Alors que Huawei affiche en grande pompe ses dernières innovations au MWC cette semaine, les États-Unis seraient sur le point de limiter encore plus la vente de technologies américaines au géant chinois.
Les États-Unis seraient sur le point de resserrer d’un cran l’étau qui asphyxie, depuis des années, Huawei, dans un contexte de tensions croissantes entre les deux plus grandes économies du monde. Le pays, qui a déjà interdit la fourniture de certains composants clefs à l’ancien champion des smartphones chinois, pourrait durcir encore plus les règles. Jusqu’à présent, Huawei pouvait se fournir en composants antérieurs à la 5G ou au cloud pour fabriquer ses smartphones ou ses équipements télécoms.
L’entreprise a d’ailleurs exposé en grande pompe au Mobile World Congress (MWC) qui a lieu cette semaine à Barcelone ses dernières antennes 5G et autres infrastructures. Un véritable « doigt d’honneur à Biden » revenant à dire : « malgré les sanctions, l’entreprise se porte très bien », expliquait à l’AP John Strand, un expert de l’industrie des télécommunications interrogé par nos confrères.
L’objectif est de mettre Huawei sur la touche
Mais les choses « sont en cours d’évaluation », a expliqué Alan Estevez, le sous-secrétaire du Commerce en charge de l’industrie et de la sécurité, lors d’une audience de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, mardi 28 février. Le ministère du Commerce américain est en train de revoir toutes ses règles de « contrôles à l’exportation » qui concernent les entreprises chinoises dont Huawei fait partie.
Et le gouvernement de Biden souhaiterait cette fois couper Huawei de tous ses fournisseurs américains, comme Intel et Qualcomm, même pour les composants de génération antérieure – les produits moins récents, rapporte Bloomberg. L’objectif est désormais de s’aligner sur les efforts du gouvernement américain pour mettre Huawei et d’autres entreprises similaires sur la touche, a insisté le président de la commission des affaires étrangères, Michael McCaul, lors d’une audition à la Chambre des Représentants, mardi 28 février. En janvier dernier, le Financial Times expliquait déjà que le gouvernement Biden envisageait de mettre en place une interdiction totale de la vente de technologies américaines à Huawei.
Les règles de contrôles à l’exportation, une arme redoutable du gouvernement américain
Régulièrement, le pays met à jour ses règles de contrôles à l’exportation, une réglementation qui lui permet de contrôler l’exportation de technologies « made in USA » considérées comme particulièrement stratégiques ou sensibles (comme le sont les technologies des télécommunications). Ainsi, à chaque fois qu’une entreprise veut se fournir en composants fabriqués aux États-Unis ou fabriqués à l’étranger, mais utilisant une technologie américaine – cela peut être un procédé d’une machine, un composant, un savoir-faire… – elle doit solliciter une autorisation – qu’on appelle une licence – à l’administration américaine.
Cette part américaine, qui peut être minime, lui a permis d’interdire aux fabricants de puces de dernière génération – considérés comme les plus sensibles – de vendre leurs composants à Huawei. D’autres produits, jugés moins stratégiques, pourraient donc s’ajouter à cette interdiction.
Huawei, victime du conflit sino-américain
Cette possibilité d’un durcissement s’inscrit dans un ensemble de sanctions américaines qui ont commencé en 2019. La raison est simple : depuis des années, les États-Unis soupçonnent Huawei de copier ses champions américains, mais surtout d’être à la solde du gouvernement chinois. Le pays craint que les équipements de réseau sans fil 5G de Huawei ne permettent à Pékin d’espionner les communications américaines, une accusation toujours réfutée, avec force, par la société chinoise. Le premier coup est porté en mai 2019 : les États-Unis placent alors le géant de Shenzhen sur liste noire. Désormais, aucune entreprise américaine ou étrangère n’a le droit de fournir des composants ou des services à Huawei, dès lors qu’une technologie américaine est utilisée.
Conséquence, les smartphones de la marque chinoise ne peuvent plus proposer les apps et le système d’exploitation Android de Google. Gmail, Maps, et YouTube disparaissent des écrans du géant chinois. Mais surtout, l’entreprise est privée des puces de dernière génération : des composants absolument indispensables pour tout fabricant de smartphones, qui va faire dégringoler le champion chinois de la scène internationale.
Sur le marché de la 5G, les choses ne sont pas plus reluisantes : la Commission fédérale des communications américaine a interdit tout achat futur d’équipements et d’infrastructures télécoms aux États-Unis. La décision a fait boule de neige : de nombreux pays occidentaux ont exclu l’ancien numéro un mondial des vendeurs de smartphones de leurs appels d’offre de la 5G. Et si jusqu’à présent, Huawei parvenait tant bien que mal à garder la tête hors de l’eau, notamment grâce à ses équipements télécoms, cet énième durcissement, s’il se confirme, pourrait encore plus compliquer la donne du fabricant chinois.
Source :
Bloomberg