffire à la très grande majorité des usages.
Quelle version de chaque voiture à 25 000 euros ?
Voilà finalement la question centrale de ce duel. Comme souvent, en amont des lancements officiels de leurs voitures, les constructeurs ne donnent que les valeurs maximales de leurs fiches techniques. Autrement dit, les informations dont nous disposons à l’heure actuelle, sur la puissance des moteurs, sur la capacité des batteries et même sur l’équipement intérieur sont celles qui correspondront aux versions les plus hauts de gamme des deux modèles… et donc pas celles à moins de 25 000 euros.
Comme souvent, il faudra voir quels sont les compromis proposés pour faire baisser le tarif à ce niveau. Il paraît évident, par exemple, que les versions à moins de 25 000 euros disposeront d’une batterie de capacité inférieure et que leur rayon d’action se situera davantage autour des 300 km. Pour autant, l’ID.2 comme la R5 E-Tech devraient offrir une proposition très rare sur le marché puisqu’il n’y a qu’un seul modèle en vente actuellement à offrir des caractéristiques à peu près similaires, la MG4 dans sa version Standard.
Verdict du duel
Bien qu’il soit beaucoup trop tôt pour désigner un potentiel vainqueur, plusieurs certitudes apparaissent au terme de cette première comparaison. D’une part, il semble acquis que le match sera bouillant (pour ne pas dire électrique) entre les deux rivales et qu’elles ont en effet toutes les raisons d’être opposées. Mais plus intéressant encore, ce qui semble être le point fort de l’une apparaît souvent comme une faiblesse chez la seconde et inversement. La R5 misera sur son look agréable, original et engagé, mais aura sans doute à faire face à un déficit technique par rapport à l’ID.2. À l’inverse, la compacte allemande tentera de faire oublier son manque d’audace par une fiche technique bien plus ambitieuse. Rendez-vous donc en 2025 pour un duel en bonne et due forme.