NEO, le robot qui fait vos corvées pour 17 000 euros ? Pas si vite. Derrière la promesse se cache une réalité où l’humain tire encore les ficelles.
La tech nous a habitué aux promesses grandioses. Après les voitures autonomes qui ne le sont pas vraiment et les IA qui réinventent le plagiat, voici NEO, le robot humanoïde de la startup 1X Technologies. Sur le papier, c’est une révolution : un assistant domestique capable de faire vos corvées, de plier le linge et de vous libérer du temps. Le tout pour la modique somme de 20 000 dollars à l’achat (environ 17 000 euros), ou 499 dollars (environ 430 euros) par mois en abonnement, avec des livraisons prévues dès 2026.
Derrière les vidéos promotionnelles léchées se cache pourtant une réalité bien moins autonome. Et c’est là que le bât blesse.
La douche froide : des démos spectaculaires, mais pilotées par l’homme
Depuis l’annonce par 1X Technologies, les vidéos impressionnantes font le tour de la toile et des réseaux sociaux. NEO porte des cartons, danse, range des affaires, passe l’aspirateur, lance une machine, fais la vaisselle et prépare même à manger. La réalité rattrape la science-fiction et c’est bluffant. Le problème, c’est qu’elles vendent en grande partie une illusion d’autonomie.
Pour être très clair sur la réalité du produit, le fossé entre la promesse et ce qui a été démontré publiquement est immense. Lors de la seule démo médiatique d’envergure accordée au Wall Street Journal fin octobre, 100 % des actions du robot étaient contrôlées à distance par un technicien équipé d’un casque VR.
Même dans la propre communication de 1X, les seules actions véritables autonomes montrées à ce jour sont très basiques : ouvrir une porte sur commande, se diriger vers une personne ou saisir un gobelet vide. On est loin, très loin, de l’assistant polyvalent qui gère la maison de A à Z.
Une fiche technique impressionnante pour masquer le vide logiciel ?
Il faut le reconnaître, la prouesse matérielle de 1X est indéniable. Neo est un concentré de technologie pensé pour le foyer. Du haut de son 1,67 m pour seulement 30 kg, il est étonnamment léger et silencieux, opérant à 22 dB, soit moins qu’un réfrigérateur moderne. Son corps « mou », fait d’un polymère en treillis 3D et recouvert d’une combinaison lavable, est conçu pour être sûr au contact.

Côté performances, il peut soulever jusqu’à 70 kg et transporter 25 kg, le tout avec une autonomie de 4 heures et une charge rapide. Son cerveau, le « 1X Cortex », est basé sur la puce NVIDIA Jetson Thor, et il perçoit le monde via deux caméras 8 Mpx et quatre microphones. Ses mains, dotées de 22 degrés de liberté, promettent une dextérité quasi humaine. Un matériel de pointe qui rend le manque d’autonomie logicielle encore plus flagrant.
Le « Mode Expert » : un humain dans votre salon, via le robot
Pour transformer Neo en véritable robot domestique capable de faire toutes vos corvées, 1X a intégré une fonctionnalité aussi ingénieuse qu’inquiétante : le « Mode Expert ». Concrètement, si vous demandez à Neo une tâche qu’il ne maîtrise pas, un opérateur humain qualifié chez 1X peut prendre le contrôle du robot à distance, via un casque de réalité virtuelle, pour accomplir la mission à sa place. C’est une double victoire pour la startup : le client est satisfait et l’entreprise récupère de précieuses données pour entraîner son intelligence artificielle. En revanche, c’est une défaite pour votre vie privée.

Car oui, cela signifie qu’un employé de l’entreprise peut voir et entendre tout ce qui se passe chez vous, à travers les yeux et les oreilles de votre robot à 20 000 dollars. Le PDG de 1X, Bernt Børnich, parle d’un « contrat social » à accepter : « Si nous n’avons pas vos données, nous ne pouvons pas améliorer le produit ». Une logique implacable pour un ingénieur, mais potentiellement terrifiante pour un consommateur. 1X assure que des garde-fous existent (session à programmer, indicateurs lumineux), mais la question demeure : êtes-vous prêt à laisser un inconnu piloter un robot dans votre salon pour qu’il apprenne à plier correctement vos chaussettes ?
Vendre le futur : un symptôme de la tech moderne ?
Le cas de Neo est symptomatique d’une tendance de fond dans le tech, celle de vendre le futur avant même d’avoir maîtrisé le présent. On l’a vu récemment avec l’AI Pin, vendu comme le remplaçant du smartphone avant de s’avérer quasi inutilisable. On le voit aussi avec les promesses d’IA « générales » qui peinent encore avec des requêtes basiques.
Cette stratégie du « fake it until you make it » (fais semblant jusqu’à ce que ça marche) pose un vrai problème de confiance. En présentant des démonstrations contrôlées à distance comme le pinacle de l’autonomie, 1X ne vend pas un produit, mais une vision. Une vision financée par les précommandes de clients qui risquent de déchanter en découvrant les capacités réelles de leur achat.

Soyons néanmoins honnêtes, la prouesse matérielle de 1X est indéniable. Le robot NEO est léger, silencieux, et sa conception « molle » le rend intrinsèquement plus sûr que les robots industriels rigides. Mais un robot domestique n’est pas qu’une belle mécanique, c’est avant tout une intelligence.
Pour l’instant, l’intelligence de Neo est largement humaine, déportée dans les locaux de 1X. Acheter un Neo aujourd’hui, ce n’est pas acquérir un assistant autonome. C’est payer très cher pour participer à une phase de bêta-test géante, en fournissant à l’entreprise l’accès le plus intime qui soit : votre foyer.
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Source :
PCMag