Les snateurs ont adopt mercredi une disposition controverse du projet de loi Justice du gouvernement, qui prvoit d’allumer les micros et camras de tlphone distance, dans le cadre d’affaires de terrorisme, de dlinquance ou de crime organis, malgr lopposition de la gauche. Larticle 3 du projet de loi du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, examin en premire lecture par les snateurs, apporte plusieurs modifications la procdure pnale.
La proposition de loi a suscit lopposition des groupes de gauche et du centre, qui ont dnonc une atteinte disproportionne la vie prive et aux liberts fondamentales. Ils ont galement soulign les risques de dtournement ou de piratage des donnes collectes.
Le Snat a adopt en premire lecture, mercredi 8 juin 2023, une proposition de loi visant renforcer les moyens de lutte contre le terrorisme et le cyberespionnage. Ce texte, port par le groupe Les Rpublicains, autorise notamment les services de renseignement activer distance les camras ou les micros des tlphones portables ou des ordinateurs des personnes suspectes de menacer la scurit nationale.
Cette mesure est autorise pour les enquteurs, soit pour golocaliser une personne, soit pour raliser des captations de sons et dimages (des coutes). La golocalisation est autorise sur requte du procureur de la Rpublique, ou du juge dinstruction, pour des affaires relatives un crime ou un dlit puni dau moins dix ans demprisonnement, tandis que les coutes pourront tre autorises par un juge dans des enqutes relevant du terrorisme ou du crime organis. Dans le texte initial, cette procdure concernait les infractions punies dau moins 5 ans de prison mais un amendement du prsident du groupe LR, Bruno Retailleau, llevant 10 ans a t adopte en sance.
La gauche a tent sans succs de supprimer totalement ou partiellement des dispositions juges disproportionnes. Latteinte est particulirement grave car la captation concerne aussi des personnes tierces. Le suspect va prendre son portable dans le mtro. Toutes les conversations autour seront alors captes. Pareil, sil va au restaurant. Toute conversation dans lespace public est alors sous coute , a object le snateur cologiste, Guy Benarroche en dfendant un amendement de suppression de ces dispositions. C’est la porte ouverte une surveillance gnralise, a-t-il affirm.
Malgr les protestations de la gauche contre un risque dcoute gnralis, la majorit snatoriale a simplement souhait encadrer le dispositif. La proposition de la snatrice cologiste Mlanie Vogel dinterdire explicitement ces coutes pour les journalistes, les mdecins, notaires et huissiers na pas t retenue. La rapporteure LR Agns Canayer a prfr se baser sur la rdaction initiale qui protgeait les lieux comme les cabinets mdicaux, les entreprises de presse ou les tudes de notaires et des huissiers, et ltendre aux personnes travaillant dans ces lieux protgs ainsi qu leur domicile.
Le garde des Sceaux, ric Dupond-Moretti a tent de rpondre ce quil a qualifi de cris dorfraie en rappelant que ces techniques taient dj autorises : les forces de lordre utilisent dj des techniques de surveillance et de mise sur coute, comme la pose de balises sous une voiture ou de mouchards sur les suspects par exemple. Mais la crainte dattirer lattention des dlinquants faisant lobjet denqute pour des faits de criminalit organise, de rvler la stratgie tablie ou tout simplement parce quelle exposerait la vie des agents charge de cette mission justifie la mise en place de ces nouveaux outils, selon le ministre de la Justice.
Ils sont par ailleurs entours de garanties importantes , a par ailleurs assur le ministre, ric Dupond-Moretti. Lide est de faire prendre le moins de risques possibles aux officiers de police judiciaire, de les protger , a-t-il argument. On semble dcouvrir la lune a-t-il ajout. Le ministre a galement rappel que ces techniques taient subordonnes lautorisation dun juge.
Une atteinte disproportionne la vie prive ?
Dans un communiqu publi le 31 mai, lObservatoire des liberts et du numrique (ONL) avait qualifi cet article 3 de surenchre scuritaire du gouvernement permettant de transformer tout objet connect en potentiel mouchard . En effet, selon lONL, tous les objets numriques disposant dun micro, dune camra ou de capteurs de localisation pourraient tre pirats , en citant par exemple les baby phone, les assistants vocaux, les GPS dune voiture ou dune montre connecte.
La mthode de piratage est elle-mme pointe du doigt. Les enquteurs se serviront des failles de scurit des appareils , explique Bastien Le Querrec, juriste La Quadrature du Net, membre de lONL. Alors que le gouvernement devrait chercher les corriger pour protger les utilisateurs, il va les utiliser dans le cadre de ces enqutes, et entretenir ainsi ces vulnrabilits , abonde-t-il, tout en dnonant une nouvelle forme de surveillance inquitante, totalement disproportionne .
Sources : Senat, Observatoire des liberts et du numrique
Et vous ?
Que pensez-vous de la proposition de loi autorisant lactivation distance des camras ou des micros des tlphones ?
tes-vous favorable ou oppos ce dispositif ?
Selon vous, cette mesure est-elle efficace pour lutter contre le terrorisme et le cyberespionnage ?
Craignez-vous que cette mesure porte atteinte votre vie prive ou vos donnes personnelles ?
Pensez-vous que cette mesure respecte le droit europen et le principe de subsidiarit (qui permet aux tats membres de lUnion europenne de prendre des mesures adaptes leur situation spcifique) ?