Les désinfluenceurs, vraie posture ou « greenwashing de l’influence » ?

Les désinfluenceurs, vraie posture ou « greenwashing de l’influence » ?


« Vous n’avez pas besoin de ce produit dont vous ignoriez l’existence il y a trente secondes » ; « ne scrollez pas parce que je vais vous faire économiser des centaines d’euros » ; « c’est de la camelote, ne l’achetez pas », etc. Depuis quelques mois, on peut trouver ce genre de discours, en apparence anticonsumériste, sur les réseaux sociaux.

Ce mouvement porte un nom (et un hashtag) : la désinfluence (#deinfluencing). Il émerge au moment où les escroqueries virales se multiplient et où les critiques se durcissent à l’encontre des « influvoleurs » qui pratiquent notamment le dropshipping (comprendre : la vente à des prix élevés de produits de piètre qualité). Ainsi, des tiktokeurs et des instagrammeurs tentent de dissuader leur communauté d’acheter tel ou tel produit, en général des articles de mode et de beauté, arguant d’un mauvais rapport ­qualité/prix ou d’une promesse publicitaire mensongère. « Testé et non approuvé », voici en substance leur message.

Par exemple, la tiktokeuse Michelle Skidelsky (147 000 abonnés), acheteuse compulsive repentie, liste dans ses vidéos des produits à la mode « dont vous n’avez pas besoin » : un sèche-cheveux Dyson, des produits cosmétiques Aesop ou Glossier, 25 parfums différents, un nouvel iPhone, etc., promettant à ses followers, une vie plus saine et un compte en banque au solde ­positif.

Une pratique ambiguë

« Le hashtag #deinfluencing et ses dérivés comptabilisent plus de 500 millions de vues sur TikTok, mais il faut relativiser, à titre de comparaison le hashtag #ootd [outfit of the day, soit “look du jour”, en français] représente à lui seul 100 milliards de vues, précise Guilhem Fouetillou, professeur à Sciences Po Paris. La désinfluence réunit deux mouvements de fond : la prise de conscience environne­mentale et l’inflation, qui se rencontrent autour d’une nécessité de consommer moins. »

Ces désinfluenceurs s’inscrivent à contre-courant de la tendance populaire du haul (« butin »), qui, sur TikTok, consiste à déballer face caméra des montagnes de produits achetés lors de virées shopping – essentiellement des articles de la fast fashion. Mais leur pratique est pour le moins ambiguë. La plupart du temps, ces créateurs de contenu suggèrent à leurs followers des produits alternatifs, un rouge à lèvres ou une crème antirides plus efficaces et moins chers, reprenant alors les codes du placement de produit et de… l’influence.

La désinfluenceuse Chloë Chapdelaine dans une vidéo TikTok.

Beaucoup d’observateurs dénon­cent une forme de « greenwashing de l’influence », une posture écolo qui surferait sur la tendance à la déconsommation et permettrait de cumuler des likes avec l’algorithme de TikTok. La culture du clash et du name and shame, qui consiste à jeter la honte et le discrédit sur quelqu’un ou quelque chose en le ou la nommant, est par ailleurs connue pour générer des clics.

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