Le bâtiment habillé d’un bardage en bois donne sur la campagne solognote, à quelques kilomètres de Vierzon (Cher). Dans les ateliers, les équipes locales assemblent, testent, personnalisent et emballent par centaines des Nano et des Stax, les deux produits phares de Ledger, propriétaire du site installé en 2018.
Vierzon est ainsi devenue, avec Paris, Londres et Singapour, l’une des bases mondiales de Ledger, premier employeur du secteur français des cryptoactifs avec plus de 600 salariés et licorne (start-up valorisée plus de 1 milliard de dollars, soit environ 919 millions d’euros) de la French Tech, avec une valorisation de 1,3 milliard d’euros, lors de sa dernière levée de fonds, en 2023.
Un minichoc des cultures pour cette ville de 27 000 habitants meurtrie, dans les années 1990, par la fermeture successive de deux grands employeurs industriels, le constructeur d’engins de travaux publics Case et le fabricant de batteries Fulmen.
Aujourd’hui, ses liens avec Ledger l’incitent à miser sur le développement du numérique : la présence de l’entreprise et l’implication de l’un de ses cofondateurs, Eric Larchevêque, visage connu de l’émission télévisée « Qui veut être mon associé ? » et Vierzonnais d’origine, ont facilité l’installation d’une école d’informatique, d’une antenne du Centre national des arts et métiers et d’un incubateur de start-up sous l’architecture Eiffel de l’ancienne usine Case.
« Ledger a validé l’intérêt du numérique sur notre territoire », se félicite Fabien Bernagout, vice-président de la communauté de communes Vierzon-Sologne-Berry, chargé de l’innovation, de la recherche et du numérique. « C’est quand même une entreprise de cryptos qui s’est installée dans une ville à gestion communiste ! »
« La propriété privée est la base de la démocratie »
Vierzon ne s’est pas encore transformée en mini-Silicon Valley, mais le grand magasin d’ameublement de la rue des Ponts accepte les paiements en bitcoins, et la commune dispose de l’une des plus grandes stations de recharge Tesla de France.
Fondée en 2014, Ledger est numéro un mondial des wallets (« portefeuilles »), de petits appareils électroniques qui jouent le rôle de coffre-fort pour les actifs numériques, afin de permettre aux détenteurs de cryptos de conserver eux-mêmes leurs avoirs, sans dépendre d’une plate-forme telle que Binance, Coinbase ou Bitpanda.
« Pour moi, la propriété privée est la base de la démocratie et de la liberté. En tout cas, la possibilité de déléguer la propriété à un tiers doit rester un choix », explique Pascal Gauthier, PDG de l’entreprise. Ce modèle n’a pas de mal à convaincre les partisans des cryptoactifs, développés dans une logique de décentralisation de la finance, après la crise financière de 2008. Mais il exige une sécurité maximale, afin de prévenir tout risque de piratage des données et de vol actifs stockés.
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