Apple se penche progressivement sur les applications ayant recours à ChatGPT. Sur son App Store, l’entreprise impose une limite d’âge aux apps boostées par l’IA, mais tous les développeurs ne respectent pas encore les règles…
Apple vient de rejeter la dernière mise à jour de l’application BlueMail sur l’App Store, rapporte le Wall Street Journal. Pour justifier son refus, le géant de Cupertino pointe du doigt les nouveautés intégrées par Blix, la firme derrière BlueMail. La dernière mise à jour de BlueMail ajoute en effet des fonctionnalités reposant sur GPT-3, le modèle de langage derrière ChatGPT, au client mail.
Grâce au modèle linguistique d’OpenAI, l’application propose à ses utilisateurs un système de « courrier électronique génératif » baptisé BlueMail GEM AI. Concrètement, l’intelligence artificielle va aider l’usager à écrire « des e-mails à partir de zéro ».
« L’utilisateur peut économiser du temps et des efforts tout en s’assurant que son e-mail est bien écrit », explique Blix sur son site web officiel.
Pour ça, l’application va se baser sur des critères définis au préalable par l’internaute, comme la tonalité du texte, le contenu d’e-mails précédents et des événements trouvés dans le calendrier. BlueMail est aussi capable de « suggérer des réponses en fonction du contexte » et de produire des « résumés condensés de longs e-mails ».
« En analysant le contenu de l’e-mail, les algorithmes peuvent fournir des suggestions intelligentes qui peuvent aider l’utilisateur à créer un message plus efficace et plus convaincant », fait valoir Blix.
Comme Microsoft l’a fait avec Bing, Blix s’est appuyé sur le modèle GPT-3 d’OpenAI pour mettre au point sa propre version personnalisée de ChatGPT, taillée pour des besoins précis.
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Une limite d’âge pour les apps boostées par ChatGPT
C’est pourquoi Apple a décidé de bloquer la mise à jour. L’entreprise californienne redoute que les fonctionnalités basées sur ChatGPT ne représentent un danger pour les mineurs d’âge. D’après Apple, le modèle linguistique risque de produire du texte inapproprié pour les plus jeunes, malgré le filtre de contenus intégré par Blix.
Avant d’autoriser la mise à jour, l’entreprise californienne exige donc que Blix modifie l’âge minimum requis pour l’utiliser BlueMail. Actuellement, l’application est disponible à partir de quatre ans sur l’App Store. Apple souhaite que l’âge limite soit fixé à 17 ans.
Les applications réservées aux 17 ans et plus peuvent inclure du langage offensant, des contenus connotés sexuellement et des références à la drogue. Si Blix refuse de réviser la limite d’âge, l’App Store bloquera indéfiniment la mise à jour. Apple s’est engagé à étudier de près les réclamations du développeur avant de prendre une décision définitive.
Une règle encore peu respectée
Dans un entretien accordé au Wall Street Journal, Ben Volach, cofondateur de Blix, estime qu’Apple « qu’Apple cible injustement » son application de courrier électronique. Il estime que la décision d’Apple est injustifiée. Il regrette aussi que le géant n’ait pas ouvertement évoqué les nouvelles réglementations encadrant les applications avec des fonctions liées à l’IA.
« Apple rend vraiment difficile d’apporter de l’innovation à nos utilisateurs », regrette Ben Volach, qui redoute qu’une limite d’âge aussi basse ne rebute d’éventuels nouveaux usagers.
Ben Volach affirme par ailleurs que « d’autres applications animées par GPT ne semblent pas être restreintes ». En réponse au développeur, Apple souligne que Microsoft Bing, l’une des applications ayant intégré le modèle de langage derrière ChatGPT, est bien réservé aux internautes de plus de 17 ans sur l’App Store. La version Android de Bing, disponible sur le Play Store, n’a quant à elle aucune restriction d’âge. Contrairement à Apple, Google n’applique pas (encore ?) de réglementations dédiées aux apps qui s’appuient sur l’IA.
L’exemple mis en avant par Apple n’a pas convaincu Blix. Le développeur continue d’estimer que certaines applications échappent à la nouvelle règle d’Apple. En consultant l’App Store, nous avons rapidement déniché plusieurs apps, qui se servent ouvertement de ChatGPT, et qui sont disponibles pour les enfants et les adolescents. On pense notamment à ChatBot AI Chat : Writing Bot ou à Genie – AI Chatbot.
En plus de proposer un chatbot aux plus jeunes, ces apps cherchent à gagner de l’argent en mettant à disposition de ses utilisateurs la version gratuite de ChatGPT. Les développeurs proposent en effet des abonnements directement dans l’interface de l’application. La plupart se font volontiers passer pour une solution officielle.
Pour Phillip Shoemaker, ancien directeur principal de l’équipe d’examen de l’App Store chez Apple, ce n’est pas une surprise. Contacté par le Wall Street Journal, l’ancien cadre explique qu’il arrive souvent que les nouvelles politiques d’Apple ne soient pas appliquées à tous les développeurs. Il faut parfois du temps avant que le groupe n’uniformise ses protocoles.
« Il y a des centaines de personnes qui examinent chaque application. Tout le monde ne voit pas la même chose. Certains consultent les applications plus rapidement que d’autres et pourraient manquer des choses », témoigne Phillip Shoemaker.
On peut s’attendre à ce que l’App Store ne tarde pas à mettre noir sur blanc ses nouvelles règles en prévision de l’explosion des applications boostées par un modèle de langage. Fort du succès de ChatGPT, OpenAI a en effet annoncé la mise à disposition de son modèle de langage à toutes les marques et entreprises, moyennant finance. Dans ces conditions, le chatbot intelligent devrait rapidement être partout…
Source :
Wall Street Journal