« Ma jeunesse en Irlande du Nord m’a laissé avec un certain degré de cynisme »

« Ma jeunesse en Irlande du Nord m’a laissé avec un certain degré de cynisme »


Le révérend Jesse Custer et l’agent Billy Butcher ont plusieurs points communs avec leur créateur, le scénariste irlandais Garth Ennis. Les deux personnages désabusés – de Preacher et sa crise de foi, pour le premier, et de la satire superhéroïque The Boys, pour l’autre – partagent en effet avec leur auteur un certain goût pour le sarcasme et la violence.

Bien avant que ses deux séries phares ne soient récemment adaptées à la télévision, Garth Ennis s’est taillé à partir des années 1990 une solide réputation dans la BD américaine, travaillant, dans le sillage d’Alan Moore et d’autres auteurs britanniques, des récits plus matures et poisseux. De passage au Paris Fan Festival, qui se tient les 15 et 16 avril porte de Versailles, il revient sur les origines de ses scénarios au vitriol.

Dans l’introduction d’une édition de la série de comics « Hellblazer », vous expliquez que certaines personnes gagnent leur vie avec la mort et spécifiez que Quentin Tarantino et vous faites cela en tuant régulièrement vos personnages. Pourquoi ce goût particulier pour la mort ?

La plupart des gens qui travaillent dans la BD américaine lisaient des BD américaines. Moi, je suis arrivé dans cette industrie par un autre chemin : celui de la BD, des films et séries britanniques, où je pense que les récits étaient un peu plus durs, à l’opposé des drames en costumes multicolores que vous trouviez dans les comics de superhéros, où rien ne blesse jamais vraiment et où même si quelqu’un se fait tuer, il revient toujours à un moment donné.

Vous avez grandi en Irlande du Nord dans les années 1970 et 1980. En quoi cette adolescence a-t-elle façonné votre façon de voir le monde et infusé dans vos scénarios ?

L’expérience m’a laissé avec un certain degré de cynisme. Celle d’un habitant de banlieue qui entendait ce qui se passait par exemple dans les ghettos violents du centre-ville. Mais, au lieu qu’il s’agisse d’affaires sociales ou criminelles, il y avait une composante politique. On a laissé le problème prendre de l’ampleur, pourrir, se transformer en une campagne terroriste à part entière.

Entendre le bilan des morts à la radio tous les matins, comprenant que personne n’allait rien faire à ce sujet… Je pense que ça m’a donné une vision plutôt sombre de la vie. Il me semblait à l’époque que les actes répréhensibles resteraient impunis et que rien ne serait fait pour mettre fin au conflit. C’est une idée que j’ai mis du temps à digérer.

Jessie, Tulip et Cassidy, trois des personnages de « Preacher », scénarisé par Garth Ennis et dessiné par Steve Dillon.

Un des thèmes que vous travaillez dans vos œuvres, à l’instar de « Preacher », est la foi religieuse. Qu’est ce qui vous intéresse dans le déboulonnage du sacré ?

Il vous reste 66.51% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.