Le techno discernement seul recours pour maîtriser l’impact de la …

Le techno discernement seul recours pour maîtriser l’impact de la ...



Grand-messe de l’écosystème Data et de l’IA, le salon Big Data & AI Paris 2024 se tenait au Parc des expositions les 15 et 16 octobre.

Tous les géants mondiaux de la tech étaient présents pour promouvoir les progrès réalisés dans le secteur de la GenAI.

Une voix dissonante, au moins, s’est fait entendre à cette occasion, celle de Fabrice Bonnifet, le directeur Développement Durable & QSE du Groupe Bouygues. Le titre de son intervention : “L’IA soutenable est-il un oxymore ?”

Mini-centrales nucléaires pour les datacenters, une fausse piste

Sans arbitrage des usages, la réponse à cette question est probablement positive. Pour étayer ce constat, Fabrice Bonnifet signale notamment que l’électricité alimentant aujourd’hui l’IA repose à plus de 70% sur les énergies fossiles.

En outre, cette consommation progresse fortement. Elle devrait ainsi atteindre 4% de la consommation mondiale d’électricité en 2026. Pour répondre à cette problématique, plusieurs géants du numérique ont annoncé leur volonté de s’équiper de mini-centrales nucléaires.

Leur argument pour justifier ces investissements : se doter d’une énergie décarbonée. Est-ce la priorité de notre temps ? s’interroge le dirigeant de Bouygues, qui rappelle que dans le même temps 800 millions de personnes ne disposent pas de l’électricité – à 35% générée par du charbon.

Une hausse de la consommation « insoutenable »

Encore une fois, la forme interrogative semble avant tout rhétorique. Fabrice Bonnifet cible en particulier dans son réquisitoire la consommation induite par certains usages de l’IA générative, dont ses “mésusages.”

“La multiplication des cas d’usage, et surtout de mésusage de l’IA, ira plus vite que les baisses de sa consommation”, met-il en garde. Or, les externalités négatives actuelles devraient déjà encourager à prendre des mesures.

Ces externalités ne concernent pas exclusivement la consommation d’énergie. S’y ajoutent celles de ressources non renouvelables, dont le cuivre. “L’IA va nécessiter pas moins de 1 million de tonnes de cuivre supplémentaires par an (…) C’est tout simplement insoutenable”, considère Fabrice Bonnifet.

Le vrai défi : baisser l’empreinte carbone de l’humanité

Le cadre de Bouygues ne nie pas les bénéfices permis par l’IA, par exemple dans le domaine de la santé et au profit de “l’amélioration de nombre de procédés dans quasiment toutes les industries”. Mais le “meilleur de l’IA” ne doit pas occulter “le pire”.

“Sans régulation forte, c’est souvent, et assurément dans le pire qu’elle sera la meilleure”, anticipe Fabrice Bonnifet. Selon lui, “l’unique défi” est de “baisser l’empreinte carbone de l’humanité de 5% par an en absolu, tous scopes confondus”, et ce “quelle que soit la progression du PIB des États ou du chiffre d’affaires des entreprises.”

Le numérique doit être contributeur de cette baisse, exhorte ainsi Fabrice Bonnifet. Et sa contribution, estime-t-il, ne réside pas dans la décarbonation de l’IA, mais dans le choix des usages de la GenAI. Éthique et sens s’imposent par conséquent dans les colloques et les entreprises au moment des choix.

Caper la conso des datacenters et techno-discernement

Le patron RSE de l’entreprise française propose aux “16 géants du secteur” de s’entendre ensemble sur un “usage raisonné” de l’IA et d’accepter « de limiter la consommation énergétique de leurs datacenters”. Ce scénario, Fabrice Bonnifet le juge lui-même peu probable.

Quant à l’intervention, ou plutôt le “réveil”, des gendarmes du numérique, elle est qualifiée de “pari très risqué”. Motif avancé ? “L’histoire montre que la régulation arrive trop tard.”

La seule alternative crédible consisterait dès lors à “résister à la tentation du mésusage de l’IA et à faire preuve de techno-discernement”. Et si la tentation devait in fine être la plus forte ?

Alors, “les géants du numérique et tous leurs affidés” se retrouveront sur “le banc des responsables de l’accélération de l’effondrement civilisationnel, moral et écologique, qui a déjà commencé.” La place est peu enviable certes, mais l’argument peut-il porter ?



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