Dans un communiqué publié mardi 12 septembre, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) a demandé aux magasins et aux boutiques en ligne de cesser provisoirement la vente de l’iPhone 12. Selon elle, ce smartphone d’Apple émet des ondes trop puissantes, supérieures à la norme européenne en vigueur.
Quel est le problème avec l’iPhone 12 ?
Comme d’autres mobiles, ce smartphone est capable de détecter la proximité immédiate du corps humain grâce à ses capteurs de mouvements et de proximité. Cela lui permet de réduire ses émissions d’ondes et, théoriquement, de passer sans encombre les tests de l’ANFR. Or selon l’agence, ce système n’est pas parfaitement fiable : « Nous avons constaté que l’iPhone 12 ne détecte pas toujours la présence immédiate du corps, explique Gilles Brégant, directeur général de l’ANFR, joint mercredi par Le Monde. C’est l’origine du problème. »
Apple a affirmé à l’Agence France-Presse qu’il contestait les conclusions de l’agence. Le constructeur assure lui avoir fourni des résultats d’études indépendantes, menées en laboratoire par des tiers, prouvant que ses appareils respectent les normes. La marque dit néanmoins vouloir poursuivre les discussions avec les autorités.
Tous les iPhone 12 sont-ils concernés ?
« Nous n’avons pas d’élément qui nous fasse penser le contraire », juge Gilles Brégant. L’ANFR, qui examine régulièrement les émissions de différents modèles de smartphones, a prélevé des exemplaires de l’iPhone 12 en magasin à partir de novembre 2021 – soit un peu plus d’un an après sa sortie en octobre 2020 – avant de réaliser ses tests quelques mois plus tard.
Elle a alors constaté un dépassement des valeurs limites des ondes électromagnétiques émises et absorbées par le corps humain. Depuis lors, le problème n’a pas été corrigé : il est donc probable que tous les iPhone 12 soient touchés, à l’exception des iPhone 12 mini et iPhone 12 pro, pour lesquels les tests n’ont pas révélé d’excès.
Est-il risqué de continuer à en utiliser un ?
Lors de son étude, l’ANFR a commandé deux types de tests au laboratoire allemand Cetecom Advanced. Le premier consiste à mesurer l’absorption des ondes par le tronc du corps humain. Il correspond au scénario où l’on porte un mobile dans un sac ou un costume, soit à cinq millimètres du corps. Ces tests n’ont pas révélé de dépassement des seuils autorisés en Europe.
Le deuxième test en revanche, qui mesure l’absorption par les membres (jambes, bras, mains…), a révélé des valeurs excédant les limites fixées. Ce test évalue par exemple les émissions d’ondes vers la main tenant le mobile, ou la cuisse contre laquelle il est plaqué lorsqu’on le met en poche. Le débit d’absorption spécifique (DAS), exprimé en watt par kilo, est monté à 5,74 W/kg, alors que le seuil maximal autorisé est de 4 W/kg.
Sous ce seuil, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), on n’observe pas d’effets négatifs sur la santé. Avec un pic constaté à 5,74, les risques restent minimes, selon le ministre chargé de la transition numérique et des télécommunications, Jean-Noël Barrot, qui a estimé mardi dans les colonnes du Parisien que ce dépassement de 44 % était « très léger ». Un péril d’autant plus limité que les tests dans l’Union européenne, rappelle l’Anses, sont réalisés sur des mobiles poussés à leur puissance maximale pendant toute la durée de l’essai, ce qui ne correspond pas à leur usage réel.
Si Apple corrige ce problème sous quelques semaines, ce dépassement ne devrait pas avoir d’effet notable sur la santé. « Ça n’est pas un risque grave et immédiat », estime ainsi Gilles Brégant. Mais si la marque à la pomme refuse, les usagers les plus prudents pourront réfléchir à changer de mobile. Devant l’impossibilité, pour l’heure, de vérifier l’absence totale d’effets sur la santé, l’Anses recommande en effet de préférer les mobiles qui émettent le moins d’ondes et de réduire l’exposition des enfants.
Comment Apple peut-il corriger le problème ?
Les problèmes de dépassement du seuil d’émissions peuvent généralement être résolus à distance par le constructeur, avec une simple mise à jour logicielle. Cette opération est très simple pour les usagers, la plupart des possesseurs d’iPhone l’exécutent régulièrement. Dans le cas de l’iPhone 12, il est possible que cette mise à jour soit toutefois délicate à mettre au point, puisqu’elle est liée à ses aptitudes à détecter automatiquement la proximité humaine.
L’ANFR est-elle sévère avec Apple ?
Pour le ministre Jean-Noël Barrot, la règle est la même pour tout le monde, y compris les géants du numérique. L’ANFR, elle, assure que « les tests sont les mêmes pour tous » et qu’ils « sont standardisés et reproductibles ».
Le Monde
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Les dépassements des seuils d’émission sont généralement pris au sérieux par les fabricants. Ces trois dernières années, une vingtaine de mobiles pris en défaut en France ont ainsi reçu des mises à jour correctives, notamment chez Samsung, Motorola, Xiaomi et Sony. Ces corrections arrivent souvent en moins d’un an.
Avec Apple cependant, « les échanges se sont étirés sur une période inhabituellement longue. A cette heure, Apple ne nous a toujours donné aucune indication de la manière dont il comptait résoudre ce problème », regrette l’ANFR. Est-ce cette situation qui a poussé l’agence à annoncer publiquement le blocage de la distribution de l’iPhone 12, mardi, en plein milieu de la conférence d’Apple annonçant l’iPhone 15 ? « Ce timing est un hasard », élude Giles Brégant.
Que risque Apple s’il ne fait rien ?
Si Apple n’a pas pris de mesure dans les quinze prochains jours, l’ANFR pourrait aller jusqu’à exiger le rappel de tous les iPhone 12 du marché français. « Les consommateurs seraient alors possiblement indemnisés par un remboursement ou un bon d’achat, explique l’ANFR. Nous l’avons déjà fait pour d’autres marques par le passé. Mais nous avons bon espoir de ne pas en arriver là. »