En France, les ayants droit pourront désormais faire bloquer bien plus rapidement les sites diffusant sans autorisation les matchs, films et séries. Le Conseil d’Etat vient d’alléger sensiblement la procédure qui permet de demander le blocage des sites miroirs de streaming illicites.
Agir plus rapidement et plus facilement contre les sites miroirs ? Vendredi 4 juillet, le Conseil d’État a rendu une décision sur le streaming illégal qui devrait soulager les détenteurs de droits de diffusion du football et du cinéma. Dans cette affaire, repérée par L’Informé, et publiée sur le site de la plus haute juridiction administrative, Canal Plus demandait au juge d’annuler plusieurs décisions de l’Arcom, qui rejetait ses demandes de blocage de « sites miroirs ». Initialement, la chaîne cryptée, qui détient des droits de diffusion de la Ligue des Champions et de la Premier League, avait demandé au tribunal judiciaire de Paris de bloquer « plusieurs sites rediffusant sans autorisation les matchs de ces compétitions ».
Le 10 octobre 2024, le juge avait bien donné suite à ses demandes. Mais quelques jours plus tard, Canal Plus s’était aperçu que les sites en question bloqués avaient été répliqués à l’identique ou en partie sur d’autres URL – ce qu’on appelle des « sites miroirs ». Elle avait alors demandé à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) les 27 novembre, 11 et 23 décembre d’actualiser la liste des sites visés par ces mesures de blocage, pour inclure les sites miroirs. Mais en janvier dernier, le gendarme de l’audiovisuel et du numérique avait rejeté ces demandes, en expliquant qu’il n’avait pas reçu « un certificat de non-appel ».
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Dans sa décision du 4 juillet, le Conseil d’État a estimé que ce document n’avait pas à être fourni : un point de procédure qui peut paraître anodin, mais qui va permettre aux détenteurs de droits de diffusion de compétitions sportives comme le foot ou de films ou de séries, de bloquer bien plus rapidement les sites miroirs de streaming illégal.
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Une procédure qui prenait des mois
Pour comprendre la portée de cette décision, il faut revenir aux actions que peuvent mener les ayants droit (comme Canal Plus), face à des sites de streaming ou d’IPTV illégal. Ces derniers peuvent demander devant la justice à ce que les fournisseurs de service internet bloquent des noms de domaine. Mais en pratique, ces sites, une fois inaccessibles, sont souvent immédiatement répliqués en totalité ou en partie.
Pour mettre fin à ce jeu du chat et de la souris, le législateur a prévu, depuis 2021, une procédure accélérée, qui évite aux ayants droit d’avoir à repasser devant le juge à chaque apparition d’un site miroir. En théorie, les détenteurs de droits de diffusion et de droits d’auteur peuvent soit demander au juge d’actualiser la première décision de blocage, soit signaler les sites miroirs à l’Arcom. Le gendarme de l’audiovisuel ordonne alors directement aux fournisseurs d’accès à internet de bloquer les nouveaux noms de domaine.
Mais en pratique, cette seconde option, censée être plus rapide, prenait des mois. Selon le texte de loi (l’article L. 331-27 du code de la propriété intellectuelle) il faut en effet une « décision judiciaire passée en force de chose jugée » pour mettre en œuvre cette procédure.
Pour que cette condition soit remplie, l’Arcom demandait que Canal Plus fournisse « un document de non-appel », une preuve que la société responsable de la diffusion illicite n’a pas déposé de recours contre la décision de blocage. Or, il fallait attendre au moins deux mois pour obtenir des autorités ce fameux document, et plus encore si la société en question se situait en dehors de l’Hexagone, précise L’Informé. Dans ce dossier, Canal Plus ne l’avait pas fourni, sa demande avait donc été rejetée par l’Arcom.
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Ce point de vue n’est pas partagé par le Conseil d’État, qui annule la décision de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique. La plus haute juridiction administrative estime qu’au vu de « la finalité de la procédure », la décision première du tribunal judiciaire de Paris « bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire ». Comprenez, elle s’applique immédiatement, qu’il y ait ou non un appel. Ce type de décision doit être considérée « comme passée en force de chose jugée », écrit noir sur blanc le juge administratif. Résultat, les ayants droits n’ont plus besoin de fournir ce document pour obtenir de l’Arcom le blocage des sites miroirs… ce qui devrait accélérer sensiblement le blocage de ces sites de streaming illégal.
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