L’ADN (Acide désoxyribonucléique) code l’ensemble des informations concernant les êtres vivants et fournit de nombreuses informations sur l’évolution des espèces. Mais les éléments qui le constituent sont relativement fragiles et se dégradent vite à l’air libre, même s’ils peuvent déjà constituer un support de stockage prometteur et durable pour l’informatique.
Dans certaines circonstances, l’ADN peut être conservé plus longtemps lorsqu’il se trouve enfermé et protégé des influences extérieures. Toutefois, les scientifiques estimaient jusqu’à présent que 1 million d’années correspondait à la limite de « survie » de la substance dans la nature. Beaucoup trop court pour espérer récupérer un jour un ADN de dinosaure mais assez pour en extraire sur des dents de mammouth sibérien, qui constituait jusque-là l’ADN prélevé le plus ancien.
Quand les mastodontes batifolaient au Groenland…
Une découverte réalisée au Groenland et publiée dans le journal Nature révèle tout de même qu’un ADN peut résister beaucoup plus longtemps qu’estimé. Des sédiments prélevés dans le sol et les falaises anciennes de l’Arctique ont permis de mettre au jour des traces génétiques vieilles de 2 millions d’années, constituant un nouveau record et apportant de précieuses informations sur la vie animale et la flore présentes dans cette zone en ces temps reculés.
L’étude révèle notamment la présence de mastodontes, ces grands cousins de l’éléphant encore présents en Amérique du Nord il y a 10 000 ans et disparus depuis, ce qui suggère que le Groenland était couvert de vastes forêts il y a deux millions d’années, méritant sa traduction de « terre verte ».
C’est une surprise dans la mesure où aucun fossile de mastodonte n’a été trouvé au Groenland et un signe indiquant que les animaux ont sans doute réussi à coloniser l’île depuis le continent américain.
Le permafrost, congélateur naturel
C’est le permafrost, ce sol continuellement gelé, qui permet de réaliser de telles découvertes d’ADN très ancien en emprisonnant en congelant les sédiments et les fragments d’ADN, mais son âge même (un peu plus de 2 millions d’années) suggère qu’il ne sera guère possible de trouver des traces génétiques encore plus âgées…à moins que nos connaissances évoluent encore d’ici là.
La découverte apporte aussi des informations sur le climat local et les variations que la zone géographique a connu, avec l’adaptation régulière des espèces sur place et migrantes, faisant aussi apparaître des rennes, des lièvres et une grande variété de végétaux.
Cette portion du Groenland était donc plutôt à l’époque une zone tempérée avec des températures de 11 à 17 degrés et toujours les longues période de présence ou d’absence de soleil.
Le permafrost est sous haute surveillance par les scientifiques. Sa fonte rapide provoquée par le réchauffement climatique relargue de grandes quantités de gaz à effet de serre jusque-là piégés dans le sol gelé et qui peuvent accélérer les mécanismes de changement climatique.
L’inquiétude porte également sur le possible réveil de pathogènes anciens. La réactivation d’un « virus zombie » vieux de 48 500 ans confirment cette possibilité, même si rien ne dit qu’il survivrait longtemps dans les conditions climatiques actuelles.