« Créer une bulle de paix » au sein d’un Hémicycle plongé dans l’examen, déjà chaotique, de la réforme des retraites, selon l’expression du député des Français de l’étranger Stéphane Vojetta (Renaissance).
Jeudi 9 février, à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste (PS) – au cours de laquelle le groupe a la main sur l’ordre du jour de 9 heures à minuit –, les parlementaires vont examiner une proposition de loi portée par le député du Calvados Arthur Delaporte sur un sujet qui fait aujourd’hui consensus à l’Assemblée nationale : définir et encadrer l’activité des influenceurs, mais aussi lutter contre les dérives des pratiques publicitaires de ces célébrités des réseaux sociaux, à l’heure où des victimes s’organisent pour porter plainte contre de la publicité frauduleuse ou des escroqueries financières.
Si ce texte est le premier à être examiné en séance publique, pas moins de trois autres propositions de loi poursuivant le même objectif, issues des rangs écologistes et « insoumis », ont été déposées ces dernières semaines, preuve de l’intérêt grandissant des élus pour des questions qui touchent un public habituellement éloigné des travaux parlementaires.
Préoccupations légitimes
« C’est un phénomène qui a explosé au grand jour récemment et qui a permis de se rendre compte de l’ampleur des arnaques. On est donc beaucoup à s’être dit qu’il fallait vite faire quelque chose », explique l’écologiste Aurélien Taché, député du Val-d’Oise, auteur de la première proposition de loi sur ce thème après avoir été contacté par des victimes dans sa circonscription. Même récit du côté de Nadège Abomangoli (La France insoumise-Nupes), élue de Seine-Saint-Denis :
« On est beaucoup venu me parler de ce sujet pendant ma campagne, notamment sur des cas de paris en ligne et de trading. Ça ne concerne pas seulement les plus jeunes ; il y a énormément d’attente de la part de nos administrés à ce sujet. »
Le député du Calvados Arthur Delaporte est, lui, encore surpris de l’ampleur prise sur les réseaux sociaux par une de ses interventions sur le sujet, au Palais-Bourbon, début octobre 2022. Partagée par le chanteur Booba, devenu une figure du combat contre les pratiques des influenceurs, la vidéo « a fait 300 000 vues, on a changé de dimension. On a parlé à des gens qui avaient l’impression que l’Assemblée nationale était un lieu où on ne parlait pas de leur préoccupation légitime ».
Dans la foulée, l’élu de 31 ans s’est attelé à écrire une proposition de loi, à article unique, pour créer un statut juridique de l’influenceur. Adopté en commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale le 1er février, il interdit la promotion sur les réseaux sociaux de « produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux et actes de chirurgie » ainsi que celle « des placements ou investissements financiers ». Il entend aussi contraindre les influenceurs à signaler systématiquement que « les pronostics sportifs », les « jeux d’argents » ou les « inscriptions à des formations professionnelles » sont « réservés aux personnes majeures ». « En disant ce qu’il faut faire ou ne pas faire, on responsabilise l’ensemble de l’écosystème, explique le député. Et on protège les premières victimes des influenceurs, qui sont souvent des personnes en situation de précarité. »
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